Les manifestations hétéroclites mais très importantes des Gilets Jaunes ont soudainement donné une visibilité sur les misères du quotidien des...invisibles. Embrassant des préoccupations diverses mais trahissant une situation devenue intenable. Les manifestants les plus constants ont usé leurs semelles sur près de 600 km dans Paris en 70 « actes ». Autant dans les provinces, initiatrices du mouvement. 70 actes soutenus par 70 % de la population. Et ayant mis en avant quelques revendications de plus en plus resserrées sur les injustices les plus flagrantes et aboutissant aussi à des propositions.
Pas une seule fois le président ne les a nommés.
Mais en réaction et en quasi féodal il a réuni une poignée de serviteurs de l’État, les représentants locaux, les maires. Grand Débat 2 ? Avant que cela n’advienne, une rapide analyse de ce qui ressemble à des réflexes féodaux. Et qui peuvent ressurgir.
Il ne faut pas remonter plus loin que 2018 pour comprendre que le désastre économique mais aussi sanitaire était décrit. Les 300 000 Gilets jaunes de fin 2018 jusqu’au tout début de 2020 ont scandé des revendications qui évoquaient le prix de l’essence, certes, mais aussi les revenus de misère de certains, la situation des enseignants, des artistes et le démantèlement de certains hôpitaux et exigeaient la reconnaissance du travail des infirmières et des médecins. En « vrac » tout ce qui n’allait pas.
Le président a ostensiblement détourné le regard des manifestations. Et il a trouvé la parade pour ne pas être obligé de donner de l’importance à ce qui se passait dans la rue.
Il a réuni par trois fois des centaines de maires dans des rencontres marathon de 21 heures au total. Cela ressemblait furieusement à ce que les rois faisaient en convoquant les détenteurs de fiefs présents dans le royaume pour leur rappeler leur devoir à l’égard du souverain. Le souverain consultait moins qu’imposait ce qu’il considérait être utile pour le royaume.
Ces 21 heures du presque monologue du président ont rempli tous les écrans, faisant « écran » aux revendications qui annonçaient sans le savoir ce que 2020 allait mettre au jour. Tous les errements financiers et sanitaires dénoncés tout au long des 13 mois qui ont précédé le confinement.
Tout a été fait depuis des années pour réduire et encore réduire les dotations pour les grands services publics et le maintien d’une partie importante de la population dans le dénuement.
Retraités à l’abandon avec quelques centaines d’euros, enseignants sous-payés, soignants sans moyens.
Certes, ni les manifestants, ni le pouvoir exécutif ne pouvaient savoir qu’une épreuve virale et mortelle arrivait aux frontières.
Mais en quelque sorte cette catastrophe sanitaire est devenue l’examen de passage de deux ou trois présidences et en particulier de celle que nous vivons actuellement.
Alors « Grand débat 2 » ? Avec qui cette fois ? Tirons les leçons de ce qui s’est passé pour que l’après-virus soit accompagné plus que d’espoir.
Et bien sûr pour que cela advienne on ne peut que souhaiter que les scientifiques trouvent le vaccin et que parallèlement, avec un peu de chance, ce virus s’affaiblisse par lui-même ce qui est d’usage chez les virus.
L’Histoire et ses soubresauts ont montré de tous temps que l’injustice économique sert parfois déclencheur pour imaginer de nouvelles manières de vivre, il suffit d’une étincelle. Dans ce cas l’ « étincelle » a la taille du centième d’un micron.
Jean-Paul RÉTI
Fondateur et pt depuis 1992 de l’association APLD 91 pour la mixité sociale à Paris
Juré en architecture
Sculpteur