Au nom des enfants, les Oubliés de la République,
Nous sommes des mères, victimes de violences conjugales, reconnues par la justice pour certaines. Nos enfants, témoins des violences psychologiques, physiques et économiques, sont aussi des victimes à part entière.
« Un conjoint violent n’est pas un bon père » ! Si nous saluons ces propos d’Edouard Philippe dès l’ouverture du Grenelle, réaffirmés par Marlène Schiappa, nous demeurons très inquiètes des suites qui sont véritablement réservées à nos enfants.
Bien que nous ayons réussi à quitter nos compagnons violents pour nous protéger avec nos enfants, notre cauchemar n’a pourtant jamais cessé. Quand nous avons dénoncé les violences conjugales, la présomption de mensonge a alors pesé sur nous, et quand nous avons essayé de protéger nos enfants, nous n’avons pas été entendues.
Nos vies sont autant d’impasses, toutes désastreuses. Nous sommes contraintes soit de respecter les droits de garde de pères dangereux, soit de voir nos enfants placés dans des foyers exposés aussi à la violence, ou encore de voir la garde transférée au père violent, car nous sommes presque toujours considérées de manière infondée, responsables d’alimenter le conflit parental et de mettre en danger nos enfants. Comment croire que nous n’aurions pas préféré que nos enfants aient des pères bienveillants.
La réalité est encore plus monstrueuse : 60% de ces pères violents sont également violents avec leurs enfants.
Mais quand nous signalons les maltraitances et les violences sexuelles de ces pères sur nos enfants, nous devenons aussitôt suspectes, accusées d’instrumentaliser la parole de nos enfants. Nos plaintes et les signalements de professionnels sont quasi systématiquement classés sans suite. Et cela même lorsque le corps médical a constaté des lésions génitales, des marques de coups ou lorsque les dessins et les témoignages de nos enfants ne laissent aucun doute, ni leurs révélations à des tiers... Nous vivons une double peine. Nos enfants alors qu'ils ont eu le courage de briser le silence et de réclamer leur défense sont condamnés à leur tour. Lorsque nous refusons de présenter nos enfants pour les protéger, nous risquons la prison (certaines d’entre nous ont été en garde à vue et condamnées), nous risquons le désenfantement (on nous enlève nos enfants et eux sont privés de leur parent protecteur). En contrepartie celui qui a été clairement désigné comme étant leur tortionnaire, lui, jouit d’une impunité scandaleuse. Mettez-vous deux secondes à la place de l’horreur que peuvent vivre les enfants dans de telles situations ?
Nous avons peur pour nos enfants et oui, nous craignons maintenant la justice. Nos enfants ne sont pas protégés et nos agresseurs instrumentalisent leurs droits parentaux pour maintenir leur accès à leurs proies.
Combien de temps encore les enfants victimes de violences doivent-ils continuer à subir ce despotisme, à souffrir en silence ?
Nous reprenons le discours de Monsieur Adrien TAQUET du 9 avril 2019 dans l'hémicycle : "Vous connaissez l’étymologie du mot enfant, du latin Infantem : infans, celui qui ne parle pas et, trop souvent, par voie de conséquence, que l’on n’écoute pas. " En l'occurrence parmi les violences infligées à de trop nombreux enfants, l'inceste, qui, est “un crime parfait. Un crime sans cadavre. Un crime qui tue l'enfant en le laissant vivant ”. 1% de condamnation, 4 millions de victimes d’inceste (*Source AIVI/Harris Interactive). Mais quasiment aucun pédocriminel en prison, où sont-ils donc?
Pourquoi le principe de précaution n’est-il jamais appliqué ? Pourquoi préfère-t-on protéger l'agresseur plutôt que l'enfant ? Pourquoi n’y a-t-il rien de sérieux mis en œuvre malgré les nombreuses alertes de ces dernières années des victimes et des professionnels du domaine pour protéger ces enfants victimes ? Comment comprendre que parce que nous avons choisi de protéger nos enfants nous avons été punies et nos enfants ont été remis à leur bourreau ? Qui d’autre que nous sinon ? Et c'est un pas de plus en enfer pour eux, pour nous. Pourquoi malgré des lois qui prônent l’intérêt de l’enfant celui-ci n’est pas appliqué et évince t-on ainsi à tort le parent protecteur ?
A l’heure où le Grenelle s’est achevé, nous estimons que nos enfants sont les grands Oubliés. Nous demandons le droit à être libérées de l’emprise violente de nos ex conjoints, hommes reconnus violents et, menaçants. Nous voulons voir des textes de lois protecteurs véritablement appliqués et être assurées des suspensions immédiates d’autorité parentale et des droits de visite de ces pères violents. Nous exigeons l’application de la Convention d'Istanbul qui prône l’intérêt supérieur de l’enfant. Sera-t-elle demain correctement appliquée ? Dans toutes nos affaires en cours de jugement -des procès ont déjà été jugés-, quel devenir pour nous et nos enfants ? Permettons à ces lois d’être rétroactives de manières à protéger toutes les mères et leurs enfants victimes.
