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Billet de blog 13 avril 2020

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Le Début de la fin, appel à la résistance active.

Fin du mois. Fin du monde. Décidons de ce que nous voulons: vivre en paix et satisfaire nos besoins élémentaires et nécessaires à notre équilibre. Etre considérés comme des citoyens capables de participer aux décisions. Il est donc temps de déclarer la fin, le Début de la fin, sans attendre l'Après.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Il est temps de prononcer nous même la fin de ce confinement là, inique et inapproprié, qui nous réduit, nous recroqueville, nous atomise en sujet isolé et qui nous cheville aux décisions gouvernementales aléatoires et autoritaires. Sous prétexte de préserver la vie. Mais quelle vie? La vie économique sûrement, la survie politique des gouvernants aussi. Une vie où l’abandon du travail ne serait pas lié à notre seule volonté et s’accompagnerait forcément d’une organisation quasi carcérale où nous serions nos propres geôliers. La belle vie que voilà!

Alors n'attendons plus! Déclarons le Début de la fin! La fin du confinement et la fin d’une organisation qui se révèle dans toute sa vérité crue: ignorante et dogmatique.

Si nous patientons encore, à guetter la déclaration de la fin de ce « confinement là », c'est l'ordre économique donné qui sera une nouvelle fois le maître. N'ayons plus peur d'une désobéissance légitime face aux injonctions d'Etat dont on apprendra plus tard qu'elles n'étaient qu'une mascarade de masques invisibles, celle d'un système un temps menacé, qui a produit ses propres anticorps radicaux.

Octroyons nous plus d'une heure!

Agissons avec raison pour nous décider à agir ensemble. Protégeons vraiment les personnes fragiles susceptibles d'être touchées et reprenons enfin en main nos existences, certes fébriles, par delà nos angoisses savamment entretenues.

Soyons courageux et debout!

L’Après ne sera pas meilleur, bien au contraire. Si nous ne nous levons pas maintenant, face aux ordres contradictoires des bureaucraties aveugles et coupées du véritable sens de la vie, nous serons une nouvelle fois les soumis de l’Histoire. Ne nous laissons pas enfermer dans cette résistance passive des écrans qui n'entrave rien et nous mobilise dans un espoir illusoire, celui d’un combat ultérieur et d’une hypothétique victoire future.

La pandémie mondiale, en s'attaquant frontalement aux productivismes, a été le déclencheur involontaire d'une situation pré-révolutionnaire (instaurant dans un temps fini un socialisme par obligation), ouvrant une fenêtre de tir soudaine et imprévue sur la question des valeurs essentielles à défendre que sont le soin de l'autre, les moyens de s'alimenter, la vie comme ouvrage et non comme travail…

La pandémie mondiale agit comme un lent révélateur des abus de pouvoirs, de celles et ceux qui les édictent, de celles et ceux qui les organisent, de celles et ceux qui les font respecter, de celles et ceux qui les soutiennent et enfin de celles et ceux qui les subissent. Notre bureaucratie a su formidablement mieux s'adapter aux injonctions autoritaires d'organisation du confinement que d’organiser l'urgence sanitaire elle même: manque de masques pour les aidants, manque de test pour la population, services hospitaliers aux moyens insuffisants, réponse politique inappropriée et mensongère… C'est davantage la capacité des personnels hospitaliers, les actions de solidarités, la mobilisation des populations et le système D à tous les niveaux d’une société pourtant mise sous cloche qui ont permis de lutter contre la propagation du virus. Et ces luttes quotidiennes ont commencé à faire infuser d’autres idées, proprement pré-révolutionnaires celles là, sur la question des responsabilités politiques, des incompétences administratives et des actions à mettre en place à plus long termes face à un état et une bureaucratie comptable purement défaillants. Les gouvernants refusèrent d’abord la réalité du phénomène, et pour cause il avait déjà ignoré les perspectives de ce chaos sanitaire, annoncé pourtant depuis longtemps par les gens de terrain. Mais obnubilé a contrario par la menace politique grandissante et disparate, le pouvoir s’est évertué à ne produire qu'une seule forme de réponse, démontrant ainsi sa nécessaire présence: l'augmentation du contrôle et de ses outils répressifs par la promulgation de lois d’exception. Alors que l’Etat peinait à remplir une de ses missions élémentaires, c’est à dire trouver les moyens sanitaires salutaires à la résolution de cette crise, avec une rapidité outrancière il a été capable d’annihiler la gronde protéiforme en organisant un état a-démocratique d'urgence, qui, en quelques ordonnances a privé l'ensemble des français de leurs libertés fondamentales.

