C’est ce que nous pensons à France-Corse, comme en réponse au leader de Corsica liberaqui fait grise mine et qui juge que « le compte n’y est pas », tout en parlant « d’avancée », manière habituelle pour les nationalistes de nier l’évidence en désignant ainsi les reculades ou les rebuffades successives que leur inflige « l’Etat français ».
Il est vrai qu’ils ne sont pas les seuls à entretenir systématiquement de vaines illusions. Le président Chaubon, dont l’absence a été remarquée lors de la dernière prestation ministérielle à l’Assemblée de Corse, doit être bien marri de voir son projet enterré alors qu’en janvier encore, lors de la dernière « une » que lui consacre périodiquement Corse-Matin, il laissait croire que « tout est encore possible ». Il avançait alors l’éventualité d’un sort et d’un calendrier particuliers pour la Corse dans le projet de la nouvelle territorialisation conçue à l’échelle nationale, alors que pour « les cantonales », la procédure était déjà lancée et que les maires avaient déjà reçu les instructions pour les organiser. Il ne faut quand même pas prendre les Corses pour des gogos !
Le « ni ni » façon Bernard Cazeneuve
Avec l’enflure habituelle de leurs propos et leurs slogans éculés, les nationalistes dits modérés ont cette fois réagi et rué dans les brancards, en prenant acte de la fin de non recevoir de la part des représentants du gouvernement à l’égard de leurs revendications farfelues. G. Simeoni à Bastia et J.-C Angelini à Porto Vecchio ont fait assaut de surenchère et nous relevons, non sans sourire, leurs airs de matamores et leurs excès de langage tels que « le vide sidéral des propositions du ministre », son « opération de sabotage », ou pire « l’insulte faite à la Corse », propos agrémentés de l’inévitable allusion à un soi-disant « déni de démocratie » et de l’ appel rituel aux « hommes de progrès » (encore que, sur ce point, les deux leaders divergent, Simeoni étant prêt à jouer la carte d’un large rassemblement et des alliances électorales contre nature en vue des territoriales, alors qu’Angelini , qui veut tirer les leçons du fiasco des municipales d’Ajaccio, prêche un recentrage « au sein de la famille ». Paul Giacobbi a préféré calmer le jeu en relevant comme un pas en avant ce qui n’était pas un pas de clerc du ministre mais une manœuvre très habile… tandis que Camille de Rocca Serra, comme d’habitude, a cultivé l’ambigüité et évoqué l’autisme du gouvernement à l’égard d’une Corse en quête de plus d’autonomie.
C’est bel et bien le « ni ni » qui l’a emporté, dès lors que le package (l’expression n’est pas de nous !), emballant la coofficialité, le statut de résident, la réforme constitutionnelle, le transfert de fiscalité, et autres propositions – pour lesquelles « le consensus » était déjà bien entamé – a rejoint le magasin aux accessoires. Nos deux ministres ont su « la jouer fine » en rappelant dans leurs propos « l‘appartenance de la Corse à la France », en parlant des langues régionales comme faisant partie du « patrimoine national » ou de la prise en considération de la diversité… mais « au sein de l’unité de la République ».
Ces fondamentaux ont été les points forts de leurs discours à qui voulait les entendre, au prix des concessions faites en faveur de la langue corse. La délégation de France-Corse, reçue à la préfecture en ce 6 février par un proche conseiller de la ministre de la décentralisation, n’a pas manqué d’exprimer sa satisfaction sur l’essentiel, tout en exposant des réserves à propos d’un bilinguisme qui pourrait être mal maitrisé si les textes en vigueur venaient à être dévoyés… : Nous avons vu, en effet, comment l’autorité rectorale, par une circulaire scélérate, a déjà contourné le caractère constitutionnellement facultatif de l’enseignement du corse, pour le rendre de fait obligatoire, et il y a lieu de veiller à ce que la consécration du bilinguisme respecte bien la liberté de décision des élèves et des familles. Ne voit-on pas Monsieur le recteur donner à penser et faire en sorte que la filière bilingue apparaisse comme la filière d’excellence dans le cursus scolaire, pesant ainsi abusivement sur le choix des intéressés et de leurs parents. Plus que la visite faite à l’école bilingue de Bastelica, nous avons apprécié la coïncidence non fortuite du calendrier de la venue des ministres le jour anniversaire de l’assassinat du préfet Erignac, une manière détournée de remettre les pendules à l’heure !
Restons vigilants !
Dès lors que reste t-il en course ? La perspective d’une collectivité unique pour la Corse à l’horizon 2018… ce qui « ne mange pas de pain », dès lors que c’est envisagé comme un amendement à la loi dite NOTRe, qui va être discutée au parlement sous peu. Le « chiche » du ministre Cazeneuve ne manquera pas de faire couler beaucoup d’encre car, chacun y mettra ce qu’il veut avant de se voir rétorquer in fine qu’on ne peut pas faire n’importe quoi et que tout est balisé (y compris l’impossible recours à un référendum sur lequel comptaient beaucoup les nationalistes, portés à en faire un plébiscite pour ou contre l’action gouvernementale à l’égard de la Corse !). Chaque groupe « parlementaire » local – est-on tenté de dire – y va déjà de son commentaire, non sans arrière-pensée en cette nouvelle année électoralement chargée. Passage à la trappe des conseils généraux ? Maintien ou rejet des chambres territoriales conçues un temps pour les remplacer ? Passage ou non devant le conseil constitutionnel ? Laissons le soin à nos internautes de nourrir le débat !
Ayons l’œil surtout sur la nouvelle offensive des nationalistes en faveur d’une « solution politique de la question corse ». Voilà près d’un demi-siècle qu’ils la réclament en vain… Si satisfaction ne leur est pas été donnée c’est qu’il doit y avoir des raisons autres que celle avancée par le président Giacobbi que « Rome ne s’est pas faite en un jour » !
Nous prenons la mesure de leur entêtement qui ne manquera pas de produire un effet inverse à celui qu’ils souhaitent. Ils tireront leurs dernières cartouches mouillées, appelleront à mobiliser à outrance, mais viendra le moment où ils devront se compter, et ils verront bien s’ils sont capables de rassembler au delà des 25 000 républicains de Corse qui sont descendus dans la rue, en harmonie avec leurs compatriotes du continent, pour dénoncer le terrorisme et les atteintes à la liberté d’expression, des causes universelles plus dignes de mobilisation que la défense de leur communautarisme ethnique d’un autre âge.
France-Corse
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