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Billet de blog 1 mars 2010

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Consultation des partis politiques: Europe Ecologie répond à notre questionnaire

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Le Forum pour d'Autres Indicateurs de Richesse (FAIR) interroge, dans le cadre des élections régionales, les principales formations politiques, sur la façon dont elles abordent la mesure de progrès ou développement humain durable, et l'intérêt qu'elles portent à la mise au point et l'utilisation de nouveaux indicateurs de richesse en région. Les Candidats d'Europe Ecologie y ont répondu. Voici leurs réponses.

FAIR : Le PIB (et sa croissance) constituent-ils des indicateurs pertinents pour la définition des orientations de votre formation politique ?

Europe Ecologie : Les écologistes fondent leur approche de l'économie et de la société sur une remise en cause de la conviction que le Produit Intérieur Brut mesure la richesse. Démazouter une plage après une marée noire est un facteur de croissance du PIB. Nous remettons en cause la pertinence de la notion même de richesse liée au produit intérieur brut. Un simple exemple : la comparaison des « performances » économiques avec d'autres indicateurs, comme l'Indice de Développement Humain, montre que la « richesse » mesurée par le PIB ne correspond pas nécessairement au bien-être des habitants.

FAIR : Votre parti utilise-t-il d'autres indicateurs clés pour guider son analyse et ses propositions en matière économique, sociale, environnementale, démocratique ?

Europe Ecologie : Dans la mesure où nous pensons que la croissance du PIB est fortement corrélée à celle de la production matérielle, nous estimons nécessaire d'ouvrir la vision à d'autres indicateurs, et fondamentalement de ré interroger la notion même de richesse. Nous reprenons à notre compte le slogan « moins de biens, plus de liens », qui résume assez bien notre vision de la richesse. Ce n'est pas parce qu'on accumule les biens matériels qu'on est forcément plus heureux ou en meilleure santé. Cela peut même être le contraire, comme le montrent les dangers en terme d'exposition à des matières cancérigènes contenues dans la plupart des biens de consommation courants.

Nous ne sommes pas pour un retour à la bougie ou à un état de nature, comme le pensent nombre de nos détracteurs. Nous pensons que l'on peut allier à la fois confort matériel et diminution de l'empreinte écologique de notre mode de vie. Cette notion d'empreinte écologique nous intéresse particulièrement parce qu'elle a l'avantage de poser à la fois le problème de la manière dont on vit (ce que l'on mange, où l'on habite, comment l'on se déplace...) et la pression que ces choix exercent sur les ressources naturelles, par définition non-inépuisables.

La question de l’internalisation des coûts sociaux et environnementaux est également essentielle. Donnons deux exemples. Les entreprises qui ont recours plus que la moyenne de leur branche à de l’intérim, des CDD de courte durée et des contrats à temps très partiel, devront s’acquitter de cotisations sociales nettement plus élevées que leurs concurrents qui jouent le jeu de la qualité sociale des contrats de travail et internalisent ainsi de fait un coût social supérieur. En matière environnementale, le fait de donner un prix à la destruction de notre capital naturel au moyen, par exemple, d’une contribution énergie-climat basée à minima sur les émissions de gaz à effet de serre permet de donner le vrai coût de production pour la planète. Selon l’OCDE et les Nations unies, le prix d’une tonne de carbone devrait se situer entre 80 et 100 euros, contre une dizaine d’euros aujourd’hui. Or, une étude de l’Ademe a montré que, à 27 euros la tonne, produire de l’aluminium n’est déjà plus rentable. Ainsi, dès que l’on prend en compte le vrai prix de l’impact de nos modes de vie sur l’environnement, leur caractère insoutenable apparaît. Reste à le traduire dans les prix de marché pour diminuer les consommations des produits les plus nocifs et encourager les technologies les plus efficientes.

FAIR : Cette question fait-elle l'objet d'un débat au sein de votre parti ? Au sein de votre région ?

Europe Ecologie : La question de la mesure de la richesse est l'un des fondements même de la pensée écologiste. Cette critique de la richesse et de la valeur nourrit tous les débats qui ont lieu au sein des écologistes. Pendant les élections présidentielles de 2007, les Verts avaient développé la notion de décroissance de l'empreinte écologique : « L’avenir ne sera soutenable pour tous les habitants de la planète que si une décroissance de l’empreinte écologique des pays riches est amorcée : décroissance de l’exploitation des ressources non renouvelables, des profits et des revenus des 20% les plus aisés, de la fabrication et de la vente d’armes, du gaspillage énergétique, des transports routiers et aériens... ».

