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Le constat est amer et douloureux, les Centrales Syndicales ont été, pour la première fois de l’histoire politico-sociale de notre pays, les grands absents du combat souverainiste contre l’État néocolonial hors la loi des libéraux Macky/APR/BBY. C’est du jamais vu de 1945 à nos jours. En effet, toutes les conquêtes sociales et démocratiques ont été obtenues avec la participation et l'engagement du mouvement syndical. Sans être exhaustif, ce furent les cas lors :
- de l’indépendance politique de 1960 dont la grande grève des cheminots en 1947, immortalisée par le récit par Sembène Ousmane dans les "bouts de bois de dieu" de la marche des femmes de Thiès à Dakar, fut un tournant décisif,
- du « multipartisme limité puis intégral » que la grève générale de 1968 contraignit le pouvoir du parti unique PS à concéder pour sauver et réaménager la domination néocoloniale,
- de la grande grève de la CSS en 1983/84 puis plus tard celle des coupeurs de canne qui améliorèrent les conditions de travail et les salaires,
- de celle de l'usine de Taïba avec l'héroïque marche des femmes sur Thiès,
- de celle de la SENELEC de 1998 qui a plongé le pays dans le noir en solidarité avec les personnels de la santé et en opposition au Plan d’Ajustement Structurel (PAS), à la dévaluation du franc CFA, au projet de privatisation de l’électricité et qui a ainsi contribué à la première alternance.
Les Centrales syndicales sont restées silencieuses et l’arme au pied alors que :
- les populations subissaient les affres de la vie chère, que des travailleurs étaient arbitrairement licenciés, restaient des mois sans salaires et que même des patrons mafieux refusaient de payer des droits décidés par des juges, etc. ;
- les jeunes condamnés au chômage fuient la misère par l’émigration piroguière meurtrière ;
- les droits constitutionnels de manifester, d’opinion n’étaient pas respectés ;
- se déroulaient des arrestations illégales de près de 2000 citoyens, des jeunes étaient tués par balles avec l’utilisation de nervis, certains torturés et d’autres handicapés à vie ;
- l’indépendance du pouvoir judiciaire était piétinée et ensuite des décisions de justice étaient bafouées par le gouvernement.
Nos Centrales syndicales n’ont émis une protestation que sur « l’annulation-report » de l’élection du 25 février 24, ce qui est à saluer comme le minimum, et cela suite à la décision du Conseil Constitutionnel de faire respecter sa liste de 19 candidats. Cette absence des Centrales Syndicales dans le combat social et démocratique contre l’État hors la loi de Macky/APR/BBY est une anomalie historique sur laquelle les travailleurs et leurs syndicats ne peuvent continuer à se taire.
La démocratie syndicale de la base au sommet seule doit permettre que le mouvement ouvrier et les organisations des classes laborieuses retrouvent le sens de la LUTTE de CLASSE et du DEVOIR - le joom, le fulle, le fayda - de nos anciens comme Ibrahima Sarr dirigeant de la grève cheminote de 1947, Birahim Diawara, agent technique de la Régie et Bassirou Sarr, ouvrier imprimeur, signataires du Manifeste du PAI en 1957, parti ouvrier communiste qui a été le seul à vraiment appeler à l'indépendance, des défunts délégués syndicaux ouvriers comme Badiane Gueye de la NSTS, des cheminots Ibrahima Sène et Djiby Seck, Cyriaque Diatta et Adama Kane de la CSS, Tidiane Diatta des industries alimentaires, l’enseignant Iba N’diaye Ndiadji, Bakhao Seck de la santé, Birane Gaye des PTT, Assane Samb de l’UTSF/AR, etc.
Sous le silence officiel inacceptable des centrales syndicales couve la montée de l'incompréhension et de la colère de la base. Les acquis combatifs du « syndicalisme autonome » impulsé par l’unité d’action des communistes contre la « participation responsable » ont été perdus.
Les travailleurs, les syndicats doivent se réapproprier leurs syndicats et reprendre le chemin de la lutte sociale pour : - juguler la vie chère qui affame nos foyers ; - que nos familles et nos enfants restent et vivent correctement au pays – que la nouvelle étape de la marche vers la souveraineté nationale y associe l’émancipation sociale.
Ferñent
1er mai 2024