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Billet de blog 26 février 2010

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Consultation des partis politiques: le Parti de Gauche (PG) répond à notre questionnaire

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Le Forum pour d'Autres Indicateurs de Richesse (FAIR) interroge, dans le cadre des élections régionales, les principales formations politiques, sur la façon dont elles abordent la mesure de progrès ou développement humain durable, et l'intérêt qu'elles portent à la mise au point et l'utilisation de nouveaux indicateurs de richesse en région. Franck Pupunat, Secrétaire National du Parti de Gauche à répondu à notre questionnaire pour le PG. En voici les réponses.

***

1) Le PIB (et sa croissance) constituent-ils des indicateurs pertinents pour la définition des orientations de votre formation politique ?

Le Parti de Gauche milite sans ambigüité pour une remise en cause de la croissance comme indicateur pertinent pour définir les orientations de notre formation politique.

En effet le PIB et sa progression n’ont pas de sens pour mesurer le degré d’atteinte d’une bonne société. Rappelons qu’une catastrophe naturelle peut augmenter fortement le PIB et donc la croissance. Il ne prend pas non plus en compte les incidences négatives et l’impact humain, environnemental, social et psychologique en dehors du coût financier que d’éventuelles réparations pourraient engendrer.

La croissance n’a été capable ni de réduire la pauvreté, ni de renforcer la cohésion sociale. Un même taux de croissance peut signifier un accroissement ou une réduction des inégalités. Et une croissance illimitée dans un monde fini est une illusion :« Celui qui croit qu’une croissance exponentielle peut continuer infiniment dans un monde fini est un fou… ou un économiste »[1].

Nous proposons l'abandon de l'objectif insensé de la croissance pour la croissance, de la consommation pour la consommation. La croissance, ou son image inversée, la décroissance, ne peut pas plus être un objectif en soi. Comme certains objecteurs de croissance, « Nous sommes convaincus qu’il faut dépasser la contradiction croissance/décroissance car elle nous entraîne dans l’immobilisme »
En fonction de ce que peut supporter la planète et au regard de la dette écologique des pays industrialisés envers les pays du sud, les vraies questions sont : progression de quel secteur, pourquoi et pour qui ? Diminution de quel secteur, pourquoi et pour qui ? En fonction de quels objectifs, au service de quel idéal de société ?"


[1] Kenneth E. Boulding (économiste et ancien président de l’American Economic Association).

2) Votre parti utilise-t-il d'autres indicateurs clés pour guider son analyse et ses propositions en matière économique, sociale, environnementale, démocratique ?

Le PIB n’a pas été conçu pour être un indicateur de bien-être, mais son instrumentalisation politique nous a fait croire qu’il en était un.Pourtant le décalage entre le PIB et les indicateurs de santé sociale ou de qualité environnementale devient flagrant.

Nous devons chausser d’autres lunettes que celles du PIB et combattre son caractère et son utilisation impérialiste.

Il existe plusieurs dizaines d’indicateurs alternatifs et il serait illusoire, voire dangereux de guider une politique avec un seul indicateur figé, censé définir dans l’absolu le niveau du bonheur collectif. C’est leur complémentarité qui donne une vision plus large du niveau de richesse d’une société.

Le Parti de Gauche en retient cinq principaux.

L’Indicateur de Développement Humain (IDH)

Mis au point dans les Années 90 par le Programme des Nations Unies pour le Développement, il complète le PIB par des données sur la santé et l’éducation. Selon cet indicateur, les Etats Unis n’arrivent qu’en 8 ème position quand la Suède, pourtant au 20 ème rang pour le PIB par habitant, arrive au 2 ème rang.

L’Indice de Santé Sociale (ISS)

Initié en 1996 en Amérique, il fait la moyenne de seize indicateurs. On regroupe dans l'indice de santé sociale américain des critères de santé, d'éducation, de chômage, de pauvreté et d'inégalités, d'accidents et de risques divers.

Le BIP 40

Le BIP 40, Baromètre des Inégalités et de la Pauvreté a été introduit en France par le Réseau d’Alerte contre les Inégalités (RAI), collectif de chercheurs et d’associations. Le BIP 40 cherche à mettre en avant les questions de pauvreté et d’inégalités.

L’empreinte écologique

L’empreinte écologique reflète le degré d’utilisation de la nature par l’homme à des fins de production et consommation matérielle.

