Ce qui est impressionnant avec la morale populaire, c’est qu’elle s’exerce différemment selon les lieux, les personnes et les époques.
Si l’on garde un peu la réalité en mémoire, Bertrand Cantat n’a absolument pas fait son « retour » artistique en février 2024, ni même en octobre 2018, comme beaucoup le prétendent… mais en 2014.
A l’époque, l’ancien chanteur de Noir Désir avait fondé le groupe DÉTROIT et avait repris le chemin des studios, puis celui de la scène.
Leurs (car c’est un collectif) concerts étaient bookés-complets en moins d’une heure et tous les Festivals Rock de France les sollicitaient.
Bertrand Cantat avait alors purgé le temps carcéral imposé par la Justice, indemnisé totalement la famille de la victime et répondu à toutes les obligations du contrôle judiciaire.
Il était donc parfaitement libre, comme vous et moi, d’exercer son métier sans que personne n’ait rien à y redire, le seul arbitre étant le public, car oui, en spectacle vivant, le public qui est le seul et unique juge de votre légitimité et de votre talent : si vous n’en avez pas, il ne se déplace pas, … si vous en avez, il rempli vos salles.
Ceux qui ne souhaitent pas aller écouter un artiste n’en sont nullement obligés et ceux qui souhaitent le faire en ont bien sûr la plus parfaite liberté. La Justice doit aussi veiller à ce que ceux-là n’en soient pas empêchés.
Le fait, pour DÉTROIT, de passer par un financement participatif, (il ne s’agit en aucun cas de dons ou d’une cagnotte mais de pré-commandes d’un album) était à double tranchant, et peu d’artistes de ce niveau seraient capables de s’y risquer).
Le succès de cette campagne montre à quel point le public désire profiter encore du talent de ces trois artistes.
Qui donc, en France, pourrait pré-vendre autant d’albums en seulement 72 heures ? Certainement personne !
La question de la légitimité est donc réglée de ce fait, et celle du Droit l’est depuis 2003, donc depuis plus de 20 ans.
Il est temps de passer à autre-chose.
Je souligne, en substance, que le succès de cet album sera en grande partie dû aux nombreux articles de presse, d’interventions TV et radio, mais aussi des Réseaux Sociaux, qui, croyant mettre à mal le devenir de Bertrand Cantat, lui offre en réalité une immense promotion en parlant de lui quotidiennement.
La décence aurait été le respect de la Justice et de son application plutôt qu’un aboiement de meute qui est devenu, à force, contre productif et invite à un effet contraire de celui désiré.
Franck René JUIN