Mais cette mise sous tutelle d’un peuple jugé intrinsèquement immature, que nous subissons par ce « confinement là », condamne aussi l'économie marchande à plus ou moins court terme. Elle la condamne mécaniquement. Face au précipice celui qui cesse de marcher n’avance plus. Elle la condamne moralement. Face au précipice se remettre en marche n’est simplement plus possible. Si ce n’est par l’obéissance sacrificielle des enfants à la mère patrie.

Voilà pourquoi, après la déclaration de guerre rendant indiscutable l’établissement d’un Etat d’urgence, va nous être proposé le franchissement inéluctable d’une nouvelle étape: l'économie de guerre et ce que l'on a déjà nommé dans d'autres temps, qui sera à coup sûr réinvesti ce soir par notre président de la République, la rhétorique de l'effort de guerre. Par effort de guerre il faut entendre la mobilisation sociale et industrielle visant à subvenir aux besoins économiques, c’est à dire aux besoins d’une certaine économie, tout en conservant les lois liberticides d’exception promulguées récemment. Nous sommes en guerre contre un virus qui menace l'économie marchande. Mais jamais notre président n’a pu dire que ce virus menaçait la démocratie.

Nous sommes en guerre contre ce virus qui nous touchent non pas en tant que sujets sensibles mais qui nous atteint en tant que forces productives. Nous sommes déclarés en guerre contre cette menace là. Ordre de mobilisation générale. Tout va être désormais dit pour faciliter l’acceptation de cet effort de guerre. Le confinement et les violences conjugales, le confinement et les violences familiales, le confinement et les troubles mentaux… et peu importe là encore qu’il y ait une criante contradiction dans la bouche de ceux-là même qui ont créé les conditions de tous ces troubles.

Cet effort de guerre se caractérisera ce soir par une réorientation des règles de confinement et de déconfinement, qu'elles soient là aussi à l’inverse des positions imposées il y a quelques semaines. Un autre impératif ce fait jour désormais. Et pour y répondre il est indispensable de franchir une nouvelle étape dans l’escalade guerrière. Nous allons produire des tests, devenus armes de guerre, et proposer un déconfinement ciblé, devenu notre programme d’actions de défense, faire que le pays, sans relâcher sa vigilance, puisse faire tourner la machine de guerre du tout économie. Car l’économie marchande ne supporte déjà plus cette situation inédite où un virus millénaire a créé en quelques jours les conditions pré-révolutionnaires d'un basculement vers « autre chose ». Il faut oublier les principes de la vie démocratique, l’Etat d’urgence lié aux attentats nous y avaient habitués, car la démocratie est à géométrie variable. Elle épouse parfaitement les nécessités des économies productivistes qui dans ses différentes formes d'accompagnement politique, de la Chine aux Etats Unis en passant par l'Europe, ont montré leur capacité à réagir si ce n’est rapidement au moins fermement. Et à n’en pas douter, le discours du nécessaire effort de guerre nous parlera aussi de l’Après, de ces lendemains qui chanteront de nouveau grâce à l’effort de tous…

Alors n’attendons pas le jour d’Après ou sinon l'Après nous dévorera, comme depuis des années il nous mange.

Si nous n'agissons pas aujourd'hui, l'Après sera terrible, d'une urgence économique plus impérative encore et sans précédent sur tout ce que nous avons vécu jusqu'à aujourd'hui.

Déclarons le Début de la fin et notre entrée en résistance active. A nous de profiter de ce temps inédit et de pousser le renversement de cette société qui vacille pour installer une autre organisation dès maintenant, partout, ensemble.

Christophe Bédrossian,

A Autrac,

Le 13 avril 2020.

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