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Billet de blog 12 décembre 2025

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“Sans altérité, il ne peut pas y avoir de relation”

Entretien avec la philosophe Christine Leroy

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Illustration 1
Christine Leroy ©Yannick Michaud.

Christine Leroy est philosophe, Docteure associée à l’École des Arts de la Sorbonne (Université Paris I) et à l’Université de Lille (laboratoire STL). Son livre Phénoménologie de la danse. De la chair à l’éthique, nourri par sa pratique de la danse, tisse une réflexion sur l’ancrage charnel de l’éthique et du souci d’autrui : sans corps, pas de care.

Fin de vie, handicap, place de la maternité dans le féminisme: dans cet entretien pour The Fifth Wave Institute, Christine Leroy interroge notre capacité à prêter attention à l’altérité.


Ton mémoire de maîtrise de philosophie portait sur l’histoire de l’euthanasie et sur ses enjeux éthiques pour les sociétés d’aujourd’hui. Qu’est-ce que l’éthique du care apporte au débat sur la fin de vie?

La perspective du care pointe du doigt un écart problématique : celui entre l’investissement étatique dans l’aide à mourir et le désinvestissement étatique dans le soin à la personne pour l’aider à vivre mieux. Elle s’appuie sur trois points de vue en particulier : celui des personnes handicapées, celui des soignants et celui des personnes en fin de vie elles-mêmes.

S’appuyant sur les combats de militantes antivalidistes1, la sociologue Patricia Paperman – actrice majeure de la diffusion de l’éthique du care en France2 – souligne que les personnes porteuses de handicap sont régulièrement incitées à se suicider, par de petits commentaires semi-admiratifs, semi-sournois : “Tu es bien courageuse ; à ta place, je ne serais pas capable de vivre”.

Il faut effectivement bien du courage aux personnes handicapées pour faire valoir leur droit à exister, et la valeur de vies normées différemment. Les vies porteuses de handicap sont coûteuses pour la société ; le désengagement de l’État dissuade de plus en plus le recours aux aides médicalisées, et peut donc inciter sournoisement à préférer la mort à une vie dans des conditions déplorables.

Le choix du suicide assisté n’est donc pas toujours libre, contrairement à ce que l’on pourrait espérer en théorie : l’ultralibéralisme discrédite la valeur de la vie humaine non-valide, ce qui met une pression extrême sur les personnes désignées comme ‘inutilement coûteuses’.

D’où les alertes de militant·e·s de gauche radicale, tel·le·s No Anger – artiste queer, anarchiste et antivalidiste – ou Elisa Rojas. Cette avocate et militante polyhandicapée voit dans les projets de loi légalisant l’euthanasie une trahison de la gauche à l’égard des personnes porteuses de handicap et invisibilisées.

Loin d’être traditionaliste et réactionnaire, cette militante est avant tout éminemment concernée et engagée politiquement pour la reconnaissance du droit à la vulnérabilité. À ses yeux, la légalisation de l’euthanasie est une abdication des théoricien·ne·s humanistes face aux pressions du libéralisme économique.

Elisa Rojas: ‘Notre mort est toujours considérée comme libératrice par cette société

Les soignantes et soignants, de leur côté, ont parfois envie – ne serait-ce que l’instant d’une pensée vite refoulée – de faire taire à jamais ces corps pesants, pénibles et parfois grincheux. Et ce, d’autant plus que les conditions de travail en milieu hospitalier sont épuisantes. Contrairement aux lois sur l’avortement, qui ne l’autorisent que dans des conditions restreintes et particulièrement normées, la législation en cours sur l’euthanasie autorise sans réellement interdire.

C’est donc extrêmement anxiogène pour les soignant·e·s que de leur confier la responsabilité de décider de la mort d’une personne, tout en mettant relativement peu de moyens dans les soins palliatifs3. On ne peut pas mettre l’accent sur une éthique du care sans tenir compte des souffrances qu’une décision législative peut occasionner pour celles et ceux qui prennent soin – et qui sont souvent, en France en tout cas, des personnes déjà précaires.

