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Billet de blog 3 février 2023

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LE MONDE ET L'APPEL DU 18 JUIN : DÉJÀ DEUX SEMAINES ET AUCUN ÉCHO !

Le "quotidien de référence" a jeté un pavé dans la mare : ce discours est célébré tous les ans avec un texte falsifié.

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Charles-Henry Groult a mis en ligne le 19 janvier 2023 le résultat d'une recherche et d'un travail artisanal faisant appel aux techniques les plus modernes : il s'agissait de reconstituer le plus justement possible l'émission censée faire connaître aux Français (et au monde) leur futur chef d'Etat, pour l'heure rebelle au tout neuf gouvernement collaborateur (avec l'un des régimes les plus cruels de l'histoire) de Philippe Pétain.

Pour ce faire, le "quotidien de référence" a jeté un pavé dans la mare : ce discours est célébré tous les ans avec un texte falsifié. La version diffusée, loin de marquer une rébellion, parle de Pétain avec le plus grand respect. Cela s'arrange un peu par la suite... implicitement, et se rapproche (incomplètement) du texte canonique.
La vérité, en fait, est connue depuis 1990, et a le plus grand mal à faire son chemin.
Les déformations, du texte sur le moment et de la vérité ensuite, tiennent à un autre tabou : l'isolement de Winston Churchill dans son option de continuation du combat malgré la chute et l'abandon de la France. Grand connaisseur des hommes en général et des hommes politiques en particulier, Winston a sans doute mesuré très vite la dimension de l'orateur mais s'est trouvé empêché, par une opposition puissante qu'animait lord Halifax, de frapper d'emblée d'infamie le gouvernement du maréchal.
Daniel Laurent, un cadre commercial exilé à Bangkok https://www.linkedin.com/in/daniel-laurent-26517623/...
dont l'histoire était le violon d'Ingres, avait fort bien résumé les choses peu avant son décès, survenu en 2014, dans un article en ligne sur le site Histoquiz https://www.histoquiz-contemporain.com
Le chemin de croix :

Convaincu dès le 8 juin 1940, décidé dès le 16, préparé à le faire dès le 17, Charles de Gaulle dut attendre fin juin, voire début août 1940, pour pouvoir librement clamer haut et fort que Pétain avait trahi la République et que lui, de Gaulle, portait sur ses épaules fort larges et fort hautes mais ô combien encore fragiles la légitimité politique de la France.

De longues semaines de batailles ardues et pénibles pour échapper au concept d’une simple légion militaire française incorporée dans l’armée britannique qui en satisfaisait plus d’un et, enfin, faire établir la notion de France Libre, organisme politique porteur de la légitimité de la République bafouée à Vichy.

Les temples gaullistes historiques qui rechignent à admettre ces faits on tort. Au lieu de s’en tenir à l’histoire sainte d’un Appel unique dès le 18, il leur serait plus utile de décorer leurs murs d’icônes retraçant ce chemin de croix. Cela présenterait l’avantage, comme disait l’un de mes bons maîtres que je ne nommerais pas, de « redonner du brillant aux statues ternies par l'encens des commémorations ».

En effet, la simple reconnaissance de ces aléas nous montre un de Gaulle qui, face aux difficultés, plie mais ne rompt pas et, à force de volonté, de conviction et d’excellence politique, arrive enfin à ses fins pour notre plus grand bien.

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