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Billet de blog 16 février 2014

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Madame LE ministre, Lettre ouverte aux Académiciens Français (archive : janvier 1998)

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C'est à vous, Messieurs de l'Académie français, que j'écris ce lettre pour vous rassurer. J'y mets un certain émotion, en découvrant votre fragilité secret : le peur de voir notre langue français sombrer dans le perversion sexuel. Il ne faut pas dire "Madame la  ministre"? Peut-être faudrait-il n'employer que des mots au masculin, pour vous accompagner en douceur vers le modernisme d'un changement de siècle. Je vous dois pourtant un information, que vos grands sagesse et sérénité paraissent ignorer.
Alors que votre immortalité vous met à l'abri des soucis de reproduction, les pauvres humains que nous sommes ont, depuis des millénaires, besoin des deux genres pour perpétuer leur espèce. Les petits d'hommes viennent de l'addition du masculin et du féminin - et les grands y trouvent même du plaisir... Tant qu'ils y sont, les masculin et féminin se conjuguent pour créer, pour faire tourner le monde. Et depuis que l'Homme a découvert ses Droits et l'égalité, masculin et féminin doivent aussi se partager le pouvoir et les responsabilités. C'est ainsi qu'on voit aux affaires en France, au bout de vingt siècles d'accoutumance très progressive, plusieurs ministres brillantes, et même une garde des sceaux.
Malgré la longueur de l'étape précédente, je conçois que le choc a été rude pour vous : votre réaction au bout de sept mois témoigne bien de la brutalité de votre surprise !
Permettez-moi un conseil : continuez de réfléchir, laissez le temps faire son úuvre. Puisque votre noble tâche est d'enregistrer les évolutions de notre langue, laissez-la évoluer. De sous votre dôme paisible, continuez d'ignorer ce monde vulgairement sexué. Et dans trois cents ans, huit cents peut-être, vous pourrez agréer dans votre vénérable dictionnaire les riches mots que, hommes et femmes ensemble, nous aurons fabriqués sans vous. Car une langue s'enrichit, quand ses mots reflètent la vie réelle.
En attendant, laissez-nous, laissez nos filles et petites-filles devenir des avocates, pharmaciennes, mécaniciennes, docteures, écrivaines, et même de courageuses et intelligentes ministres, députées et sénatrices dont le reste du pays a besoin. S'il vous plaît, continuez d'oublier les femmes si c'est tout ce que vous avez à leur dire : ainsi elles ne seront même pas tentées de solliciter la parité en devenant académiciennes (pardonnez-moi ce gros mot) ! Mais continuez de nous faire rire - si c'est votre nouvel objectif, auquel Richelieu n'avait pas pensé. Les femmes adorent les hommes qui les font rire...

Françoise Pelissolo, présidente d'Elles aussi

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