L’identité et, plus précisément dans le cas qui nous intéresse, l’identité régionale, est partout (nous avons déjà eu l’occasion de le dire… et de tirer la sonnette d’alarme)…: au quotidien, dans l’alimentaire (les produits du terroir), dans la mode vestimentaire, dans les arts populaires (la chanson notamment), dans les sciences humaines, histoire comprise, et en politique. C’est devenu une tarte à la crème médiatique. La Corse n’échappe pas la mode… les nationalistes se sont très tôt emparé du concept. Rappelons comment, dans la pure (et pire) lignée muvriste, avait été lancée à l’époque de l’A.R.C. l’idée d’une « carte d’identité corse » qui connut le flop qu’elle méritait mais qui refait surface avec la question du « statut de résident ».
Identité quand tu nous tiens !
A l’échelle nationale, l’ambitieux projet du président Hollande, de réforme territoriale de la France, a eu pour effet de réactiver le concept identitaire et, face au projet trop technocratique il est vrai, de redécoupage des régions, les identités « provinciales » se sont réveillées et ont engendré la « jacquerie des barons ». Le Puy de Dôme, le Languedoc-Roussillon, entre autres, ont poussé des cris d’orfraie et réagi : même la Corrèze, terre « hollandaise », est en colère parce qu’elle ne se retrouve pas « dans une région informe, sans identité propre ». La Corse n’est pas concernée par la réforme ni par cette fronde qu’elle suscite dès lors que son statut particulier et son insularité, comme dirait le président Giacobbi, préservent « son identité » mais le ver est dans le fruit !
Non pas que les particularismes provinciaux (patois, langues régionales, folklore, droit coutumier) doivent être systématiquement balayés au nom de « la une et indivisible » et que l’unité républicaine ne doive pas prendre en compte les spécificités régionales…! Sur ce terrain le débat reste ouvert, mais lorsque les particularismes sont systématiquement mis en avant aux dépens de l’appartenance à la nation, la cote d’alerte est atteinte et malheureusement, nous en sommes là.
S’agit-il d’histoire et d’interprétation des dramatiques épisodes des deux guerres mondiales du XXème siècle, qui font l’objet de commémorations nationales à l’occasion du soixante dixième anniversaire de la résistance et de la Libération, ou du centenaire de la première guerre mondiale, l’identité régionale est systématiquement valorisée aux dépens du patriotisme. N’en vient-on pas, dans certains milieux, à mettre en exergue les cas « des déserteurs», « des fusillés pour l’exemple » et, en filigrane, l’idée perverse que « la France » a considéré les Corses comme de « la chair à canon » ! L’identité corse enfant chérie d’historiens révisionnistes ou qui se croient novateurs – alors qu’ils ne font que céder à un effet de mode lorsqu’ils masquent et déprécient le sentiment national des insulaires face au fascisme et à l’occupation italienne en 1940 – relève de l’apriorisme que « la région », en marge de la nation, a répondu avant tout dans ces moments difficiles, à ses pulsions identitaires.
Pour une identité plurielle
Il en est de l’identité comme de la culture, ce n’est pas un élément figé et uniforme : elle est faite de plusieurs composantes et il est dangereux de les opposer entre elles. C’est la leçon que nous donne l’historienne Mona Ozouf, évoquée pour sa « bretonitude » comme dirait Ségolène, et présentée à tort comme une caution intellectuelle de l’anti-jacobinisme, voire du séparatisme breton. A la demande du journal Le Point : « Comment voyez-vous la Bretagne d’aujourd’hui ? Peut-il y avoir une résurgence de l’indépendantisme comme en Ecosse ou en Catalogne » , elle répond :
« Je n’y crois pas beaucoup. Quand lors des deux finales de la coupe de France Rennes-Guingamp, je vois les drapeaux noir et blanc s’agiter aux accents de la Marseillaise, je me dis que l’identité des Bretons est devenue une identité heureuse. Par ailleurs j’ai toujours en mémoire un sondage datant des années 2000. On avait demandé à des habitants de chaque région française de dire s’ils étaient fiers d’être de leur région, d’être français et d’être européens. Vous savez quelles sont les régions qui sont arrivées en tête à ces trois questions ? La Corse, l’Alsace et la Bretagne. Les trois régions qui ont les plus fortes particularités sont aussi les trois régions qui sont très fières à la fois de leur petit coin, de la France et de l’Europe. »
France-Corse
Pour consulter tous nos textes et faire connaitre votre point de vue : www.france-corse.fr
Pour nous écrire : redaction@france-corse.fr