Le film réalisé par Erick Zonca pour la Sécurité routière (attention, spoiler : regarder avant de lire) repose sur une idée de mise en scène efficace quoique classique (la place vide que l'autre occupait et que l'on ne s'habitue pas à devoir reprendre). Mais l'identification qu'il propose introduit une équivoque dans le message. Identification à la femme voire aux enfants qui ont perdu un conjoint ou un père : exprimez votre attachement à lui pour l'amener à une conduite consciente, responsable, respectueuse de sa propre vie et de celle d'autrui ; identification à l'homme : voyez ce que vous perdrez peut-être si vous ne vous donnez pas cette bonne conduite. Jusque là, rien de bien troublant.
Les choses se gâtent pourtant dès les premières secondes, car cet homme (Pascal Elbé) est un concentré de muflerie quotidienne qui fait de sa compagne (Élodie Bouchez) une simple caisse de résonance à ses histoires de journée de travail. Circonstance aggravante, il la laisse faire les courses et surveiller les enfants seule tout en assurant ça et là qu'il va faire sa part. Aussi, quand arrive le dénouement de ce que je croyais être un film sur la condition des femmes (ou quelque chose du genre), c'est comme un soulagement : elle va pouvoir refaire sa vie avec un type plus intéressant. Sans doute pas le résultat escompté… mais le réalisateur a sans doute cherché à associer la violence routière avec un profil socio-psychologique bien défini. Ce qui change des personnages typiques de ces campagnes par le passé, souvent aussi individués que des mannequins de crash-test, mais bouleverse aussi l'impact affectif du film sur ses spectateurs, et sans doute plus particulièrement sur ses spectatrices.
Tout de même, j'ai eu un doute ensuite : et si ce personnage assez zemmourien était une forme d'idéal masculin pour une bonne moitié de la France de 2015 ?