eva.triolet

Abonné·e de Mediapart

3 Billets

0 Édition

Billet de blog 2 avril 2023

eva.triolet

Abonné·e de Mediapart

L’extinction du sens : écologie politique

Les préoccupations actuelles autour de la réforme des retraites sont tout à fait légitimes. Les préoccupations quant à l’exercice du pouvoir quasi dictatorial d’Emmanuel Macron sont également légitimes. Oui, personne ne veut être obligé à travailler deux ans de plus. Oui, certains métiers sont pénibles et pourtant non reconnus comme tels. Oui, les femmes seront lésées.

eva.triolet

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Les préoccupations actuelles autour de la réforme des retraites sont tout à fait légitimes. Les préoccupations quant à l’exercice du pouvoir quasi dictatorial d’Emmanuel Macron sont également légitimes. Oui, personne ne veut être obligé à travailler deux ans de plus. Oui, certains métiers sont pénibles et pourtant non reconnus comme tels. Oui, les femmes seront lésées.

Et oui encore, l’exercice de la violence politique et policière n’est pas fondée en droit. Elle ne repose plus sur la garantie du respect des institutions. Ces institutions censées permettre aux citoyens de transférer une part de leur liberté à un système leur laissant la possibilité de remettre en question l’exercice du pouvoir. « Le monopole de la violence légitime » ne trouve sa légitimité qu’à l’intérieur de ce cadre-là. L’organisation démocratique et républicaine en voie d’effondrement supprime en droit la source de légitimation de la violence étatique. Certes.

Mais, dans le fond, pour les plus jeunes d’entre nous, à 64 ans nous croulerons sous les sécheresses, la canicule, les inondations, et pour beaucoup, nous serons peut-être déjà morts.

La démocratie libérale républicaine échoue à faire entendre, non seulement au niveau national mais aussi international, un élément d’une évidence crasse : le sens des priorités.

Sans eau, sans air sain, sans maladie somatique générée par les actions des hommes sur Terre, sans écosystème et biodiversité : pas de vie sur Terre. Alors, la retraite à 64 ans, pour les jeunes générations, ça devrait être une préoccupation annexe.

Qu’est-ce qui met la vie sur Terre en péril ? Le système économique et financier actuel dont le seul objectif, quoiqu’il en dise, est de générer davantage de profit. Du profit pour le profit hein. Parce qu’à moyen terme les profiteurs seront morts, et peut-être même avant d’avoir pu profiter intégralement de leur profit. Ils auront simplement et égoïstement contribuer à pérenniser un système délétère. Un système mortifère. Cette mort qui arrive et que personne ne veut voir tellement elle est indigeste et irreprésentable. La mort, indigeste et irreprésentable : oui. En d’autres mots, notre propre mort. Quelque soient nos croyances, on ne peut se représenter sa propre mort. Angoisse. Et qui dit angoisse, dit souvent stratégie d’évitement pour s’en protéger. Sauf que là, notre stratégie d’évitement collective, associée à la logique du profit, nous fait courir un péril bien plus grand.

Que les gens puissent se manifester pour défendre leurs intérêts propres : très bien. Que les gens s’organisent pour renverser un système qui nuit à leur intérêt propre bien compris : encore mieux.

Ne baissons pas les bras. Continuons à nous battre pour défendre les acquis sociaux, l’égalité femme-homme, la lutte contre les inégalités de classe, les services publics, etc. Mais pensons un instant que tout ça n’a aucun sens, si la vie s’éteint sur terre.

Le sens n’existe pas en soi. Il va avec la vie. C’est l’humain qui injecte un sens à l’existence et cette dynamique relève du merveilleux. Mais faisons usage de notre logos, usage de notre raison. Le premier combat à mener reste celui qui défendra la possibilité de la continuité d’une vie humaine sur terre. Personnellement, Mars ne me tente pas.

L’hubris des dirigeants doit être freinée. Une organisation étatique démocratique mondiale avec un réel pouvoir coercitif temporaire doit vite émerger avant que ces « irresponsables » qui introduisent trop de variables, dont celle du narcissisme, dans leurs stratégies politiques n’emmènent notre civilisation vers une mort certaine.

On pourrait être plus spirituel et accepter l’extinction de notre espèce puisque tout se transforme et qu’après tout, ce qui naitra après sera sûrement intéressant. On pourrait. Sauf que nos enfants crèveront dans un monde inhospitalier. Ils auront chaud, ils auront soif. Et nous, qu’avons-nous fait pour éviter ça ?

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.