
Les musulmans tchadiens ont participé ces derniers jours aux festivités de l’Aïd el-Kébir, la fête la plus importante du calendrier islamique. Le président Idriss Déby a profité de l’occasion pour adresser un message clair sur son approche des affaires religieuses. En marge de la grande prière, il a rassemblé les principaux oulémas du pays ainsi que les responsables du Conseil supérieur aux Affaires islamiques pour couper court aux discordes naissantes et mettre chacun face à ses responsabilités.
Comme dans beaucoup de pays de la région, l’Islam tchadien est protéiforme : diverses écoles y ont toujours coexisté dans l’harmonie, comme d’ailleurs avec les autres religions pratiquées dans le pays. Ces derniers mois ont vu une recrudescence de controverses et mettant en cause cette diversité, animées principalement par des tenants de courants extérieurs à l’Afrique centrale. Si le président Déby ne l’a pas formellement désigné dans son intervention, c’est l’intégrisme d’inspiration wahabbite ou salafiste qui était vraisemblablement visé.
Idriss Déby a fustigé le rôle d’États étrangers qui financent certaines mosquées et madrassas, cherchant à implanter au Tchad leur « idéologie destructrice ». « Le Tchad ne permettra pas à qui que ce soit de venir perturber la paix et la stabilité, et en particulier dans le domaine religieux » a-t-il notamment affirmé. S’il n’a spécifiquement nommé aucun État, il a néanmoins laissé entendre qu’ils étaient clairement identifiés : « On les connaît ! », a-t-il déclaré.
Le président Déby a justifié sa fermeté en étant très clair sur la nature du danger représenté par ce genre d’idéologie. Il a invoqué l’exemple du Nigéria, qui pendant des décennies a laissé des États comme l’Arabie saoudite financer nombre d’institutions religieuses sans aucun contrôle sur les prêches et l’enseignement qui y étaient dispensés, avec les conséquences que l’on connaît aujourd’hui. Le fondateur de Boko Haram, Mohammed Yusuf, a d’ailleurs effectué un long séjour en Arabie saoudite avant de rentrer au Nigéria créer son mouvement.
« Le Tchad est laïc et une République indivisible » a martelé son président. « Ma responsabilité est de préserver ce pays de l'intégrisme, de la violence, du terrorisme religieux. Le Tchad ne sera pas comme le Nigeria ». Il a assorti cette mise en garde très ferme d’encouragements chaleureux envers les congrégations, saluant leur rôle, et se positionnant comme leur garant.