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Billet de blog 18 décembre 2022

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« Je dois vous parler d'une journée merveilleuse » - Nicola Pesce

Dès qu'ils sont entrés dans la salle de réunion, classe par classe, ils m'ont regardé comme envoûtés et m'ont fait signe. Ils savaient tout sur Musoritz, Aliosha et Ptiza, ils aimaient les personnages de mon livre. Nicola Pesce évoque sa rencontre avec des élèves d'une école de banlieue d'un quartier « difficile » où il a été reçu pour évoquer son livre « Le renard qui aimait les livres »

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Avec l'aimable autorisation de Nicola Pesce

Je dois vous parler d'une journée merveilleuse. Je suis allé dans une école dans une de ces banlieues problématiques et dangereuses de Rome. La première chose qu'ils m'ont dit, c'est "quand vous arriverez avec la voiture, excusez les déchets qui sont partout".

Au fond de moi, j'étais effrayé à l'idée de me retrouver devant un public composé de centaines d'élèves d'écoles primaires. Je n'avais jamais fait ça avant.

Mais dès qu'ils sont entrés dans la salle de réunion, classe par classe, ils m'ont regardé comme envoûtés et m'ont fait des petits signes de la main. Ils savaient tout sur Musoritz, Aliosha et Ptiza, ils aimaient les personnages de mon livre.

Ils m'apportaient des centaines de dessins et j'avais mille choses à dire. Quand un grand illustrateur me montre un dessin, j'ai toujours envie de dire : non, non, je ne voulais pas dire ça. Et à la place, pour les cent dessins de ces enfants, je me suis dit : c'est ça, oui, c'est exactement comme je l'avais imaginé.

Et depuis des centaines de petites chaises, ils me regardaient en silence. Pour moi, qui vis dans une ville très italienne, c'était un merveilleux choc culturel de me retrouver devant une classe multiethnique et d'entendre des pensées venues du monde entier.

J'avais peur, mais je sentais que nous allions nous comprendre immédiatement. Et nous l'avons fait. Je leur ai ensuite demandé quel animal ils aimeraient inventer dans un livre, et ils m'ont rempli de réponses drôles et merveilleuses. Le vilain a dit "le hamster espiègle", l'enfant calme a dit "la chouette timide", et chacun d'eux s'est ouvert complètement sans le savoir.

Ils voulaient tous une dédicace, il y en avait des centaines, et ils ont afflué vers moi comme les meilleurs fans, en me disant leurs noms. Et chaque visage avait une histoire de douleur, de problèmes, de pauvreté, des histoires que, avec une présomption naïve, je crois comprendre parfaitement, et mon sourire se répercutait sur les leurs tandis qu'ils me les racontaient : Faruk, Paula, Andrej, Shui...

Je vous avoue que je n'arrive pas à me sentir adulte. Je ne peux pas. Je n'aime pas ça. Je me suis immédiatement senti l'un d'entre eux et j'ai ressenti une infinie nostalgie pour ces pupitres scolaires. Moi aussi j'aurais aimé être, petit encore, entre ces murs aimables et colorés.

Une petite fille, après que je lui ai donné un autographe, est partie. Elle est revenue en courant et m'a serré très fort dans ses bras. Qui sait, je lui ai peut-être donné l'espoir que même avec tant de problèmes, la vie peut être belle. J'ai essayé de me voir à travers leurs yeux : un géant barbu et souriant qui écrit sur les renards et les souris et leur accorde plus d'attention qu'aux adultes. Qui n'a absolument pas peur de dire "Je suis bête, je fais toujours des bêtises", ou "Je suis amoureux", ou "Je pleure toujours quand je lis un livre". Et j'ai essayé d'être le meilleur possible : si j'ai mis une fois mes mains dans mes poches, je les ai immédiatement retirées parce que je ne voulais pas me fermer à eux, mais m'ouvrir, tout leur offrir.

Et même si c'était une école pauvre, même si beaucoup de ces enfants n'ont pas de famille et croient qu'ils n'ont pas d'avenir, je les enviais tellement : parce qu'ils ont un professeur merveilleux, Isabella Cocco, de l'Institut Melissa Bassi.

Chers enfants, avec un tel professeur, ils doivent envier les écoles du centre de Rome, les écoles du centre de Milan. Si j'étais un parent, je voudrais que mon enfant soit parmi vous.

Merci, Isabella. Je n'ai jamais vu autant d'amour pour les livres et autant de respect chez les gens. Et moins que jamais je ne m'attendais à me retrouver devant des centaines de bouches ouvertes, de petits visages rêveurs, m'entendant dire avec des larmes combien je les aime, combien cela me touche qu'ils lisent mes bêtises.