Les 9, 10, et 11 décembre s’est tenu un procès emblématique des violences conjugales devant la cour d’assises du TGI de Nanterre. Celui de Laura Rapp : son ex-conjoint a été condamné à 8 ans de prison ferme pour tentative d’homicide par strangulation sous les yeux de sa fille de 2,5 ans. Mais pas la déchéance de l’autorité parentale du père alors que la petite fille a assisté à la tentative de meurtre.
Traumatisés à vie, nos enfants victimes de violences prennent perpétuité.
Notre Président de la République a déclaré lors du Grenelle contre les Violences Conjugales que “La République française se doit de protéger toutes celles dont la vie est aujourd’hui en danger”. C’est leur voix que nous souhaitons aujourd’hui porter à travers cette tribune. Nous demandons que la République française protège nos enfants, qu’Elle les entende, les écoute. Que toutes les Institutions prennent en considération nos enfants avec leurs sentiments, et qu’elles cessent d’ignorer leurs violences, qu’ils soient enfin crus. Que l’intolérable ne soit plus caché. Que Justice soit rendue.
Sauver les enfants, c’est sauver l’humanité.
Fanny THIEL, Hanan F., Laura RAPP, Pegah HOSSEINI, accompagnées de mères restées dans l’ombre.
#SauvonsNosEnfants
Le 11 décembre 2019
*actualisée le 18/12/2019
Nous remercions chaleureusement tous les co-signataires qui nous accompagnent pour réclamer une protection digne des enfants :
Laurence Rossignol - Présidente de l’Assemblée des Femmes, Sénatrice, Ancienne Ministre
Lyes Louffok - Ancien enfant placé, Membre du Conseil National de la Protection de l’Enfance
Hélène Bidard - Adjointe à la Maire de Paris chargée de l’égalité femmes-hommes, de la lutte contre les discriminations et des droits humains
Maud Petit - Députée du Val-de-Marne
Nora Djellab - Conseillère municipale Ville de Colombes
Patrice Leclerc - Maire de Gennevilliers
Zohra Bitan - Militante, chroniqueuse, femme politique
Maxime Montaut - Président de l’association loi 1901 WANTED PEDO, et ses membres
FEMEN
Sophia Antoine - Militante et activiste féministe
Muriel Salmona - Psychiatre psychotraumatologue présidente association Mémoire traumatique et Victimologie
Illel Kieser El Baz - Psychologue, coordinateur des missions du CAVACS
Monique Chevrelot - Psychiatre retraitée
Ana Gonzalez - Psychologue stagiaire Master 2 Toulouse
Florence Latapie - Psychopraticienne
REPPEA - Réseau de professionnels pour la protection de l’enfance et l’adolescence (Eugénie Izard-Pédopsychiatre, Maurice Berger-Pédopsychiatre, Hélène Romano-Psychologue…)
Dr Catherine Bonnet - Pédopsychiatre
Isabelle TITTI DINGONG - Médecin pédiatre
Gilles Lazimi - Médecin
Régine Pierotti Benveniste - Médecin psychiatre
Catherine Gueguen - Pédiatre
Homeyra Sellier - Présidente INNOCENCE EN DANGER
Alexis Danan de Bretagne / Laurence Brunet - Association de Protection de l’enfance
Le Monde à travers un regard / Aude Fievet - Association de lutte contre les violences sexuelles sur mineurs
Mie Kohiyama - Présidente de MoiAussiAmnesie
Céline Quelen - Présidente de StopVeo, Enfance sans Violences
Association EPAPI France Les Masques Blancs
Mouvement Les Altruistes
Laurence Pétassou - Présidente du Mouvement politique Masques Blancs Droit Devant
Haidi Kacem - Responsable protection de l’enfance
Sonia Boué - Maman désenfantée, psychotraumatologue et présidente de l’association de femmes victimes de VFF, de soutien pour nous toutes et nos enfants
Marie Denis - Cofondatrice de l'Observatoire féministe des violences faites aux femmes en Belgique, psychologue
François Devaux - Président de la Parole Liberée
Clémence Raguet - Victime et fondatrice de l’association Putain de Guerrières et Put’AIN de Guerrières 01
Thierry Brulavoine - Promoteur de santé, chroniqueur
Christophe OLIVIER - Professionnel de la protection de l’enfance-Consultant
Bérangère Grisoni - Cadre médico-social
Amanda Handtschoewercker - Assistante sociale en protection de l enfance
Réseau International des Mères en Lutte
Gwénola SUEUR - Masterante, Formatrice violences
Pierre-Guillaume PRIGENT - Sociologue
Mélanie Jaunet - Responsable des antennes CIVIFF
Stephanie Lamy - Militante féministe, co-fondatrice du collectif Abandon de Famille
Maryse Martin - Militante contre les VEO et la pédocriminalité