Du côté des personnes en fin de vie, enfin, le fossé entre théorie et pratique revient encore une fois en boomerang sur le réel. Ma grand-mère est en EHPAD. Chaque jour, elle dit vouloir mourir. Mais lorsque les infirmières se trompent dans le dosage des médicaments, elle s’exclame, furieuse : “Elles veulent me tuer !”

Veut-elle donc vraiment mourir ? Il me semble qu’elle aimerait plutôt vivre mieux, se sentant condamnée dans le couloir de la mort, faute d’avoir le sentiment de vivre ou de compter pour quiconque. Elle veut du lien social, des relations, de la vie autour d’elle. Elle aimerait vivre, pleinement.

En philosophe qui s’intéresse de près au care, et ce d’un point de vue ancré dans des traditions humanistes “de gauche”, je vois donc dans la légalisation de l’euthanasie, sous sa forme actuelle, un danger. Mais j’ai vécu par le passé une expérience très douloureuse auprès d’une grand-tante qui, victime d’un AVC et incapable de mouvoir plus que sa paupière gauche, a fini par arracher elle-même sa sonde gastrique. Elle s’est donné la mort, en quelque sorte. Donc rien ne va de soi ni n’est définitif en matière de fin de vie.

Il me semble que l’on ne prête pas assez attention à l’acharnement thérapeutique, le seul véritable problème. La loi Leonetti de 2005 autorise déjà la suspension de soins en cas de risque d’acharnement : il me semblerait plus fécond aujourd’hui de réfléchir à ce que ‘s’acharner’ veut dire, à une époque où la médecine est capable de prolonger la vie au-delà du souhaitable.

Les débats sur l’euthanasie rappellent que la mort est au cœur de nos vies, malgré les efforts du libéralisme pour en faire diversion. Ils interrogent le sens que nous souhaitons donner à la solidarité sociale, et invitent à regarder le social par l’entremise d’une éthique critique – une éthique du care.

Appliquée à la fin de vie, cette éthique invite plutôt à l’humilité qu’à la certitude. Je ne crois pas qu’il faille obliger les individus à vivre, mais je crois qu’il faut savoir écouter leur douleur, plutôt que de fermer les yeux en intimant à ceux qui souffrent de se taire à jamais.

Ton ouvrage Phénoménologie de la danse avance l’existence d’une relation particulière de care dans l’expérience de la danse. D’où vient cette idée?

Ma propre pratique de la danse n’a jamais été une pratique de soin. J’ai une formation de danseuse classique, qui génère un rapport souvent complexe au corps. Le corps, ce n’est pas quelque chose qu’on manie comme on manierait un stylo : parfois, il fait ce qu’il veut, et à défaut de voir sur le miroir ce que l’on souhaite dégager, on entre en conflit avec lui.

Et pourtant, paradoxalement, même si l’on se torture un peu pour obtenir un joli cou de pied, même s’il arrive que l’on ait les pieds en sang à force de frottements dans les pointes, on prend aussi grand soin de notre corps pour qu’il rende le mouvement que l’on attend de lui.

J’ai dû suspendre ma pratique à cause de fractures à répétition – parfois, le corps finit aussi par casser – et ai dû me contenter, pendant un temps, de simplement regarder la danse. J’en éprouvais quelque chose de supérieur au plaisir, comme un pansement de l’âme.

J’étais en particulier touchée par les élans, l’envol, la sensualité de la grâce… Ce sur quoi j’essayais de mettre des mots n’était ni purement intellectuel, ni seulement esthétique, mais d’ordre éthique : voir de la danse me faisait du bien, indépendamment de la beauté de l’écriture du geste. Il m’a semblé qu’entre ce que je voyais et ce que je vivais se jouait une forme de care, une “portance”4.

Dans le livre, tu écris: “L’éthique consiste à restituer à l’individu sa dignité humaine ; (...) un tel soin-care est vecteur de cure au sens thérapeutique, [il] en est le socle : pas de guérison sans réappropriation du corps propre par le patient ; guérir, c’est justement passer du stade du patient, qui étymologiquement souffre d’être passif, à celui d’agent autonome.”

Dans un contexte comme celui du handicap où l’autonomie est différente de celle d’une personne valide, à quoi renvoie cette notion que prendre soin, c’est restituer à quelqu’un son autonomie ?

