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Billet de blog 7 mai 2009

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Diane Arbus in context à Douchy-les-Mines

Il est rare de voir une exposition des photographies de Diane Arbus. Il est plus rare encore de les voir dans le contexte qui a présidé à leur production : la commande de magazine. C’est tout l’intérêt de cette belle « Rétrospective imprimée, 1960-1971 » présentée au Centre Régional de la Photographie Nord-Pas-De-Calais jusqu’au 7 juin. Conçue par Pierre Leguillon, on pourra y voir les plus belles parutions de Diane Arbus et appréhender par petites touches sa fortune critique auprès d’artistes tel qu'Annie Leibovitz ou Stanley Kubrick. 

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Il est rare de voir une exposition des photographies de Diane Arbus. Il est plus rare encore de les voir dans le contexte qui a présidé à leur production : la commande de magazine. C’est tout l’intérêt de cette belle « Rétrospective imprimée, 1960-1971 » présentée au Centre Régional de la Photographie Nord-Pas-De-Calais jusqu’au 7 juin. Conçue par Pierre Leguillon, on pourra y voir les plus belles parutions de Diane Arbus et appréhender par petites touches sa fortune critique auprès d’artistes tel qu'Annie Leibovitz ou Stanley Kubrick.

Il y a les « freaks » de Diane Arbus. Le portrait d’une humanité à la marge, une esthétique du malaise, le goût du difforme, la fabrication d’une certaine étrangeté et un univers quelque peu morbide qui s’accorde si bien à son destin tragique. Elle est célèbre pour cet exotisme du monstrueux et de la bizarrerie. On sait moins, peut-être, que ce travail a largement son origine dans les commandes qu’elle a réalisées pour la presse. La première, The Vertical Journey : six movements of a moment whithin the heart of the city, publiée dans le numéro de juillet 1960 de l’Esquire, aura demandé de nombreux mois de travail au musée Hubert sur la 42e Rue, au Club 82, un club de travestis, au salon de coiffure Beauty City sur la 47e où se presse le gotha new-yorkais, à la morgue, enfin. Six photos, seulement, furent publiées, Robert Benton et Harold Hayes de l’Esquire qui avaient pensés lui confier l’illustration de tout le numéro jugeant l’ensemble trop dépressif. C’était néanmoins le début d’une collaboration fructueuse avec la presse qui allait lui permettre de construire son œuvre.

Glamour
Diane Arbus commence sa carrière en aidant son mari photographe de mode, Allan dans les années quarante. D’abord comme directeur artistique puis comme photographe à part entière. Ensemble, ils travaillent pour Glamour et Vogue. Après s’être séparée de son époux et avoir suivi l’enseignement d’Alexey Brodovitch, (directeur artistique de Harper’s Bazaar), elle fréquente à la fin des années cinquante, la photographe Lisette Model à la New School for Social Research durant deux ans. Celle-ci, avec Weegee, comptera parmi les photographes qui la marqueront durablement. Puis, elle suit le chemin des Robert Frank, Louis Faurer, William Klein et se fait connaître auprès des rédactions.
Dix ans durant, elle collabore avec de prestigieux magazines tels que Esquire, Harper’s Bazaar, Infinity, Nova, Sunday Times magazine. Sa production, abondante, comprend près de 250 photographies parmi lesquelles on trouve un peu de mode enfantine, des portraits de célébrités de la littérature et du cinéma aussi différentes que Norman Mailer, Marcello Mastroianni, Borges ou Mae West, des essais photographiques comme The Vertical Journey ou le très beau Full Circle qu’elle accompagne d’un long texte (Infinity, Février 1962). Elle se consacre aussi à quelques reportages comme ce Get to know your Local Rocker (Nova septembre 1969) et aussi ce Let Us Now Praise doctor Gatch (Esquire, juin 1968), clin d’œil malicieux à Walker Evans par son titre et à Eugene Smith par son sujet, les pérégrinations d’un médecin de banlieue. Ici, l’héroïsme et l’humanisme du Country Doctor de Smith (dans Life, septembre 1948) ont cédé la place au cafardeux et au sordide.

Matière brute
Les occasions de voir exposer Diane Arbus sont rares. En France, la dernière fois qu’on a pu la voir c’était en 1980, au Centre Georges Pompidou. C’est dire tout l’intérêt de cette rétrospective conçue par Pierre Leguillon rassemblant une centaine d’images et qui a le mérite de montrer cette œuvre dans le contexte de sa production. On ne verra pas de ces beaux tirages bien encadrés faits pour les musées mais plutôt la matière brute des parutions. Dispositif, mettant avantageusement en lumière le travail de mise en page auquel Arbus participait et rappelant qu’il fut un temps où la photographie vivante se voyait dans les journaux bien plus que pendue à des cimaises. Mais, ironie du sort, c’est maintenant le support lui-même qui rentre au musée et se présente comme « vintage ». Manière de souligner, en passant, que cette époque d’une presse généreuse avec la photographie est si loin de nous qu’elle peut rejoindre les fantômes qui hantent les musées. C’est au demeurant ce que laissait déjà soupçonner la belle exposition sur le magazine Vu de Lucien Vogel à la MEP en 2006-2007.

Infinity, Fevrier 1962

Diane Arbus, Retrospective imprimée, 1960-1971
jusqu'au 7 juin, du lundi au vendredi, de 13 h à 17 h et le samedi, dimanche et jours fériés de 14 h à 18 h.
Centre Régional de la Photographie Nord-Pas-De-Calais - Galerie de l'ancienne poste. Place des Nations, 59282, Tel : 03 27 43 56 50.

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