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Billet de blog 1 octobre 2024

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Togo- Le Sénégal condamne l’agression subie à Lomé par le député Guy Marius SAGNA

Un député du Sénégal, plusieurs journalistes et des personnalités politiques ont été agressés ce dimanche 29 septembre 2024 lors d’une rencontre citoyenne organisée par la Dynamique pour la Majorité du Peuple (DMP). Réaction immédiate du gouvernement du Sénégal et du Patronat de la Presse Togolaise (PPT) condamnant vivement l’inaction des forces de l’ordre pour défendre les personnes agressées.

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Illustration 1
Guy Marius Sagna, Rencontre avec les citoyens togolais

Hier, dimanche 29 septembre, la Dynamique pour la Majorité du Peuple (DMP), représentant l’opposition togolaise, avait prévu d’organiser à Lomé, une rencontre avec les citoyens togolais à laquelle participait Guy Marius SAGNA, député du Sénégal, député du parlement de la CEDEAO, représentant à la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Cette réunion était en lien avec la participation du député, à la troisième session extraordinaire de la commission parlementaire de la CEDEAO.

UN CONTEXTE POLITIQUE TOUJOURS DÉLÉTÈRE AU TOGO !

Sous pression des autorités, la rencontre initialement prévue dans la salle paroissiale Mgr SESSOU, Paroisse Saint Augustin à Amoutivé, a été annulée à la dernière minute. Le rendez-vous a finalement été donné au siège de la Convention démocratique des peuples africains (CDPA) et la réunion a commencé par une introduction de la députée Brigitte Kafui ADJAMAGBO-JOHNSON, mais n’a pu aller à son terme. 

Dès la prise de parole de Guy Marius Sagna des chaises ont volé du milieu de l’assistance vers la tribune entrainant la débandade de l’assistance et la dispersion des militants dans une totale confusion.

Outre les chaises cassées, entre autres exactions : le matériel de sonorisation et les enregistreurs des journalistes sont jetés dans un puits, les portables arrachés, les vitres des véhicules pulvérisées à coup de parpaings… 

Si plaie de matériel ne saurait être mortelle, il en va tout autrement des agressions physiques perpétrées lors de cette rencontre, à l’encontre de Guy Marius SAGNA, de certains journalistes présents : Godfrey AKPA, Hyacinthe GBLOEDJRO, Yawo KLOUSSE, Romuald Koffi LANSOU, Albert AGBEKO, qui couvraient l’événement et de plusieurs acteurs politiques, victimes d’exactions violentes et brutales de la part des « nervis » parmi lesquels Brigitte Adjamagbo-Johnson, son chauffeur, et plusieurs personnalités politiques. On dénombre au moins sept blessés, (bilan non-exhaustif).

Le député Guy Marius SAGNA, pris particulièrement à partie et blessé à la tête et au bras fut transporté à dos d’homme vers une clinique voisine pour y être soigné. 

Interrogé sur le lieu des soins son récit de l’agression suggère quelques réflexions sur la probable origine des commanditaires de l’opération : « Ils m'ont demandé : "Vous êtes Togolais ?" Comme s'ils me reprochaient d'avoir revendiqué ma togolité. Aujourd'hui, plus que jamais, malgré cette violence, je reste Togolais et je serai aux côtés du brave peuple togolais jusqu'à ce que le pouvoir en place respecte le peuple. »

Illustration 2
Guy Marius Sagna en compagnie de Mme Brigitte Adjamagbo Johnson, après avoir reçu des soins dans une clinique de Lomé le 29 septembre 2024 suite à leur agression

DÉCLARATION PROVOCANTE DE LA PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT

Dans ce contexte politique et sociétal délétère, vécu quotidiennement par les citoyens togolais, connu de toutes les missions diplomatiques présentes au Togo, connu de toutes les Institutions et Organisations internationales présentes au Togo, la déclaration de Mme Yawa Kouigan, ministre de la communication et porte-parole du gouvernement du Togo, à propos de cette énième exaction contre les représentants de l’opposition politique, sonne comme une véritable provocation :

« Il y a là de l'émotion, ce qui est normal. Mais, au-delà de l'émotion, beaucoup de mauvaise foi, parce que le Togo est un pays de paix, de quiétude. Les circonstances déplorables dont nous parlons ne doivent pas nous amener à apporter des accusations gratuites, ce qu'on a pu entendre par-ci par-là, mais encore une fois à donner à la justice togolaise tous les moyens de diligenter une enquête en bonne et due forme. Je pense d'autant moins qu'on devrait pointer un doigt accusateur sur le Togo et sur ses autorités que la liberté de réunion, la liberté d'expression, ne sont pas en question. Je voudrais dire que cette violence n'a pas sa place dans la vie politique, elle n'a pas sa place dans la vie tout court, et souhaiter vraiment un prompt rétablissement aux blessés et former vraiment ardemment le vœu que notre pays, le Togo, continue de jouir de la paix, de la quiétude, que ce soit pour les Togolais ou pour toute personne qui foule le sol togolais. »

La porte-parole du gouvernement ose parler de justice et affirmer que « la liberté de réunion, la liberté d'expression, ne sont pas en question », alors que cela fait plus de cinq ans qu’il n’est plus possible au Togo pour les partis politiques d’opposition et pour les mouvements citoyens, de manifester pacifiquement pour contester la politique menée par les gouvernements de M. Faure Gnassingbé. Qu’il n’est plus possible de tenir la moindre réunion publique à caractère politique ou sociétal, sans que ces événements ne fassent l’objet, soit d’interdictions, soit d’interventions intempestives de la force publique pour en contrarier la tenue ou les faire cesser sur le champ.