Nous notons que les programmes des formations politiques traditionnelles, de droite comme de gauche, reprennent l'objectif de relancer la croissance du PIB. Par exemple, l'UMP estime en Ile-de-France que son projet « Grand Paris» peut provoquer un surplus de croissance et donc d'emploi. Un raccourci surprenant pour les écologistes, dans la mesure où le déséquilibre de sous-emploi que les pays « riches » connaissent depuis trente ans montre qu'il peut y avoir coexistence entre croissance du PIB et augmentation et maintien d'un chômage de masse.

FAIR : En quoi de nouveaux indicateurs peuvent-ils avoir des répercussions utiles et concrètes sur les politiques mises en œuvre, au niveau national et au niveau régional ?

Europe Ecologie : Aujourd'hui, les politiques publiques sont conduites sous l'ombre systématique du référentiel du Produit Intérieur Brut. Les collectivités locales débattent depuis quelques semaines de leurs orientations budgétaires pour 2010. Toutes le font en se basant sur les prévisions de croissance. Pas simplement parce que c'est usuel, mais aussi parce que la quasi totalité des mécanismes financiers entre l'État et les collectivités locales sont régis

par l'évolution du PIB.

Sans entrer dans les détails, il est évident que l'utilisation d'autres indicateurs peut amener à modifier la façon dont on pense l'action publique et le contenu de certaines politiques publiques. Par exemple, en matière de développement économique. Chaque année, les Régions dépensent 800 millions d'euros en aides aux entreprises. Ces aides sont très peu soumises à conditions, notamment par rapport à des objectifs de réduction de l'empreinte écologique des activités des entreprises concernées. Autre exemple, dans le domaine des transports. L'évaluation des coûts et des conséquences d'un investissement autoroutier, au delà de la réponse à un simple enjeu de trafic, amènerait sans aucun doute à la remise en cause du programme routier français...!

A notre sens, l'intérêt principal de la construction de nouveaux indicateurs réside dans la mise en lumière de populations ou de phénomènes mal pris en compte habituellement. C'est notamment le cas en matière de politique de la ville. De nombreux investissements financés sur les fonds politique de la ville sont réalisés sans définition d'objectifs et de moyens concrets en matière de réduction de la pauvreté, de l'exclusion, des inégalités

d'accès au logement, à l'emploi...

FAIR : Quelles doivent être les processus d'élaboration de nouveaux indicateurs ?

Europe Ecologie : La constitution et la mise en place de nouveaux indicateurs doivent être l'occasion de faire sortir de ses murs l'institution régionale, en direction du monde universitaire, de la société civile, des usagers, des citoyens.

Le modèle des commissions nationales du débat public ou des conférences de citoyens est intéressant, parce qu'il permet de dégager, par la pluralité des points de vue et des approches, un consensus une vision partagée des enjeux, des problèmes et de la manière de les regarder.

FAIR : Quels engagements prenez-vous, dans le cadre de la campagne des régionales, pour le développement de nouveaux indicateurs de richesse ?

Europe Ecologie : Les élus Verts de la Région Nord-Pas-de-Calais ont été moteurs dans l'exploration de nouveaux indicateurs de richesse, qui offrent un large panel de regard, sur les aspects économiques, sociaux et environnementaux de la région.

Leur travail sera source d'inspiration pour l'ensemble des élus écologistes des Conseils régionaux.

Nous souhaitons mettre en place des tableaux de bord régionaux, si possible harmonisés au niveau national, comprenant les orientations suivantes :

– Évaluation de l'empreinte écologique des choix de la collectivité régionale.

– Utilisation des indicateurs du PNUD (notamment l'IDH).

– Utilisation d'indicateur en matière d'inégalités et de pauvreté, du type BIP 40.

Le Forum pour d'Autres Indicateurs de Richesse (FAIR) interroge, dans le cadre des élections régionales, les principales formations politiques, sur la façon dont elles abordent la mesure de progrès ou développement humain durable, et l'intérêt qu'elles portent à la mise au point et l'utilisation de nouveaux indicateurs de richesse en région. Les Candidats d'Europe Ecologie nous ont répondu.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.