Yasmina Bedar - militante protection des enfants et féministe
Laureen Genthon - Conseillère départementale 92, militante féministe Nous Toutes
Laura Gréaume - Travailleuse sociale, militante féministe
Guillaume Mélanie - Auteur, metteur en scène, co-président Urgence homophobie
Françoise Courtiade - Militante
Collectif Midi-Pyrénées pour le Droit des Femmes
Eva Darlan - Comédienne, écrivaine et militante
Patric JEAN - Auteur, réalisateur, conférencier
Mélissa Theuriau - Journaliste et productrice de documentaire
Florie Martin - Réalisatrice
Sand Van Roy - Actrice et militante
Nicolas Van Beveren - Acteur
Edgar Sekloka - Auteur interprète
Typhaine D - artiste féministe
Niki Konstantinidou - Autrice et avocate inscrite aux Barreaux de Victoria (Australie) et d’Irlande du Nord
Djamel Saïbi - Auteur et metteur en scène de la pièce "Les Ecchymoses Invisibles"
Marie Laforêt - Autrice, photographe
Radouane Baroudi - Cameraman réalisateur
Blandine Lenoir - Réalisatrice
Laurence Beneux - Journaliste
Claudine Cordani - Ex-journaliste
Clawdia Prolongeau - Journaliste
Mathieu Blard - Journaliste
Mélanie Barbotin - Journaliste
Manon Bakour - Journaliste
Eva Benhamou - Journaliste
Alicia Fall - Journaliste
Ladane Bonnefoy - Journaliste
Les Répliques - Média en ligne
Akim Oural
Nathalie Tomasini - Avocate
Romain Bordage - Avocat au barreau de Luxembourg
Caroline Mecary - Avocate au barreau de Paris
Amine Elbahi - Avocat
Nabil Boudi - Avocat
Mahyar Monshipour - Ex-champion du monde de boxe
Jean-Claude Mbiye - Ex-champion d’Europe de boxe
Remy Sow - Coach
Serge Coupe - Restaurateur à Roubaix
Olivier Wes - Conseiller bancaire
Sophie B - Secrétaire
Gaëtan Lejeune - Expert en communication
Françoise Le Goff - Victime et militante pour la protection des enfants et leurs droits
Laurence Le Goff - Victime et militante pour la protection des enfants et leurs droits
Tadam Yen - Militante féministe
Hélène Gaillard - Militante pour les droits des enfants
Géraldine Franck - Militante égalitariste, fondatrice du collectif anti-crasse
Julie Denes - Ecrivaine
Aurore Le Goff - Ecrivaine et conférencière / victime
Tatiana Theron - Auteure
Christine Delphy - Féministe
Jade - Victime et militante, à l’initiative de #SauvonsNosEnfants
Mika Paoli - Victime
Virginie Faraldo - Victime
Melanie Thémis - Victime
Marie - Victime
Christel - Victime
Alexandra SCHUBNEL - Victime
Anonymous - Victime
Laure Giacomino - Victime
Cindy Pinson - Victime
Sabine Bloy - Victime
Stévina Behary - Victime
Anissa- Victime
Nadia Selatnia - Victime
Charlene Bonnetier - Victime
Wassila El Yousfi - Victime
Hanane - Victime
Denise Sonck - Victime
Valérie Dubois - Victime
Karla - Maman
Emma Rivière - Victime
Céline Durand - Victime
Céline Bajeux - Victime
Céline Oravec - Victime
Ilham Mouamin - Victime
Sophie B - Victime, maman désenfantée
Cécile Marcoux - Victime
Patrick Kleykens - Victime
Dalila Nouibat - Maman
Mandy Nini - Maman et victime
Megane - Maman victime
"Nous prenons la parole pour dénoncer notre enfer avec nos enfants : les violences sexuelles et les maltraitances sur nos enfants sont très mal
prises en compte en France. Les chiffres sur les violences sexuelles, Inceste et toutes les maltraitances en France sont édifiants. Notre Tribune alerte et réclame de prendre l’enfant victime en considération, avec ses paroles et ses sentiments : l’enfant est sacré. La parole des enfants n'est pas écoutée, ni entendue. Pire, ils sont complètement ignorés par les institutions.
Je témoigne dans l'article pour ouvrir la parole, dénoncer et permettre ainsi à la conscience collective de s'approprier mon témoignage, et d'avancer ensemble, afin d'évoluer. Brigitte Macron disait en juin "il faut parler, il faut les écouter". L'enfant a de nombreux droits, mais il ne dispose pas de moyens suffisants pour se protéger lui-même des violences à son encontre. C'est notre rôle. On doit exiger une justice. Exiger d'elle qu'elle soit à la hauteur. C'est toute la considération qu'il convient de lui porter. Parce que les lois sont là, mais elles ne sont pas appliquées : CIDE, Convention d'Istanbul, Convention De Lanzarote. De quelle guérison parler lorsque le petit corps a vu les violences, qu'il a été violenté, l'identité humiliée, l'interdit transgressé, ses droits et les lois bafoués ?"