Lorsqu'une personne nous confie une situation de violences, il est important de faire attention à la façon dont on réceptionne cette parole. En effet, la personne nous fait confiance pour nous parler de quelque chose de difficile. On va alors essayer d'apporter un soutien à cette personne. En accueillant la parole de la bonne façon, vous participez dejà à aider la victime. En réagissant de la bonne façon, vous pouvez jouer un rôle actif dans l'aide apportée à la victime.
Accueillir la parole : les bons mots
Quand une personne est victime de violences, bien souvent, elle est aussi victime des mécanismes qui accompagnent les violences : la culpabilité, la perte d'estime de soi, la peur... Quelques phrases ont été identifiées par les associations féministes pour permettre de casser cette dynamique, ce cercle vicieux que subissent les victimes. Ainsi, on pourra dire à la victime :
Je te crois.
Tu as bien fait de m'en parler.
C'est grave. C'est interdit.
Tu n'y es pour rien.
Je suis avec toi.
Ces quelques mots permettent de montrer explicitement notre soutien, et d'instaurer une dynamique nouvelle, basée sur la confiance qu'on porte à la victime et à son récit. Non, elle n'invente pas : on la croit. Non, elle n'est pas responsable, elle ne l'a pas cherché : la seule personne coupable, c'est la personne qui commet les violences. Elle n'est plus seule, car vous la soutenez. N'hésitez pas à répéter ces phrases plusieurs fois si nécessaire, et à valoriser également la démarche de la victime : elle a bien fait de venir vous en parler, vous êtes à ses côtés.
Ecouter le récit de la victime : la posture à adopter
Selon la même logique, il est important de faire attention à sa posture pour, là aussi, venir casser les mécanismes violents dans lesquels la victime peut être immergée. On cherchera à privilégier une posture tournée vers l'écoute, emphatique, et non-jugeante. Par exemple, on évitera d'être sur son téléphone ou de lire ses mails en même temps que la victime nous parle, ou de l'interrompre : on lui montre qu'elle a toute notre attention, car c'est un sujet grave et sérieux.
On évitera aussi d'avoir des réactions qui pourraient être mal interprétées, ou faire culpabiliser : exit "pourquoi tu es allée chez lui", "pourquoi tu ne l'as pas quitté..." De façon générale, les questions qui commencent pas "pourquoi" sont à réfléchir à deux fois : peut être que vous ne pouvez pas comprendre, tout simplement parce qu'encore une fois, les mécanismes des violences sont puissants. Il est primordial que la victime ne se sente jamais jugée, au risque qu'elle se referme et ne se confie plus à vous. On peut plutôt demander comment la personne se sent, par exemple.
En somme, on adopte une posture basée sur l'écoute et on affirme son soutien.
Et après ?
Après avoir accueilli la parole de la victime et lui avoir témoigné de votre soutien, vous aller sans doute vouloir lui venir en aide, c'est un réflexe normal. Seulement, vous ne savez peut être pas exactement comment.
On peut, tout simplement, demander à la victime ce dont elle a besoin, et essayer de répondre à ce besoin.
Par exemple : "Je te remercie de m'avoir fait confiance et de m'avoir confié tout cela. Est-ce que tu attends quelque chose de ma part? Comment est-ce que je peux t'être utile, comment est-ce que je peux t'aider?"
A ce stade, plusieurs scénarios peuvent arriver.
Il est possible que la victime ne souhaite pas entamer de démarches dans l'immédiat, et qu'elle vous réponde qu'elle voulait simplement en parler.
D'un point de vue extérieur, cela peut être difficile, parce que quand on tient à la personne, on souhaite que sa situation s'améliorer, on a envie de la protéger. Pour autant, il est important de respecter la décision de la victime. Pourquoi ? Parce que si vous essayez de la convaincre de faire quelque chose pour laquelle elle n'est pas prête, vous risquez de faire plus de mal que de bien.
Premièrement, vous pourriez perdre sa confiance : si elle s'est confiée à vous et que vous décidez de prendre des initiatives sans son accord, elle risque de ne plus vous en parler, et résultat, d'être encore plus isolée.
Deuxièmement, si une démarche est entamée sans que la victime ne l'ait décidée, elle risque de ne pas suivre cette démarche jusqu'au bout, et ce sera donc inefficace.
On conseillera alors de respecter le choix de la victime, et surtout, de rester présent·e. On évitera à tout prix de mettre une quelconque forme de pression, par exemple "si c'est pour ne rien faire, ça ne servait à rien de m'en parler" : à bannir. En parler, c'est un premier pas. Si la victime se confie, c'est déjà une première démarche qui doit être encouragée. La victime ne doit pas avoir peur de votre jugement, sinon, elle ne vous en parlera plus.
On pourra alors, par exemple, lui proposer d'appeler ensemble une ligne d'écoute anonyme et gratuite, comme le 3919, ou d'en parler sur le tchat commentonsaime.fr. Ou encore, de lui proposer de l'accompagner se renseigner auprès d'une association, comme le CIDFF de votre ville. Si la victime accepte, vous pouvez faire cela avec elle, sans que cela ne l'engage à une quelconque démarche : là encore, il peut simplement s'agir de se renseigner. Si la victime refuse, elle saura que vous êtes disponibles pour l'aider dans le futur si elle décide d'entamer ces démarches, et c'est très important. Elle aura également eu connaissance des ressources qui existe : vous lui aurez montré une porte de sortie.
Il est également possible que la victime vous réponde qu'elle souhaite entamer des démarches : porter plainte, quitter une personne violente...
Dans ce cas, vous pouvez réaffirmer votre soutien et vos encouragements, par exemple "je te soutiens dans cette démarche, est-ce que tu as besoin de mon aide?".
Vous pouvez proposer d'accompagner la victime au commissariat par exemple. Vous pouvez aussi proposer un soutien très pratico-pratique : par exemple, tout simplement, venir chercher la victime chez elle à telle heure le jour du départ, ou l'aider à déménager pour que cela se fasse rapidement.
Un point de vigilance : si la situation semble dangereuse, d'une quelconque façon, n'hésitez pas à proposer à la victime de l'aider à trouver des conseils. Un exemple : quand on quitte un conjoint violent, le moment du départ est un moment qui peut être déclencheur de violences graves. Il est important de bien préparer le départ en amont, par exemple, en se faisant conseiller par les professionnelles du 3919, ou en contactant une association spécialisée.
Dans ce cas, vous pouvez aussi proposer de l'aide, par exemple, d'escorter la victime quand elle va récupérer ses affaires. Attention, ne vous mettez pas vous-même en danger, essayez de trouver une organisation sécurisée, par exemple en y allant à plusieurs, et/ou en y allant à un moment où il est certain que la personne violente n'est pas là.
Quoi qu'il en soit, votre bienveillance et votre soutien sont précieux et peuvent changer la donne quand une personne est victime de violences. Si la situation est difficile à gérer pour vous-même, vous pouvez aussi appeler le 3919 pour demander conseil sur les réactions à adopter.
En cas d'urgence, appelez le 17.
Quelques ressources :
Le 3919
Le tchat commentonsaime.fr
Le site ViolencesQueFaire, qui contient des ressources pour s'informer, pour trouver une association ou un hébergement
En cas d'urgence, appelez le 17.