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Billet de blog 18 février 2022

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L’affectation des élèves au lycée à Paris - un enjeu national ?

L’affectation en Seconde à Paris soulève débats, inquiétudes et passions pour de nombreux parents, élèves, et personnels de l'Éducation nationale. Pour la FCPE Paris, une refonte du système d’affectation doit promouvoir la mixité scolaire tout en maintenant la mixité sociale et mettre fin aux lycées de niveau.

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Chaque année, l’affectation en Seconde à Paris soulève débats, inquiétudes et passions pour de nombreux parents, élèves, et personnels de l'Éducation nationale. Depuis la fin de la sectorisation en 2008, et jusqu’en 2021, les élèves pouvaient émettre dix vœux selon une répartition en quatre districts. La mixité sociale des lycées à Paris s’était ainsi accrue, permettant aux élèves d’un même district de postuler aux mêmes lycées quel que soit leur arrondissement d’origine. La priorité en termes d’affectation était donnée aux élèves ayant les meilleurs résultats scolaires, institutionnalisant la concurrence entre lycées. Certains lycées dits “très attractifs” n’étaient accessibles qu’à des jeunes avec d’excellentes notes, d’autres, moins demandés, concentraient des élèves de niveau scolaire plus faible. Depuis des années, la FCPE Paris demandait une refonte du système d’affectation, pour promouvoir la mixité scolaire tout en maintenant la mixité sociale et mettre fin aux lycées de niveau.

Sachant la place de certains lycées parisiens dans la formation des classes dirigeantes françaises, la question du maintien de lycées “d’excellence”, revêt un caractère national. Elle concerne également les collèges périphériques ou ruraux, où les élèves ont un accès difficile aux “lycées réputés” des centres-villes. Elle concerne enfin nombre de lycées privés qui, bien que très largement subventionnés par l’État, participent peu à la scolarisation d’enfants de milieux sociaux défavorisés ou aux résultats scolaires fragiles.

Former les élèves dans l’entre-soi ne permet pas de les confronter à la diversité d’origine et de parcours qui constitue la richesse de notre pays. Quelles que soient les formations prestigieuses et les concours exigeants réussis, les jeunes de ces lycées n’acquièrent pour la plupart qu’une vision partielle de la société française. Pour de nombreux élèves, l’école représente davantage un lieu de ségrégation et de sélection qu’un creuset de la République.

La réforme du système d’affectation mise en place par le Rectorat de Paris en 2021 apporte plusieurs évolutions. Afin de diversifier les niveaux scolaires des élèves, chaque collège se voit attribuer 5 lycées différents en termes “d’attractivité”. Les élèves des collèges concentrant des jeunes de familles à l'Indice de Position Sociale inférieur à la moyenne parisienne et nationale bénéficient désormais d’un bonus spécifique. Un dispositif pour réserver un accès à un “taux cible” de boursiers, défini par établissement, complète la réforme.

Quel bilan tirer de cette réforme d’Affelnet ? Le nombre d’élèves non affectés en Seconde a largement chuté entre 2020 et 2021, passant de plus de 800 à environ 400 au 1er tour, de plus de 600 à environ 100 à l’issue du 2nd tour. Une fraction plus importante d’élèves, environ 84%, a été affectée dans l’un des trois premiers lycées de leur liste de vœux, satisfaisant plus de familles.  Mais, en 2021 encore, les chiffres de non affectation restaient trop élevés. En accompagnant des familles, la FCPE Paris a constaté les difficultés d’affectation rencontrées par des élèves de collèges sans bonus spécifique, certains lycées du secteur prioritaire d’affectation leur devenant inaccessibles, et a demandé la résolution de ce problème pour la version 2022.

La FCPE Paris a noté que certaines familles n’envisagent pas que leur enfant aille dans un lycée jugé “moins attractif”. La réforme du système d’affectation est remise en cause par certains, jugée à l’aune des intérêts personnels plutôt que de l’intérêt général. Il est extrêmement violent pour des familles de collèges dits ‘défavorisés’ d’entendre dire que leur enfant n’a pas sa place dans des lycées “d’élite”, et prendrait celle “naturelle” d’élèves issus de quartiers plus cossus.

L’annonce de ces modifications du recrutement des élèves dans les lycées Henri IV et Louis le Grand, visant à rendre ce recrutement plus transparent et plus diversifié, s’est heurtée à l’opposition d’un certain nombre de défenseurs de la ‘méritocratie’, faisant fi des liens entre déterminants sociaux et réussite scolaire, particulièrement forts en France. Toutefois, rappelons que la ségrégation scolaire restera le socle du recrutement de ces deux établissements, qui continueront à sélectionner les élèves sur leurs notes par le biais d’Affelnet.

Comme l’illustrent les polémiques récentes, la question de l’affectation au lycée à Paris est passionnée et complexe ; elle met en exergue les inégalités, la ségrégation sociale et spatiale à l’école. La mixité sociale et scolaire est cruciale et bénéficie à toutes et tous. Les bons élèves se confrontent à des élèves au niveau scolaire plus faible, et les élèves fragiles sont portés par les bons élèves. Il s'agit là d’un réel apprentissage du vivre ensemble pour notre jeunesse.

Aujourd’hui, la pression scolaire sur les enfants s’accroît avec la compétition pour l’accès aux études supérieures. L’objectif de mixité sociale et scolaire de la réforme d’affectation en Seconde est difficile : le nom du lycée reste un sésame pour suivre certaines filières. L’anonymisation complète des lycées dans Parcoursup permettrait de placer tous les bacheliers au même niveau.

Pour que cette réforme atteigne ses objectifs, les moyens dévolus aux lycées publics doivent être à la hauteur des besoins : tous les élèves doivent être accueillis dans des formations réellement choisies, avec des effectifs de classe raisonnables et des conditions d’apprentissage favorables ! Or, pour la rentrée 2022, la réduction de la dotation horaire globale a une nouvelle fois diminué les moyens disponibles et la diversité des formations, plaçant les parents dans la crainte légitime de lycées à plusieurs vitesses.

Tout élève entrant en classe de Seconde doit pouvoir être affecté dans un lycée de son secteur, avec un choix réel et la garantie d’une continuité pédagogique. Ce n’est qu’à ces conditions que « l’École de la confiance » prônée par le Ministre de l’Éducation nationale fera sens pour les élèves et leurs parents.

Ghislaine Morvan-Dubois
Présidente de la FCPE Paris

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