Je crois d’abord important de souligner que lorsqu’on est dans la théorie, on dit parfois des choses qui résistent assez mal à la réalité matérielle, pesante, pénible. Il y a parfois dans ce que j’écris plus d’espoir que de réalité.

En tout cas, dans des contextes d’autonomie réduite, comme le handicap mais aussi la petite enfance, on est souvent confronté à un dilemme : faut-il faire à la place de l’autre – dans l’optique du résultat, c’est évidemment plus efficace – ou accepter que l’autre soit plus lent, moins précis, et l’aider à agir ?

Pour étayer le concept de “portance”, le philosophe Emmanuel de Saint Aubert5 emprunte à la théologie l’idée d’un Dieu ‘tout soutenant’ plutôt que ‘tout-puissant’ – omnitenens6 au lieu d’omnipotens. Les personnes qui éduquent ou sont pourvoyeuses de soin sont parfois trop au-dessus alors qu’il faudrait être en soutien.

Emmanuel de Saint Aubert s’appuie d’ailleurs sur l’ostéopathie : lorsqu’on tient un bébé par-dessous, le bébé redresse la tête. Plutôt que de lui tirer les cheveux, il suffit de le soutenir pour qu’il se redresse.

Dans ce dilemme se jouent les difficultés du soin à la personne : aider la personne, est-ce faire les choses à sa place, ou faire en sorte qu’elle fasse les choses elle-même? C’est la base de méthodes éducatives comme celle de Maria Montessori : si l’enfant a besoin d’aide, il en demandera. Il ne faut l’aider que s’il le demande, et ne surtout pas l’amputer de son envie d’essayer par lui-même.


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Pour les soignants, il est d’autant plus difficile d’accepter la lenteur d’une personne qui a un handicap qu’il faut aller vite. La médiocrité du geste dérange : lorsque la personne tremble, risque de tout renverser, le soignant estime préférable de verser lui-même l’eau dans son verre.

Ce n’est pas que la personne n’est pas autonome : c’est qu’on la prive de son désir d’autonomie. La laisser essayer nécessiterait du temps et des ressources dont on manque cruellement. Le soin, ou plutôt ce qu’il en reste dans un contexte d’hyper-rationalisation des coûts et des temps du travail, contribue donc malheureusement souvent plus à la perte d’autonomie qu’à son maintien.

Vers la fin du livre, tu écris : “Exister pour soi, se donner à soi-même une forme, ce n’est pas s’arracher radicalement à une totalité pour y faire face, mais y participer à sa façon ; contribuer à la communauté de façon éthique, ce n’est pas s’y fondre, mais plutôt y prendre une place propre et unique, non substituable.”

On retrouve dans cette citation le parallèle avec la danse, où l’on peut être à la fois membre d’un tout et s’en détacher d’une manière plus ou moins singulière. On lit souvent des discours binaires sur la tension entre individualisme et communauté, donc c’est riche de lire tes mots qui réconcilient les deux : on peut être ‘non substituable’ au sein même du groupe, se faire une place propre dans notre contribution au collectif.

C’est ce vers quoi tend mon travail aujourd’hui. J’essaie de montrer que l’opposition habituelle entre individualisme et communauté n’en est souvent pas une. On peut y voir en réalité deux formes d’individualisme : un individualisme autosuffisant et stérile, d’une part, et un individualisme fusionnel, où les identités et le caractère unique des individus se fondent dans une indistinction pathogène. Ce n’est donc pas une communauté mais un amalgame flou d’individus.

Pour dépasser cette opposition, je cherche à soutenir l’idée qu’on ne peut pas être unique sans les autres : l’altérité doit soutenir et non effacer les singularités. Comme le dit la philosophe Edith Stein, pour qu’il y ait empathie (Einfühlung), pour qu’il y ait une relation, il faut qu’il y ait conscience de séparation. Sans altérité, il ne peut pas y avoir de relation. De la même manière, pour qu’il y ait un groupe, il faut qu’il y ait des individus ; mais sans séparation entre les individus, il ne peut pas y avoir de véritable lien entre les sujets, donc de collectif.

