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Billet de blog 28 juillet 2014

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Corse - Centralisme ou fédéralisme : repères et références

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Le débat se posait  déjà sous l’Ancien Régime au temps « des rois qui ont fait la France » et qui ont œuvré à travers les siècles pour construire un état fort et centralisé qui combattit les féodalités régionales, ducales ou baronales et qui  réduisit –sans toutefois les abolir- les privilèges des provinces c’est-à-dire, comme on disait alors, « les lois particulières », gages de forces centrifuges. Ce fut une caractéristique bénéfique de l’absolutisme monarchique qui, certes, pêchait sur d’autres points dont la Révolution de 1789 a eu raison. La République « une et indivisible » née en 1792 a renforcé la centralisation qui allait de pair avec l’affirmation de l’unité nationale et de la souveraineté populaire et la défiance à l’égard des « pouvoirs intermédiaires » tels que les parlements « provinciaux » ou les corporations. Le consulat de Bonaparte alla dans le même sens et institua les préfets longtemps demeurés symboles d’un Etat centralisé à la française.

Dès lors, les tentatives de décentralisation fleurant l’ancien régime, les particularismes et les nostalgies d’un passé révolu  ont eu du mal à ébranler l’édifice. Certes l’idée de diversité au sein de l’identité française a fait son chemin et  la décentralisation administrative s’est fait une place durant la deuxième moitié du XXème siècle tandis que l’Etat hésita longtemps entre décentralisation et  simple déconcentration du pouvoir. La brèche une fois ouverte -et le statut particulier de la Corse en est le précédent- les vieux démons se sont à nouveau agités et n’ont eu de cesse de remettre en question l’Etat et les fondements mêmes de la République au nom de régionalismes exacerbés qui ont réveillé des nationalismes surannés (cas des bonnets rouges bretons). Nous en sommes là  et nous nous contenterons dans un premier temps de rappeler – d’après un récent dossier du journal Le Monde- le point de vue d’hommes politiques, d’historiens ou d’administrateurs  contemporains qui  nous ont mis en garde contre les risques d’un processus décentralisateur mal maîtrisé.

Certains se réclament de de Gaulle lui-même dont l’idée, au départ maurrassienne, qu’il se faisait de la France, n’allait certainement pas dans le sens d’une atteinte portée à l’unité nationale, fer de lance de  sa pensée et de ses convictions. Son désir sincère de relâcher le lien centralisateur et  de célébrer la diversité française riche en potentialités de développement économique n’autorise pas à faire de lui un régionaliste convaincu. La véritable raison  de son échec  et de son retrait de la vie politique a été sa volonté de porter atteinte aux prérogatives d’un Sénat jugé trop engoncé dans son ancrage territorial. Lorsqu’il fait un clin d’œil  aux différences c’est, comme l’a magistralement démontré le grand historien Fernand Braudel, en pensant que la diversité est source de richesse pour l’identité nationale  dès lors qu’elle ne remet pas  celle-ci en question. De Gaulle  a écrit : « l’évolution générale porte notre pays vers un équilibre nouveau. L’effort multiséculaire de décentralisation qui lui fut longtemps nécessaire pour réaliser et maintenir son unité malgré les divergences des provinces qui lui étaient successivement rattachées ne s’impose plus désormais. Au contraire ce sont les activités régionales qui apparaissent comme les ressorts de sa puissance économique de demain »

« L’Europe des régions me hérisse » (G.Pompidou)

Le problème est bien posé et l’esprit d’ouverture mérite d’être salué.  D’autres, dont le successeur immédiat du Général, se sont montrés plus frileux.  Georges Pompidou considérait que l’échec du référendum de 1969 prouvait que des régions dotées d’assemblées élues n’étaient pas un désir profond des Français. Méfiant envers les effets de mode, il se contenta  de créer en 1970 les Etablissements Publics Régionaux (EPR), instances de coordination à vocation purement économique. Et d’ajouter en 1974 (discours de Poitiers) : «  l’Europe des régions non seulement me hérisse mais constitue à mes yeux pour ceux qui l’emploient, même si c’est la foi européenne qui les  guide, un étrange retour vers un passé largement révolu. Il y a déjà eu « l’Europe des régions », ça s’appelait le Moyen Age et la féodalité.. La région ne doit à aucun prix être une arme ou un moyen dirigé contre l’Etat ». Comme le fait remarquer le chroniqueur du Monde -et le cas de la Corse nous en fournit un bon exemple- la décentralisation a consisté à dupliquer à l échelon local les travers de l’Etat central : présidents d’exécutifs locaux qui se conduisent parfois comme des potentats locaux, faiblesse des contre-pouvoirs.. enchevètrement des compétences,  gaspillages…

La nostalgie du Moyen Age

A propos de la réforme actée par le président Hollande, l’historien Jean-Christian Petitfils considère que « diviser par deux le nombre de régions transformerait les présidents  des super régions en grands féodaux à l’instar des ducs de Bretagne et de Bourgogne que la France a connus au Moyen Age. Pendant  des siècles l’Etat royal a construit la nation agrégeant patiemment autour de l’Ile de France des territoires périphériques n’ayant au départ nulle vocation à s’y intégrer. Ainsi est née la France, miracle de l’histoire plus que de la géographie.

Pour sa part Jean-Luc Bœuf, ancien directeur des services du conseil régional de Franche-Comté pense que notre organisation administrative n’est pas comparable à l’Allemagne où les Lander comme dans tout Etat fédéral disposent d’une souveraineté qui leur est propre là où l’Etat fédéral n’intervient pas. Outre-Rhin (mais pas en France !) l’Etat est constitué de plusieurs entités locales  qui ont une existence et une constitution propre.

N’allons pas plus loin : les risques signalés, ce sont  précisément ceux que nous vivons en Corse placée en avant-garde de la décentralisation : potentats-présidents singeant des leaders nationaux, roitelets locaux et mazarins de pacotille jouant les experts constitutionnalistes, tendance de la CTC à se prendre pour un petit parlement  se mêlant de tout et prétendant légiférer sur tout,  ignorance « superbe » de l’Etat  considéré comme un simple dispensateur  de la manne publique !

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