J'en appelle à la générosité des Français.e.s : l'heure est grave. Notre Ministre de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique est frappé de plein fouet par la crise.
Il nous l'expliquait lui-même sur le plateau de Léa Salamé samedi dernier sur France 2. L'inflation, il ne la constate pas dans son métier pourtant si prenant entre deux séances d'écriture. Non, c'est quand il doit acheter des pâtes pour ses enfants (vous l'avez sûrement croisé au Aldi du coin de la rue) qu'il réalise l'augmentation du coût de la vie. Le pauvre homme rencontre une décousue financière terrible... Ses 10 490€ brut par mois semblent en effet bien maigres face au cours de la coquillette.
Qu'à cela ne tienne pour que s'organise un grand mouvement de solidarité nationale. C'est après tout un moment idéal puisque - est-il utile de le rappeler ? - nous sommes tous apaisés pour 100 jours. La concorde peut trouver son point d'orgue autour d'un plat de pâtes, voilà qui promet. Il suffit que chacun envoie un paquet à monsieur le ministre pour que sa famille mange enfin correctement.
Comme je suis homme à aligner mes actes avec mes paroles, j'ai d'ores-et-déjà envoyé le mien, aujourd'hui même. Débordé par l'émotion, j'ai tenu à accompagner le geste d'une lettre. Je la reproduit ici pour poursuivre dans cet esprit de partage qui m'est cher. Puisse-t-elle générer des élans de générosité. Je joins également une preuve de l'envoi, on ne rigole pas ici.
Ma lettre à Bruno Le Maire
Le 22 mai à Villeurbanne, chez ceux qui ne sont rien
À l’attention du Ministre de l’Économie, des Finances et de la Fierté littéraire
Très cher Bruno,
C'est avec une grande tristesse que j'ai appris vos difficultés financières samedi soir sur France 2. L'inflation nous touche tous, et je suis d'autant plus peiné qu'elle atteigne les hautes sphères de notre glorieuse méritocratie. Vous avez alerté à plusieurs reprises sur vos dépenses en paquets de pâtes pour vos enfants. Les mauvaises langues y verront un élément de communication malhabile pour vous rapprocher de la plèbe ; pour ma part je préfère percevoir là le cri de détresse d'un père de famille, qui ne demande qu'à nourrir les siens et garder sa dignité en toute bonne foi.
En conséquence, j'envoie conjointement à cette lettre un colis contenant un paquet de pâtes qui, je l'espère, vous permettra de mettre quelques euros de côté tout en profitant d'un bon repas en famille. Je gage que vous songez de toute manière à réduire les portions, comme le font déjà 79% des Français (quand ils ne suppriment pas carrément un repas).
Une question me turlupine toutefois : si la personne en charge de la direction de l'économie du pays n'est pas à même de gérer son propre budget, n'est-il pas temps de céder la main ? Un peu de repos vous ferait sans doute le plus grand bien. Laissez sur la table quelques dossiers qui prennent déjà la poussière à l'attention de votre successeur : rétablissement de l'ISF, taxation des dividendes et des GAFAM, indexation des salaires sur l'inflation, etc.
Ce départ sera l'occasion de mettre au point un nouveau chef-d'œuvre de littérature dont vous seul avez le secret. Avec seulement 3 mois d'indemnité à 10 490€ brut chacun, il faudra se serrer un peu la ceinture... Heureusement le chemin vers l'emploi s'achève juste au bout du passage piéton, pour qui veut vraiment travailler.
Permettez-moi une suggestion : n'hésitez pas à solliciter une entreprise privée qui aura apprécié votre passage au ministère, ou avec qui vous entreteniez déjà de bonnes relations au préalable. Il semble qu'après tout, ce soit une tradition au sein des gouvernements d'Emmanuel Macron, si je me réfère aux cas d'Alexis Kohler (MSC), de Jean-Baptiste Djebarri (Hopium, après sa tentative avortée à CMA-CGM) ou encore d'Angès Pannier-Runacher (Perenco, entre autres).
Si cette piste s'avère infructueuse, vous pourrez toujours prendre part aux expérimentations autour du RSA, en mettant la main à la pâte (pardonnez ce jeu de mot, je ne veux pas rajouter à votre détresse) en échange d'une allocation inférieure au SMIC.
J'effectue également un don de 20€ aux Restos du coeur. Vous pourrez les solliciter en dernier recours, quand les fins de mois sont vraiment difficiles. De quoi vous rappeler le quotidien de tant d'étudiants en France aujourd'hui, et peut-être de susciter au passage un brin de nostalgie, vous qui n'avez à n'en pas douter que trop connu la détresse financière.
Solidairement vôtre
Proches du peuple ou de l'assiette ?
Il est vrai que ma démarche manque de modestie, car cet exhibitionnisme de générosité ne m'honore pas. Toutefois je ne regrette en rien mon geste. Voilà enfin qui montre à quel point les hommes de pouvoir sont proches du peuple, bien plus qu'on ne le pense. J'espère qu'à son tour, Bruno saura me rendre la pareille lorsque je serai dans le besoin. Je sais pouvoir compter sur les oreilles attentives des membres du gouvernement, ils l'ont déjà montré à bien des égards.
En attendant chers lecteurs, si le colis de pâtes vous inspire je ne peux que vous encourager à appuyer ma démarche en rejoignant l'appel. Le ministère des finances sera sans l'ombre d'un doute ravi de recevoir en nombre ce met qui nous fédère. Si d'aventure l'envie vous prend de verser quelques écus à une association, pensez y aussi...

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