Bien des discours contemporains un peu naïfs ignorent ce besoin humain de séparation. Porteurs de l’illusion d’un collectif plein d’amour, les réseaux sociaux effacent les limites entre les personnes, s’immiscent dans la sphère privée et floutent les frontières de l’intimité.

C’est extrêmement anxiogène, et cela fait naître un besoin criant de barrières, de frontières, qui va jusqu’à la xénophobie et la paranoïa autour d’”intrus” nuisant à l’identité. La seule frontière qui puisse remédier à l’anxiété sociale et nationaliste, c’est la séparation, la distance entre les individus, la réinstauration de l’espace et du temps pour la vie privée. Ce sont des conditions essentielles pour créer des ‘liens qui libèrent’7.

Cette dichotomie me semble reproduire la dichotomie entre une absence totale de souci de l’autre et un ‘pseudo-care’, un care étouffant, que Maurice Hamington appelle bad care : le “Je t’aide, je t’aide tellement que tu n’existes plus, il n’y a plus que moi”. Il faut un juste milieu : l’éthique du care, ce n’est pas ‘tout le monde s’entend bien et tout le monde est gentil’. C’est une éthique qui met l’accent sur la relation plutôt que sur des normes théoriques de bien et de mal, ou sur ce qu’il faut faire ou ne pas faire.

Mais pour qu’il y ait une relation, il faut une distance entre deux pôles distincts, séparés. Si l’on fait tout à la place de l’autre, on ne respecte pas cette distance, on résorbe la différence dans l’unité. Faute d’écoute, il n’y a alors pas de lien, pas de soin. Il faut respecter et valoriser la distance, la différence, l’altérité : c’est la condition sine qua non d’un ‘good care’, respectueux aussi de la personne qui prend soin.

Le care est à l’opposé du soignant qui fait taire le soigné, ou du soigné tyrannique du soignant : c’est un moment de rencontre. Reconnaître la radicale altérité entre les individus, cela seul permet le lien.

Dans un article de 2021 intitulé “Tuer la mère”, tu parles d’un “matricide symbolique dans la quête féministe”. À quoi cela fait-il référence?

Le féminisme est d’abord une lutte contre la domination masculine imposée aux femmes et aux minorités de genre, qui s’exprime régulièrement par la violence. Il se trouve que ces violences émanent principalement d’hommes : d’où une méfiance féministe relative aux hommes, plus susceptibles d’être violents ou dominants. Et je ne peux qu’abonder en ce sens – il y a eu un féminicide dans ma famille.

Mais j’ai le sentiment que dans le féminisme se joue parfois aussi une lutte tout aussi complexe et très difficile à formuler entre générations de femmes. Par exemple, après la première génération féministe de Simone de Beauvoir qui a lutté pour les droits des femmes, la deuxième génération, celle de Judith Butler et Monique Wittig, s’est attelée à renverser l’idée que l’on puisse si facilement penser les catégories “femme” et “homme” comme des catégories exclusives.

La génération suivante a au contraire revalorisé des conceptions non occidentales et parfois relativement essentialistes ou matriarcales de ce qu’être femme veut dire, comme en Amérique latine ou dans certains pays d’Asie. Les générations continuent ainsi de se succéder, renversant les certitudes des générations antérieures.

S’il y a une commune mesure à tous les féminismes, à savoir la lutte contre la violence masculine, on trouve donc aussi à chaque génération une revendication au droit d’être femme autrement, d’être femme à la place de l’autre femme, celle dont on a besoin de se séparer pour advenir à celle que l’on est. Et cette femme symbolique, qui nous a transmis les règles de sa génération, prend la figure maternelle. D’où mon emploi du terme de “matricide”.

Cela explique, je suppose, une partie du refus de la maternité dans certains féminismes : c’est un refus de transmettre ce qui a été reçu8. C’est surtout vrai dans la génération précédant la mienne.

Il fut une époque où être mère signait le refus d’être féministe, une soumission à l’injonction à la maternité. La nouvelle génération féministe est désormais beaucoup plus encline à parler de maternité et à lutter pour les droits des mères, le droit à allaiter en public, à avoir des enfants sans conjoint.

