Film résolument destiné à la jeunesse et assumé comme tel, l'œuvre d'Edmunds Janson n'en reste pas moins porteuse d'un discours écologique et social fort et profond qui pourrait attirer l'attention d'un public bien plus diversifié sur le plan générationnel qu'il n'y paraît de prime abord. Simple et efficace dans son message, le film est tissé comme une fable écologique aux relents d'apologue et teinté d'éléments fantastiques comme les fameux chiens doués de parole, aux airs de bande organisée du quartier, que Jacob est amené à rencontrer ; ou encore les supposés pouvoirs de Jacob qui lui permettraient de faire prendre vie à tout ce qu'il dessine, comme une métaphore du travail pictural réalisé pour donner naissance au film. Toutes sortes de petits éléments qui surprennent et rendent plus digeste le message de fond qui se veut critique de l'urbanisation sans limite et d'un système capitaliste qui détruit la nature et la vie. Autour de ces éléments, une intrigue teintée de mystères se construit en filigrane des doutes que sème Edmund Janson au cours du film, Jacob possède-t-il réellement des pouvoirs ? Rien n'est moins sûr, il faudra aller jusqu'au bout d'un récit parsemé d'étrangetés pour obtenir le fin mot de l'histoire. Outre les enjeux écologiques contemporains, les relations intrafamiliales sont également abordées.
Que ce soit la relation entre père et fils de Jacob avec son père architecte ou entre cousins avec Jacob et Mimi, la question de la famille est abordée dans toute sa complexité, auss bien sous l'angle des rapports à l'autorité qu'à la complicité, ou encore en abordant les écarts de niveau de vie d'une branche de la famille à l'autre, rappelant que même la famille n'efface pas les classes sociales. L'intrigue en apparence classique prend des tournants policiers, on se demande qui est derrière le dévastateur projet immobilier qui menace Masckachka, qui sont les complices, tout le monde semble coupable, on ne sait plus qui croire à qui faire confiance, y-a-t-il des traîtres au sein même de la famille ? Tout s'enchaîne sur un suspens qui va crescendo jusqu'à la révélation finale. La courte durée du film rend le rythme encore plus haletant.
A partir de ce récit simple et accessible, les thématiques et les messages de fond pourront toucher un public adulte, jusqu'à voir des parallèles avec les mouvements sociaux actuels autour de la réforme des retraites ; en revanche, le récit pourra peut-être sembler un peu classique aux spectateurs les plus âgé.es du fait de certaines ficelles parfois quelque peu attendues. Le film n'en reste pas moins simple et efficace, au service de son message, certains retournements finaux pourraient même surprendre le spectateur le plus expérimenté. Le choix d'une animation traditionnelle en deux dimensions concorde avec cette volonté de simplicité et d'efficacité, l'aspect très artisanal des dessins génère une ambiance chaleureuse et bienveillante qui donnerait presque envie d'aller visiter cette fameuse ville de Mashkachaka.
Plutôt que la recherche d'une animation parfaite, c'est d'abord et avant tout certaines émotions particulières que la technique employée suscite chez le spectateur, autant la nostalgie de l'enfance que la curiosité pour cet univers bien moins enfantin qu'il n'y paraît.
Jacob et les chiens qui parlent sera projeté dans le cadre du comité Jeune Public vendredi 14 juillet à 10h00.
Sophie CALDARA