Certes, les Etats Unis en font rêver plus d'un, mais en indiffèrent tant d'autres...
Après plusieurs mois passés en Amérique, j'ai fini par entrevoir d'où vient cette mentalité que l'on croise, à tous les coins de rue, en tout cas pour le Nord de la Californie. Les Américains ne sont pas si faciles à cerner, tout d'abord car leur culture et leur héritage ne sont en rien comparables avec ce que l'Europe nous a donné. Ils ne sont pas fleurisd'histoire, mais pourtant, on comprend vite où l'on met les pieds.
Au premier abord, c'est une chaleureuse attitude, pleine de bonnes intentions. On en tombe amoureux au premier rendez-vous ! C'est tellement rare de voir des gens si investis cinq minutes après vous avoir rencontré. Cependant à San Francisco, la ville où j’habite, les Français sont nombreux et même si cela attire l'attention et la curiosité, il est de plus en plus difficile de le cacher. Et il est de moins en moins rare de s’entendre poser des questions comme : "mais pourquoi es-tu là?" Et, personnellement, je n'ai jamais vraiment su quoi y répondre. La plupart de mes amis français non plus. Sûrement que plus on est là, moins on sait vraiment pourquoi nous sommes venus. Mais le fait de bénéficier de cette majestueuse attention et ce respect, nous rappelle un peu pourquoi nous sommes fous de l'endroit.
Souvent, je repense à ces soirées françaises, où tout le monde me regarde de haut, fait état de genre, d'attitude, se compare, ou tout simplement marque un mépris de tout. Car cela, c'est ce que j'ai souvent vu comme l'identité de la France. Aux USA, le respect ne se gagne pas, il s'offre à tous et comme il m'est arrivé d'entendre : "tant que je n'ai pas de raison de ne pas te croire, je te ferai confiance". Il vaut mieux tenter sa chance que d'agir avec trop de méfiance. Après tout, qu'est-ce qu'on y perd ?
Et le respect, c'est uneattitude commune. Si on va au-delà des règles, il y a toujours un quidam qui vient nous rappeler : "tu n'as pas le droit de t'appuyer sur la porte du métro quand il est en route", ou "ne mets pas ton vélo dans l'escalator, c'est interdit" ou le plus habituel, "ne fume pas si près des portes, il y a une réglementation de cinq mètres". Pour un Français, c'est dur à digérer. On a envie de rétorquer trivialement "Mais qu’est-ce que ça peut bien te foutre ?" Mais on n’est pas chez nous, et ici, les gens sont comme ça, et pas forcément pour nous humilier mais plutôt pour nous rappeler que si passe un représentant de l’autorité, c'est une grosse amende immédiate qui vide notre pauvre compte en banque d'immigrée...
Ce qui me frappe toujours, c'est la manière de créer un réseau aux USA. Si en France, le réseau "des copains" est le plus important que l'on puisse avoir, auxEtats- Unis, ça n'est pas ça du tout. Certes, aider un ami, ça existe, mais les gens ne sont pas très demandeurs, surement trop fiers, et aussi, c'est une question de respect. Beaucoup sont très mal à l'aise, et cela se comprend vite.« Essaie d'abord de te démerder tout seul, et si vraiment ça ne marche pas, on réfléchira à la question. »
Car au fond, la solidarité intelligente sert plutôt à nous diriger vers la bonne porte plutôt qu'à l'ouvrir à notre place. Ce qui fonctionne, c'est la débrouillardise ! Il faut le savoir, qu’ils le reconnaissent ou pas, tous les gens galèrent. La vraie galère !!! Pas l’indemnité chômage qui a baissé de 50 dollars, ou bien les APL qui ont un mois de retard !! La galère où on a un revenu mensuel de 2.000 dollars, et où 1.900 sont prélevés par les emprunts étudiants, le loyer, les divers abonnements et assurances, l'assurance maladie et j'en passe... Certains collectionnent les petits boulotsau black, d'autres trouvent de quoi faire beaucoup d'argent dans de petits business douteux. Par exemple, quelqu’un découpe sa maison spacieuse en 8 différentes chambres à louer pour les plus modestes d'entre nous.
LE PAYS OU ON SURVIT PLUS QU’ON NE VIT…
Beaucoup de Français imaginent que les américains sont plein d'argent, qu’ils sortent tout le temps, qu’ils distribuent de généreux pourboires, qu’ils vont dans les grands magasins et se font plaisir, où qu’ils conduisent de superbes voitures. Mais nombreux sont ceux qui, en fait, sont au bord du gouffre. Ils ne se plaignent pas, enfin, pas à des inconnus, mais vivent dans une grande anxiété pour certains. Certes, quelques-uns ont du fric, beaucoup de fric, question de chance, un business qui a percé, ou un job qui ouvre les portes de la réussite, à San Francisco, la Silicon Valley n'est pas très loin, et celles et ceux de Google, Yahoo, Facebook, HP ou Apple ne sont pas les plus à plaindre. Mais justement ils se baladent en jeans, jamais de cravates, et vont dans lesbars, lesmêmes bars que tous les galériens du quartier.
Et c'est justement ça que j'admire à San Francisco ! Personne n'est jugé sur ses revenus, où le prix de ses sapes. Je me souviens être allée à un match de baseball avec des amis, et y avoir rencontré un modeste bonhomme, la quarantaine, se plaignant avec moi de son ado de fille. Lorsque je lui ai demandé ce qu'il faisait, il m’a répondu "Je vends de la bouffe à emporter". Et son copain me glisse à l’oreille "Il est PDG de la boite et il gagne un million de dollars par mois." Oh choc ! Ce type sans alluregagne un million de dollar par moiset qui bois un verre avec moi devant un match de base-ball est si riche que ça ?
Je ne vois pas tellement de différences entre pauvres et riches, même si, à San Francisco, on peut être très riche !!! Mais la plupart du temps on y est très pauvre !! Les riches donnent leurs oboles aux organisations, participent à des ventes de charités, choisissent leur cause et y vont sans se ménager, et, surtout, paye un verre à tout le monde le vendredi soir au bar ! J'ai encore du mal à comprendre pourquoi, en France, nous avons créé des barrières aussi infranchissables entre les classes sociales. Riches et pauvres y ont trop peu souvent l’occasion de se côtoyer. En France, la richesse est dans le sang, ici, il est très souvent question d'accomplissement personnel.