Je sais que je vais "véner" certains lecteurs en citant Dominique Venner, un ancien de l'OAS devenu un journaliste pétainiste très apprécié, qui avait suscité plus d'admiration encore en se brûlant la cervelle en 2013 devant l'autel de Notre-Dame,
non encore victime (la dame en question) de l'irresponsabilité libérale qui répartissait le souci de la sécurité entre dix entreprises traitantes ou sous-traitantes (elle en est où, l'enquête, au fait ?).
Il reprochait à ses coreligionnaires d'extrême droite de se focaliser sur le mariage homo plus que sur le "grand remplacement".
Le même homme, dans son livre sur de Gaulle (Le Rocher, 2004, p. 146) reprochait au Général d'avoir, dans les ordonnances de 1944 réglementant l'épuration, fait démarrer l'entente avec l'ennemi le 16 juin 1940... une date censée ne rien dire à personne ! Car enfin, il n'y avait encore eu ni appel de Pétain à cesser le combat (le 17), ni appel du 18 juin, ni armistice (le 22), ni entrée en vigueur de l'armistice (le 25), ni rencontre de Montoire (le 24 octobre) !
La seule chose vraie dans cette querelle de dates, c'est que le passage de témoin, le 16, de Reynaud à Pétain ne marquait pas une rupture aussi profonde qu'on l'a dit pendant des décennies, en étant complaisant aux effets de manche de l'avocat Reynaud.
Il n'était pas contre l'armistice, étant tout aussi accablé par la défaite militaire qu'un Pétain ou un Weygand, mais contre un armistice SANS LES ANGLAIS. La résistance churchillienne n'était donc pas, contrairement à ses plaidoiries d'après guerre, une aide pour résister aux défaitistes français, mais un clou dans sa croix, le privant de politique et l'obligeant à passer la main, en attendant de voir si les conditions hitlériennes allaient être acceptables ou non, et comment l'Angleterre allait y réagir.
Et il avait pris l'immense responsabilité de conseiller au président Lebrun de confier sa succession à Pétain plutôt qu'à Weygand, plus frais et plus actif dans la recherche d'un armistice, donc un candidat plus naturel... mais moins disposé sans doute à lui rétrocéder le pouvoir dans le cas où l'abandon français aurait fini par engendrer celui de Londres.
Mais même si le 16 juin ne marque pas une très nette rupture de pente, la France "glissant vers la capitulation", comme disait de Gaulle, depuis une bonne dizaine de jours, c'en est tout de même une sur les plans, excusez du peu, gouvernemental, institutionnel et diplomatique. Les militaires envahissent les ministères, le terne chef de l'Etat est quasiment sur la touche au profit d'un militaire prestigieux, le gouvernement devient monocolore en se délestant des nombreux ministres qui cherchaient encore une autre solution qu'une remise du pays au bon vouloir d'Hitler.
Pour Venner, vétilles que tout cela ! De Gaulle est censé faire commencer le 16 juin l'entente coupable avec l'ennemi pour des raisons toutes personnelles. Avant, la grande Zorah (surnom du Général 20 ans plus tard chez les tenants de l'Algérie française) était ministre, après non !
"Pour fonder l'origine de sa propre légitimité, le général a donc voulu inscrire dans les textes que le dernier gouvernement 'légitime' de la France a été celui auquel il a appartenu et dont il avait en quelque sorte emporté la légitimité à Londres dans ses bagages. Comme le soleil, sa personne devait être au centre de tout."
Les gaullistes extrêmement droitiers, de fraîche date ou non, qui briguent aujourd'hui les suffrages feraient bien de prendre leurs distances avec de tels précurseurs !