Vrej a 11 ans. Il rêve de devenir dentiste. Il grandit au Artsakh, que nous connaissons sous le nom de Haut-Karabagh.
Après la première guerre mondiale, cette région, alors peuplée majoritairement d’Arméniens, est rattachée par Staline à l’Azerbaïdjan, tout en demeurant un Oblast, une région relativement autonome. Au début des années 1990, l’effondrement de l’URSS déstabilise toute la région. Le Haut-Karabagh revendique son indépendance, qui n’est pas reconnue par la communauté internationale. Débute en 1992 un cycle de guerres avec l’Azerbaïdjan qui se poursuit jusqu’à aujourd’hui.
La réalisatrice Sareen Hairabedian, elle-même d’origine arménienne, suit Vrej dans son quotidien, à l’école, chez sa grand-mère, en ballade dans la campagne… Il habite en effet un petit village de 150 habitants. Vrej est un garçon ordinaire, vif, qui aime les animaux et traîne en rentrant de l’école. Pourtant, il le dit très vite : « on vit dans un pays où la guerre peut éclater à tout moment ». Cette perspective infuse tout son quotidien d’enfant.
L’exode qu’a déjà connu la grand-mère pourrait redevenir l’expérience de ses petits-enfants. La guerre n’est pas un évènement médiatique, explosif et vite oublié, mais un vécu qui se transmet. Le passé et le futur semblent enfermés dans une boucle entretenue par la famille, mais aussi toute la société, et notamment l’école. « Vrej » signifie d’ailleurs « vengeance » en arménien.
Sareen Hairabedian est aussi de nationalité jordanienne. Son film aurait dû représenter ce pays à l’oscar du meilleur film étranger, mais il a été retiré de la compétition du fait de la pression de l’Azerbaïdjan. Selon Julie Paratian, coproductrice française du film, « le film ne défend pas une thèse géopolitique, mais le fait d’avoir été tourné sur le territoire du Haut-Karabakh suffit à ce que l’Azerbaïdjan veuille empêcher cette oeuvre d’exister. »
Un garçon, une terre, la guerre sera projeté en ouverture du Festival Résistances. Nous aurions pu présenter un documentaire sur l’Ukraine, la Palestine ou le Soudan. La guerre est une actualité omniprésente que nous ne pouvions pas ignorer - mais comment en parler? My sweet land (selon son titre original) nous a touché par sa douceur et sa gravité. Il nous invite à nous demander comment grandit-on avec la guerre, et petit à petit, quand on est un garçon comme Vrej, pour la guerre.
Un garçon, une terre, la guerre, de Sareen Hairabedian, documentaire, 1h26
Titre original, : My sweet land
Projeté en grande salle en soirée d’ouverture vendredi 4 juillet à 21h.

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