Aujourd’hui, être mère, avec ou sans conjoint, est plus largement reconnu par les féministes comme à la fois beau, méritoire et difficile. On accorde une plus pleine complexité à cette expérience aussi universelle qu’unique. Mais ne nous leurrons pas, il reste encore beaucoup à faire pour la reconnaissance des droits et des besoins des mères.

En tout cas, les combats féministes contre la domination masculine m’ont beaucoup apporté à titre personnel. J’ai porté plainte récemment en commissariat contre un individu érotomane qui me harcèle depuis trente ans, et ce fut la première fois que ma plainte a été prise très au sérieux, et même avec une certaine inquiétude, par des policiers. Il y a quinze ans, à Paris, j’avais été reçue avec des rires et une indifférence difficile à vivre. Cette fois, j’ai senti un soutien, une forme de care de la part des policiers. Ce n’est pas rien.

Pour finir : de qui prends-tu soin, et qui prend soin de toi ?

Je prends particulièrement soin de mes relations avec mes élèves ou anciens élèves. Ils et elles sont comme mes enfants. Il y a une distance, évidemment, parce que nous ne sommes pas une famille – je les vouvoie, par exemple – mais c’est extrêmement précieux. Et c’est réversible : mes anciennes ou actuelles enseignantes prennent soin de moi. Il y a quelques semaines, mon ancienne institutrice m’a envoyé par la Poste des photos qu’elle avait retrouvées de moi. J’ai vu la lettre, reconnu son écriture sur l’enveloppe, et j’ai pleuré d’émotion.

Mon actuelle professeure de danse continue aussi de me faire grandir. Elle est très attentive à ce que j’assume ma féminité. Cette femme a une force extraordinaire, elle n’est plus toute jeune mais je l’admire comme un horizon futur pour moi. C’est elle qui m’a dit dernièrement, “les gens dont on prend soin sont toujours un peu nos enfants”.

C’est peut-être cela, la relation de soin : élever autrui et être soi-même élevée – au sens littéral de faire grandir, faire aller plus haut. Faire regarder au loin. Ça ne prend pas toujours, il y a quelques ratés, des efforts pour réparer. Cela peut être le cas avec nos parents, parce qu’il y a moins de distance avec eux, plus de projections. On en revient à la séparation : grâce à la distance, on peut construire la relation de manière plus réfléchie, parce qu’elle ne va pas de soi. Et cet effort élève, des deux côtés.


1. Le validisme est défini comme un “système d’oppression subi par les personnes handicapées du fait de leur non correspondance aux normes médicales établissant la validité. Un ensemble de capacités seraient attendues d’un corps pour qu’il soit considéré comme humain. L’idéologie validiste postule que les corps non correspondant, jugés handicapés, ont alors moins de valeur. Ils sont naturellement considérés comme inférieurs, et donc discriminables.” (Le Manifeste des Dévalideuses, 2021).

2 Notamment car elle a co-dirigé avec Sandra Laugier Le Souci des autres. Éthique et politique du care, Paris, EHESS, coll. « Raisons pratiques », 2005.

3 À cet égard, je suggère entre autres la lecture des travaux remarquables d’Agata Zielinski et Frédéric Worms.

4 J’emprunte ce concept à l’anthropologie d’Emmanuel de Saint Aubert : il désigne le fait d’être maintenu dans l’être, dans la vie, par une entité intangible qui vient soutenir et éviter de “tout laisser tomber”. Voir E. de Saint Aubert, “Réflexions en vue d’une articulation entre portance et care”, in Pesanteur et portance, co-dir. Christine Leroy et Chiara Palermo, Paris, Hermann, 2022, p. 13-36. En ligne : https://shs.cairn.info/pesanteur-et-portance--9791037021687-page-13?lang=fr.

5 Directeur de recherche en philosophie au CNRS et enseignant auprès de formateurs pour éducateurs spécialisés.

6 On retrouve le concept chez Tertullien puis Augustin.

7 Par opposition, d’ailleurs, aux “liens toxiques”, qui n’ont rien de liens et tout d’un ligotage.

8 Voir Adrienne Rich, Of Woman Born, ‘Motherhood and Daughterhood’.

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