Festival Résistances (avatar)

Festival Résistances

Festival de films et de débats Résistances

Abonné·e de Mediapart

68 Billets

0 Édition

Billet de blog 1 juillet 2025

Festival Résistances (avatar)

Festival Résistances

Festival de films et de débats Résistances

Abonné·e de Mediapart

Danser des siècles de galère coloniale

Restauré en 2019, « West Indies, ou les nègres marrons de la liberté », réalisé par Med Hondo en 1979, est un film culte, satirique et décolonial. A découvrir au Festival Résistances.

Festival Résistances (avatar)

Festival Résistances

Festival de films et de débats Résistances

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Dans un long premier plan d’une fluidité à la théâtralité assumée, nous traversons ce qui semble être une usine désaffectée, pour rejoindre un grand bateau de bois somptueux, échoué là comme un mirage de cinéma. Il constitue un grand théâtre politique, étagé, avec son balcon officiel et son salon privé. C’est dans ce dernier que se déroule une sorte de guignol, rassemblant dans l’exécution d’un même « plan » l’homme politique blanc, sa marionnette noire, le patron, le prêtre, et l’assistante sociale. Ce « plan » va se traduire visuellement par la volonté de ce groupe de personnages blancs, singuliers et caricaturés, de maintenir une foule anonyme de corps noirs dans la cale du bateau.

Med Hondo, cinéaste panafricain, réalise en 1979 avec West Indies un « music-hall-tragi-comique ». Tissant plusieurs époques de l’histoire des Caraïbes, de la colonisation au Bumidom (Bureau pour le développement des migrations intéressant les départements d’outre-mer, crée en 1963), il provoque des rencontres visuelles saisissantes. Un groupe de danseurs demi-nus joue avec des chaines, et nous pourrions être dans Hair, sorti la même année ; mais il s’agit de danseurs noirs, et c’est tout un imaginaire esclavagiste qui se trouve convoqué. Le film va ainsi, au gré de scènes plus inventives les unes que les autres, pour certaines chantées et dansées, constituer la fresque d’une sorte de légende caribéenne. 

West Indies met également en scène la désacralisation comique des modèles possibles du Noir validés par l’homme blanc : la cantatrice, le poète de la négritude ou le boxeur. La forme elle-même de la comédie musicale est questionnée, comme fabriquant des rêves, moteurs d’une émigration des travailleurs antillais désirée par l’Hexagone. Traite négrière ou Bumidom, c’est toujours un peuple qui est arraché à sa terre et colonisé dans son imaginaire. Pour se retrouver dans un Paris rêvé où fusent les ragots du racisme ordinaire. Avec ce film, qu’il a eu de grandes difficultés à produire et plus encore à diffuser, Med Hondo souhaitait « convoquer tous les peuples dont le passé est fait d’oppression, dont le présent est fait de promesses avortées et dont le futur reste à conquérir. »

West Indies ou les nègres marrons de la liberté, de Med Hondo, sera projeté mercredi 9 juillet à 21h en grande salle dans le cadre de la thématique « Outre-mer » : colonies d’aujourd’hui ». 

Illustration 1
Numéro de charme sur le pont du navire France © Med Hondo

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

L’auteur n’a pas autorisé les commentaires sur ce billet