Suite à un mouvement de pères et de mères qui dure depuis plus d’un an et destiné à mettre en évidence l’absence d’équité parentale après des séparations, le groupe SRC à l’Assemblée Nationale ainsi que des parlementaires EELV ont émis une proposition de loi sur ce sujet.
Afin d’en discuter, la députée socialiste Marie Anne Chapdelaine a convié certaines associations à une audition ce jour: SOS Papa, SVP Papa, Osons les Pères, MNCP, Les femmes pour la résidence alternée…
N’ayant pour notre part pas été convié-e-s malgré notre rôle actif, nous tenons à exprimer ci après un premier avis quant à cette proposition de loi.
De premières intentions positives :
Cette proposition de loi N°1856, relative à l’autorité parentale et à l’intérêt de l’enfant, instaure désormais la résidence de l’enfant au domicile de chacun des deux parents (sauf circonstances exceptionnelles).
Il est prévu de sanctionner dès la première infraction, le non respect des prérogatives d’un parent par l’autre parent. Il est important de préciser ici, qu’il est nécessaire de prévoir une mesure d’incitation forte pour le parent qui n’assume pas ses droits et devoirs à l’égard de l’enfant. Ceci notamment pour responsabiliser chaque parent et ainsi faire baisser le nombre de familles monoparentales.
Le livret de famille devra comporter les droits et devoirs de chacun des parents.
Ces dispositions sont en phase avec les suggestions qui figurent dans la plate –forme des « 8 propositions pour l’égalité parentale et la résidence alternée », dont les 6 premières nous sont essentielles. Elles sont susceptibles de garantir le droit de l’enfant à maintenir le lien avec ses deux parents lors des séparations parentales. Et, sans employer les termes qui fâchent certains, comme « résidence alternée », « aliénation parentale », « éloignement géographique volontaire », elles évoquent ces problématiques.
Des lacunes importantes :
1 S’il est fait référence à l’intérêt de l’enfant dans le document, cette notion reste trop abstraite et peut laisser la place à des interprétations inappropriées lors des décisions de Justice.
2 L’article 7 p 6, dans la partie EXPOSE DES MOTIFS précise « l’alternance des temps de résidence sera le principe et le juge ne fixera plus de droit de visite et d’hébergement du parent qui reçoit l’enfant pour une durée inférieure à l’autre ». Cette idée est présente à la page 3, 4ème paragraphe « le premier chapitre vise à renforcer l’exercice conjoint de l’autorité parentale en cas de séparation des parents afin que l’enfant puisse conserver des relations équilibrées et régulièresavec chacun de ses parents.
Mais dans la proposition de loi dans l’article 7 p 12 il est écrit « la résidence de l’enfant est fixée au domicile de chacun des parents selon les modalités déterminées d’un commun accord entre les parents (ceux là n’ont pas besoin d’un juge !) ou à défaut par le juge ». La loi elle même n’envisage donc plus l’équilibre des temps d’hébergement et le risque est de retomber dans l’ornière que l’on connaît déjà : certes l’enfant à deux résidences mais une où il vit 26 jours sur 30 et l’autre 4 jours… Quelle différence avec ce qui se passe aujourd'hui ? Il faut affirmer dans la loi ce qui est inscrit dans l’EXPOSE DES MOTIFS : à savoir « sauf accord des parents dûment justifié (ce « dûment justifié » me gêne, s’il y a accord entre les parents il ya accord. Et justifié à qui ? )pour des temps d’hébergement inégaux, le droit de visite et d’hébergement du parent qui reçoit l’enfant ne peut être d’une durée inférieure à l’autre ». Etant entendu que cet accord doit être le fruit d’une concertation équitable et responsable.
3 La nécessité de la médiation est insuffisamment garantie. Il n’y a pas d’avancées significatives sur ce sujet.
4 Par ailleurs, notre proposition complémentaire à la médiation (qui intervient en cours de procédure) de la mise en place d’une conciliation familiale (en amont de la procédure) n’a pas été retenue, alors qu’elle est à même de prévenir dès le début de la séparation de possibles conflits et d’éviter des frais de justice. Dans ce cas, le recours à un avocat ne doit donc pas être obligatoire.
5 Une place trop importante est laissée au droit de visite médiatisé laissant entendre qu’il est une normalité. Or nous savons par expérience que cette préconisation est souvent le résultat de la calomnie d’un parent à l’égard de l’autre, de non-respect des droits de visites hors lieu médiatisé (et qui perdurent en lieu médiatisé !). Nous demandons expressément sur ce sujet, notamment à Mme la Ministre de la Justice, de répondre aux situations en cours que nous lui avons déjà mentionnées.
