Ami et biographe de Jean-Paul Sartre, Francis Jeanson avait créé un réseau pour défendre ces valeurs et l’honneur de la France durant cette sale guerre qui ne dit jamais son nom. Français du Monde, Jean-Claude Paupert fit partie du réseau Jeanson.

Etrangement, la France n’a jamais honoré ses héros du réseau Jeanson.
Les traîtres de l’OAS ont eux été réhabilités. En 2011, Nicolas Sarkozy poussera la honte jusqu’à décorer de la plus haute distinction française, le légionnaire Helie Denoix de Saint Marc. Le président du parti dit « gaulliste » décorait de la Grand-Croix de la Légion d’honneur l’homme qui tenta de renverser le Général de Gaulle et la Ve République par un coup d’état fomenté par ses amis de l’extrême-droite, le tristement célèbre « quarteron de généraux en retraite ».
Le réseau Jeanson ne se contenta pas de témoigner des horreurs commises au nom de la France dans ses trois départements algériens. Là-bas, les lois de la république n’étaient pas appliquées. Au nom d’une vision esclavagiste de la société française, des français se voyaient refusés leur statut de citoyen. Au grand dam du parti communiste, et contre la politique du pire orchestrée par un premier ministre prétendu socialiste, les membres du réseau Jeanson décidèrent de participer plus activement à la lutte pour l’égalité en droits de leurs compatriotes musulmans. Cette aide active comportera diverses activités : hébergement, recherche de planques et véhicules sûrs, franchissement de frontières, transport et transfert de fonds.
Enfant, Jean-Claude Paupert avait été très marqué par la politique raciste du gouvernement collaborationniste de Vichy. A l’école de la république, l’image de son amie de douze ans affublée d’une étoile jaune le hantera longtemps. Renvoyé de toutes les écoles qu’il fréquenta, ce libraire de formation ne doit sa grande érudition qu’à un ami de son père, Claude Lanzmann.
Rappelé en Algérie, Jean-Claude y découvre la misère, le racisme mais surtout la torture et les sinistres « corvées de bois », assassinats d’opposants politiques par l’armée française. Rentré en France, il participe avec d’autres à la dénonciation de ces horreurs. Mais ces témoignages lui semblent insuffisants. Il décide alors de prendre une part plus active à la lutte pour l’égalité en droit de ses compatriotes en Algérie. On le sait, le gouvernement français s’inclinera devant le lobby pied noir et refusera d’octroyer aux français de confession musulmane cette égalité en droit pourtant inscrite au fronton de toutes les mairies de métropole. Ce refus et l’intelligence tactique du FLN et de ses soutiens en France mèneront à l’indépendance des départements algériens de la France.
Dans l’Etranger de Camus, le français blanc s’appelle Meursault, le français de confession musulmane, lui, n’a pas de nom ; on l’appelle l’Arabe. Et Albert Camus ne fera rien pour lui. Alors qu’il partage le même soleil, Meursault tuera l’Arabe de quatre coups brefs.
Trois ans plus tôt, Saint Exupéry publia Terre des Hommes. Il y racontait l’histoire de l’esclave Bark, dont on connaît le véritable nom. Saint Exupery participera à l’émancipation de l’escave Bark. Devenu l’homme libre Mohamed Ben Lhaoussin, « il partageait à égalité ce soleil avec les autres hommes »
A l’instar de Saint Exupéry, Jean-Claude Paupert a participé à la lutte des français nés sur le sol algérien pour l’égalité en droits. A l’instar de Mohamed Ben Lhaoussin, ces derniers peuvent désormais prononcer ces simples mots « Je suis Algérien ». Ils sont devenus des citoyens libres dans une république démocratique et populaire, libre et indépendante.
Jean-Claude Paupert sera condamné à dix ans de prison par un tribunal militaire français. Envoyé à la prison de la Santé, il sera grâcié trois ans plus tard par le Président de la République, le Général de Gaulle.
Jean-Claude poursuivra son combat humaniste et solidaire en se lançant dans l’action culturelle au sein des Editions Gallimard et Hachette. Aujourd’hui encore, il participe à l’amitié entre les peuples en offrant des conversations sur des thèmes littéraires à l’université Chulalongkorn de Bangkok.
Rachid Bouzenoun, représentant en Thaïlande du R.N.D., le parti Algérien au pouvoir, et Yamine Boudemagh, président de la section Thaïlande de Français du Monde ont tenu à lui témoigner leur gratitude en lui offrant une valise verte, clin d’œil à son action de « porteur de valise du F.L.N. »