Aujourd’hui, il faudrait donc 1,2 planètes pour continuer à prélever au rythme actuel les ressources naturelles. On emprunte donc chaque année 20% de ressources de plus que la régénération naturelle des ressources permet.

Le PIB vert

Le PIB Vert cherche à corriger le PIB en déduisant les coûts des dommages environnementaux et sociaux.

3) Cette question fait-elle l'objet d'un débat au sein de votre parti ? Au sein de votre région ?

4) En quoi de nouveaux indicateurs peuvent-ils avoir des répercussions utiles et concrètes sur les politiques mises en oeuvre, au niveau national et au niveau régional ?

Bien entendu, ces indicateurs, leurs pertinences en fonction des territoires, leur mode de construction et les enseignements politiques sont en discussion permanente au sein du Parti de Gauche tant au niveau local qu’au niveau national.

Ces nouveaux indicateurs ont des répercutions concrètes sur les orientations et programme de notre organisation.

A titre d’exemple, voici un extrait du Manifeste du Parti de Gauche pour les régionales sur l’eau, l’aménagement du territoire et l’agriculture :

« Nous proposons que les régions mettent en place des structures régionales de gestion de l’eau. Ce afin d’inciter les communes à gérer ce bien commun en régie publique et de leur en fournir les moyens. De nouvelles politiques pourront alors être mises en oeuvre, notamment sur le plan tarifaire : premiers mètres cubes gratuits afin de garantir le droit d’accès à ce bien commun, tarif progressif afin de décourager la surconsommation d’eau et la péréquation tarifaire afin de garantir l’égalité des citoyens.

Pour le Parti de Gauche, il s’agit de réorienter l’aménagement des régions selon des principes écologiques de protection des milieux et ressources naturels et de sobriété dans l’utilisation de ces dernières. Nous demandons :

- un moratoire sur toutes les nouvelles installations de grands équipements (portuaires, aéroportuaires, routiers, de production d'énergie…) pour vérifier la pertinence écologique et l’utilité sociale de ces équipements.

(…)

Dans les domaines de l’énergie et de l’agriculture, il s’agit de développer une politique d’autosuffisance alimentaire et énergétique à l’échelle où cela est possible. Pour garantir l’accès à la terre aux paysans contre les appétits des promoteurs immobiliers, nous conventionnerons avec les associations du type « Terre de liens » pour les proposer en fermage à des agriculteurs. Ces derniers s’engageront sur une production locale, de qualité favorisant l’agriculture biologique. »

5) Quelles doivent être les processus d'élaboration de nouveaux indicateurs ?

6) Quels engagements prenez-vous, dans le cadre de la campagne des régionales, pour le développement de nouveaux indicateurs de richesse ?

Le Parti de Gauche se prononce pour une production de ces indicateurs alternatifs à la fois au niveau local, régional, national, européen et mondial afin d’être débattus.

Nous proposons de les publier annuellement, en même temps que les comptes de la nation et les présenter au Parlement et dans les collectivités territoriales avec la même solennité.

Ces indicateurs fourniraient ainsi l’occasion aux pouvoirs politiques d’alimenter le débat public sur le sens du développement et ainsi de déterminer les mesures à mettre en œuvre.

Rien ne se prête actuellement à un large débat public sur le sens du progrès, et sur celui des politiques économiques.

Un tableau de bord pourrait reprendre des indicateurs de ce type pour servir de boussole à la mise en oeuvre d’un projet de société visant à l’amélioration du bien-être individuel et collectif.

Dans le cadre des élections régionales, nous avons pris officiellement les engagements suivants (extrait du Manifeste PG pour les régionales) :

« Nous utiliserons de nouveaux indicateurs pour évaluer l’ensemble des politiques régionales à l’aune des exigences du progrès humain. Ces indicateurs constitueront l’esquisse des nouveaux critères d’évaluation des politiques publiques applicables au plan national. Au-delà du PIB, ils reposeront sur des notions d’utilité sociale et d’exigences écologiques. Une large discussion publique sera organisée autour de la définition de ces indicateurs. Ainsi, la redéfinition des priorités de l’action publique sera un outil de la démocratisation indispensable que nous voulons pour nos régions et l’ensemble des institutions du pays et de l’Europe. »


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