6 A l’instar des violences, toutes les formes de calomnie doivent être sanctionnées. Cela pouvant conduire à retirer la résidence et/ou l’autorité parentale conjointe au parent dysfonctionnant.
7 La place des tiers, notamment des beaux-parents, est insuffisamment encadrée. Madame Dominique Versini, alors Défenseur des enfants, avait justement fait valoir qu’un beau-parent ne pouvait être responsabilisé dans le cas où il partage la vie du parent qui ne respecte pas les droits de l’autre parent.
8 Article 4, 372-1 « Tout acte de l’autorité parentale […]accord exprès pour les actes importants » Mais rien est précisé quant à ce qu’encoure le parent qui ne respecte pas ce dispositif ?
9 Vous pouvez vous référer à des remarques complémentaires auprès du lien suivant : http://goo.gl/zmurzg
Améliorer cette proposition de loi et garantir la concertation !
- un enfant mineur de parents séparés sur dix ne voit plus son père (rapport INED 2013)
- 40 % des enfants de moins de 25 ans issus d'une union rompue ne voient leur père que rarement ou jamais et 15 % ne voient que rarement leur mère ou jamais (Note d’analyse du Centre stratégique du Premier ministre, octobre 2012). Plus de la moitié des enfants de parents séparés grandissent avec un seul repère parental !
Ces chiffres dénoncent les problèmes causés à l’enfant par la garde monoparentale généralisée au cours des dernières décennies du fait d’une législation inadaptée et du désinvestissement de certains parents quant à leurs responsabilités affectives et éducatives.
Cela engendrant une souffrance extrême de nombreux enfants, mères et pères.
Par ailleurs, certains parents ne trouvent leur « survie » que dans un désinvestissement de leurs rôles éducatif et affectif à l’égard de leurs enfants. La douleur infligé à un parent aimant privé de son enfant est inhumaine, est-il utile de le rappeler ?
Cette proposition de loi peut constituer une très grande avancée si elle est soutenue par les décrets d’application rapides et appropriés. De même, elle devra bénéficier d’une campagne de promotion très rythmée, notamment dans les médias, ainsi que de la mise en place d’un numéro vert et être accompagnée de la création de Maisons de la Coparentalité municipales et associatives.
Une entité indépendante devrait être initiée et permettre un contrôle citoyen de son application, en lui garantissant des moyens et la possibilité de propositions correctives si nécessaire. Dans ce cadre, nous sommes prêts à assumer nos responsabilités.
Le droit de l’enfant à ses deux parents : une portée planétaire
De nombreuses insuffisances demeurent sur ce sujet, notamment à l’échelon européen. L’échéance prochaine de l’élection européenne devra être l’occasion de promouvoir les améliorations nécessaires. Notamment au travers de la place réservée sur ce sujet dans les programmes des candidat-e-s. Nous les interpellons à ce sujet et exprimerons nos conclusions et nos intentions de vote, ou non.
Par ailleurs, de même que la chancellerie française intervient très justement lors de prises d’otages de personnes françaises lors d’un séjour à l’international, elle se doit désormais d’intervenir systématiquement lors d’enlèvements parentaux d’enfants hors des frontières. Des dispositions législatives doivent être ajoutées dans le sens d’une meilleure prévention de tels actes, ainsi que pour cadrer des interventions à postériori.
Céline AMERY, (Vannes 56) ; Pierre BESSON (Chambéry 73); Catherine CHESSEBOEUF (Auxerre 69);François CIESIELSKI, (Villeurbanne 69) ; Chantal DEBRUYNE (Wasquehal 59) ; Jésus DE LA ARENA (Hasparren 62); Anne DESAILLOUD (Nantes 44); Joachim MARTINS (Vannes 56) ; Nadine GEAY (Paray Le Monial 71) ; Didier MONCHATRE (Chartres 28); Isabelle NICOLAS (Vannes 56) ; Gérard OLLIVIER (Le Puy en Velay 43) ;Marie VAHE (Douai 59) ; Philippe OLLIVIER (Nantes 44).;
Avertissement : Si nous nous référons dans ce texte à 6 des 8 propositions du Collectif de la Grue Jaune pour l’égalité parentale et la résidence alternée, certain-e-s de nous ne font plus partie de ce Collectif et d’autres n’en n’ont jamais été protagonistes.