Association Toxicologie-Chimie de Paris.
L’UTILISATION DU GAZ LACRYMOGENE CS SES EFFETS TOXIQUES
A PLUS OU MOINSLONG TERME
Alexander SAMUEL Docteur en BiologieAndré
PICOTPrésident de l’ATC-Paris Directeur de recherche honoraire du CNRS
Expert français honoraire auprès de l’Union européenne pour les Produits chimiques en Milieu de Travail (SCOEL, Luxembourg).
Conclusion
Le Gaz lacrymogène CS a été longtemps présenté comme Inoffensif pour la santé. Son Emploi a été justifié comme étant moins létal et entraînant moins de traumatisme que d’autres techniques de maintien de l’ordre. Cependant, dès sa première utilisation civile, des cas inexpliqués de morts ont entraîné de fortes inquiétudes parmi la population. Les effets néfastes tant aigus,qu’à plus ou moins long terme sur la santé sont évidents et par exemple bien connus officiellement pour les militaires et les forces de police. Le nombre d’études recommandant la prudence, une restriction,un contrôle, des formations ou des guides d’utilisation de ces Gaz sont nombreuses et les scientifiques étudiant les Gaz de combat comme le Gaz CS se sont toujours inquiétés de leurs effets sur la santé, que ce soit sur les populations à risques comme les enfants, les femmes enceintes, les personnes âgées, les personnes souffrant de pathologies diverses et souvent sous traitements, aux effets secondaires importants.
En particulier les personnes exposées à de fortes doses sont incontestablement des cibles privilégiées, qui vont subir des atteintes corporelles et souvent psychologiques plus ou moins graves. A dose plus ou moins élevée, le Gaz CS provoque un effet irritant, pouvant entraîner des dommages susceptibles de devenir irréversibles au niveau des yeux, de la peau, des poumons et du tractus gastro-intestinal... Les effets immédiats sur la santé de l’anion cyanure sont bien documentés: effets irritants au niveau des yeux, de la peau, du tractus respiratoire, atteinte du système cardio-vasculaire et du système nerveux central (entraînant des maux de tête, des étourdissements, une grande Fatigue...). Sur un plus long terme, l’anion cyanure peut aggraver ces atteintes et également toucher le système endocrinien (Thyroïde). Actuellement, la carcinogénicité est encore discutée,mais des études biochimiques laissent à penser qu’il pourrait avoir une activité mutagène, voire épigénétique. De nombreux cas de mortalité ont été décrits, dont certains récents mais ont toujours été contestés ou dissimulés.
A partir du Gaz CS lors de sa distribution dans l’organisme et ensuite lors de sa métabolisation, deux molécules d’anion cyanure(CN-) sontlibérées. Il semble logique que deux Molécules d’anion cyanure soient formées, à partir du Groupement malonitrile qui est en effet constitué de deux Fonctions Nitrile (Groupement organique, possédant une Fonction cyanée, liée à un Atome de Carbone, R-C≡N).
Les effets aigus du cyanure sont caractéristiques comme des vertiges ou une perte de connaissance. Dans le cas d’une exposition à long terme à de faibles doses en cyanure, libéré par métabolisation à partir du Gaz lacrymogène CS, utilisé de façon répétitive, entraînant entre autres une grande fatigue,est discuté dans le présent travail bibliographique. Une telle exposition, impactant des constituants essentiels de l’organisme est un facteur de risque majeur pour le cerveau, le foie, les reins, les yeux, le système gastro-intestinal, le système cardiovasculaire, la thyroïde...
Globalement, tous ces effets toxiques, graves, affectant les organismes vivants, ont indéniablement un impact important sur les populations en contact répété avec des concentrations élevées en Gaz CS. Une élévation permanente du niveau de thiocyanate dans le sang, principal marqueur biologique du cyanure, comme c’est le cas chez les Fumeurs, peut également avoir des effets à long terme sur la santé, car caractéristiques d’un taux élevé en cyanure (grande Fatigue, troubles neurologiques, endocriniens...).
L’augmentation du recours à ces armes chimiques dites «moins létales», dans des proportions de plus en plus importantes et sans règles d’utilisation bien encadrées juridiquement, entraîne une exposition à risque pour les personnels équipés de ces armes, les manifestants, et bien entendu la population habitant les quartiers exposés...
Par ailleurs, les effets sur l’environnement beaucoup moins étudiés, sont certainement non négligeables. Certains états ou régions commencent à préconiser des directives de protection en cas d’exposition, par exemple l’état du New Jersey aux États-Unis, qui demande à ce que soient réalisées des analyses urinaires de thiocyanate en cas d’exposition au Gaz CS et recommande d’évaluer l’impact sur le foie et les reins. Au Québec, les autorités préconisent qu’après un gazage au Gaz CS que les surfaces de travail soient lavées, ainsi que les fruits et les légumes, mais aussi que les filtres et les hottes utilisés dans les maisons ou établissements alimentaires, de même que les filtres des systèmes de réfrigération des chambres froides soient changés. Les directives concernant les commerces et la surveillance des habitants sont très strictes. Alors pourquoi de telles recommandations ne sont-elles pas appliquées dans l’Union Européenne et en particulier en France?
Avec l’augmentation de l’utilisation du gaz CS lors de manifestations, il devient urgent que les gouvernements faisant usage du Gaz CS prennent des décisions contraignantes allant dans le sens de la protection de la santé publique, ce qui ne peut aller que dans le sens des recommandations de l’Organisation pour l’Interdiction des Armes Chimiques (OIAC) et de certaines Organisations Non Gouvernementales (ONG).