La pureté, que je cherche tant dans le monde et que je ne trouve jamais, était toute dans cette école, sur ces petits sièges. Ils m'ont fait savoir que le lendemain, de nombreux enfants ont acheté un petit cahier et ont décidé qu'ils voulaient devenir des écrivains. Et j'ai beaucoup pleuré dans la voiture, en partant.

traduction e.p.

Devo raccontarvi una giornata meravigliosa. Sono stato in una scuola in una di quelle periferie di Roma tanto problematiche e pericolose. La prima cosa che mi avevano detto era stata «quando arriverai con la macchina, scusa l'immondizia ovunque».

Da qualche parte dentro di me io ero spaventato al pensiero di trovarmi di fronte a una platea di centinaia di bambini delle scuole elementari. Non lo avevo mai fatto prima.

Ma appena hanno cominciato ad entrare una classe per volta nell'aula magna mi guardavano come incantati e mi salutavano con le manine. Sapevano tutto di Musoritz, di Aliosha e di Ptiza, amavano i personaggi del mio libro.

Mi hanno portato centinaia di disegni e io avrei mille cose da dire. Quando un grande illustratore mi mostra un disegno mi viene sempre da dirgli: no, no, non intendevo questo. E invece per tutti i cento i disegni di quei bimbi ho pensato: ecco, sì, è esattamente così che l'ho immaginato.

E da centinaia di sedioline mi guardavano silenziosi. Per me che vivo in una città molto italiana, è stato un bellissimo shock culturale trovarmi davanti a una classe multietnica e sentire pensieri provenienti da tutto il mondo.

Ero spaventato, ma sentivo che ci saremmo capiti subito. E così è stato. Poi ho chiesto loro che animale avrebbero voluto inventare in un libro, e mi hanno riempito di risposte buffe e meravigliose. Il cattivello diceva «il criceto dispettoso», la bambina silenziosa diceva «il gufo timido», e ognuno di loro si apriva completamente senza saperlo.

Hanno voluto essere firmate tutte le copie, che erano centinaia, e si accalcavano su di me come i migliori fan, dicendomi i loro nomi. E ogni viso aveva una storia di dolore, di problemi, di povertà, storie che io con ingenua presunzione sento di capire a fondo, e il mio sorriso si riverberava sui loro, mentre mi dicevano: Faruk, Paula, Andrej, Shui...

Io vi confesso che non riesco a sentirmi un adulto. Non ci riesco. Non mi piace. Io mi sono sentito subito uno di loro e ho provato una infinita nostalgia di quei banchetti di scuola. Anche io avrei voluto stare, piccolino ancora, tra quelle mura gentili e colorate.

Una bambina, dopo che le ho fatto l'autografo, stava andando via. È tornata di corsa e mi ha abbracciato forte. Chissà, forse le ho fatto sperare che anche con tanti problemi la vita può essere bella. Ho cercato di vedermi coi loro occhi: un gigante barbuto e sorridente che scrive di volpi e topolini e dà più retta a loro che ai grandi. Che non ha assolutamente paura di dire «io sono scemo, combino sempre guai», oppure «io sono innamorato», oppure «io piango sempre quando leggo un libro». E ho cercato di essere il meglio che potevo: se una volta ho messo le mani nelle tasche le ho subito tirate fuori perché non volevo chiudermi a loro, ma aprirmi, offrirgli tutto.

E anche se era una scuola povera, anche se molti di quei bambini non hanno famiglia e credono di non avere futuro, io li ho invidiati tanto: perché hanno una meravigliosa maestra, Isabella Cocco, dell'Istituto Melissa Bassi.

Cari bambini, con una maestra così devono invidiarvi le scuole del centro di Roma, le scuole del centro di Milano. Io se fossi un genitore vorrei che mio figlio stesse tra voi.

Grazie, Isabella. Mai ho visto tanto amore per i libri e tanto rispetto nelle persone. E meno che mai mi sarei aspettato di trovarmi davanti a centinaia di bocche aperte, di visetti sognanti, che mi sentivano dire coi lacrimoni quanto voglio loro bene, quanto mi commuove che loro leggano le mie sciocchezzine.

La purezza, che io cerco tanto nel mondo e non trovo mai, era tutta in quella scuola, su quelle sedioline. Mi hanno fatto sapere che il giorno dopo molti bambini hanno comprato un quadernino e hanno deciso che vogliono fare gli scrittori. E io ho pianto tanto in macchina, andando via.

Nicola Pesce

se présente sur son site comme un "écrivain, mais avant tout lecteur. Asperger et "gentilhomme". Amoureux de la vie lente et des petites choses.

Le texte dont je fais la traduction ci-dessus a été partagé sur sa "page Facebook"

Son dernier livre,  «La volpe che amava i libri» évoqué ici, est édité chez Edizioni NPE

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