Durant la récente campagne électorale pour l’élection du 29 avril 2024, pour élire les députés et les conseillers régionaux, de nombreuses réunions des partis d’opposition furent soit interdites, soit contrariées ou perturbées par des sbires, jamais inquiétés ni poursuivis, pendant que le parti UNIR au pouvoir, paradait sans entraves et étalait au grand jour la magnificence dans ses meetings avec des moyens financiers considérables.

Revenant à l’actualité des violences de ce 29 septembre, vient de fait une interrogation, à savoir : la qualité de Guy Marius SAGNA, député du Sénégal, député du parlement de la CEDEAO, n’a-t-elle pas contraint le pouvoir à la retenue quant à l’intervention directe des forces de l’ordre pour contrarier la tenue de la rencontre avec les citoyens, en laissant accomplir des exactions par des sbires ?

Qui alors a préféré recourir à l’emploi de sicaires pour accomplir la basse besogne ? Étant entendu que les forces de l’ordre présentes sur les lieux ont laissé faire, ne sont pas intervenues, n’ont procédé à aucune interpellation, ont laissé les gros bras repartir à visage découvert, à travers les rues du quartier de Bè. La question reste ouverte !

Illustration 3
L'état du siège de la Convention démocratique des peuples africains (CDPA) à Lomé, lieu où la réunion a dû être transférée, après le passage des sicaires togolais

RÉACTIONS VIGOUREUSES DU GOUVERNEMENT DU SÉNÉGAL ET DU PATRONAT DE LA PRESSE TOGOLAISE

Le Patronat de la Presse Togolaise a immédiatement réagi à cette énième provocation et à la recrudescence des exactions commises par des milices qui agissent au Togo en toute impunité et ne sont jamais recherchées par les forces de l’ordre ni inquiétées. (Voir Communiqué du PPT ci-après)

De leur côté les autorités du Sénégal ont également promptement réagi par l’entremise du ministère sénégalais de l’Intégration Africaine et des Affaires étrangères qui a publié un communiqué dès la soirée de dimanche, condamnant fermement cet acte, le qualifiant d’inqualifiable. (Voir Communiqué du ministère sénégalais de l’Intégration et des Affaires étrangères ci-après)

Après que les autorités sénégalaises aient pris aussitôt contact avec Guy Marius SAGNA, pour s’enquérir de son état de santé, Aminata TOURE, haute-représentante du président sénégalais a exprimé Sur X (anciennement Twitter), son « indignation face à cet acte lâche », demandant que « les auteurs soient rapidement identifiés et traduits en Justice ! ».

La députée togolaise de la DMP, Brigitte Adjamagbo-Johnson, sollicitée pour veiller à la protection de l’intégrité physique de M. SAGNA, a contacté le ministère togolais des Affaires étrangères à cet effet.

Cette nouvelle démonstration de force brute et aveugle commise en toute impunité, illustre la récurrence du caractère liberticide de la politique de M. Faure GNASSINGBE et de ses gouvernements.

De nombreux citoyens du Togo partagent l’indignation de Guy Marius SAGNA : « Je dénonce énergiquement ce qui s'est passé aujourd'hui » et son adresse à l’institution dont il est membre et dont il est un représentant : « La Cédéao ne doit plus tourner le regard et faire l'autruche par rapport à ce qu'il se passe au Togo. C'est extrêmement grave, c'est extrêmement dangereux. »

Malgré de multiples décisions de la Cour de justice de la CEDEAO (CJ-CEDEAO), qui a condamné à l’Etat du Togo pour atteintes aux libertés, demandé la libération de prisonniers politiques, exigé le versement de réparations, l’Etat du Togo persiste dans ses pratiques liberticides et dans le non-respect des droits humains, voire dans l’inapplication des décisions de la CJ-CEDEAO.

Par ailleurs la CEDEAO, en tant qu’Institution internationale africaine, s’est toujours montrée clémente et bienveillante à l’égard du pouvoir politique du Togo, de Faure Gnassingbé et de ses gouvernements, voire à plusieurs reprises lui a apporté sa caution. Si la pratique courante de l’institution sous-régionale incline à penser qu’elle pourrait encore une fois persister dans cette voie, gageons que la requête de Guy Marius SAGNA soit enfin entendue.

François FABREGAT

30 septembre 2024

***

COMMUNIQUÉ DU PATRONAT DE LA PRESSE TOGOLAISE (PPT)

Relatif à l’agression d’une milice contre les journalistes

Illustration 4
Patronat de la Presse Togolaise

Il nous est donné de constater que dans l’après-midi du 29 septembre 2024, alors qu’ils couvraient une activité politique au siège de la Convention Démocratique des Peuples Africains (CDPA) à Lomé, plusieurs journalistes dont Godfrey AKPA, Hyacinthe GBLOEDJRO, Yawo KLOUSSE, Romuald Koffi LANSOU, Albert AGBEKO ainsi que des acteurs politiques togolais et un député sénégalais (NDLR-Guy Marius SAGNA) ont été pris à partie par une milice qui s’est infiltrée dans la masse.

Agressés, battus, grièvement blessés, leurs matériels de travail et autres effets personnels emportés par la milice, ces journalistes pour la plupart, n’ont eu la vie sauve qu’en prenant la poudre d’escampette.

Contacté, l’un des journalistes agressés confie que son sac de reportage lui a été retiré. Il contient plusieurs pièces, entre autres, sa carte d’identité nationale, la carte grise de sa moto, et divers autres documents.

Le Patronat de la Presse Togolaise (PPT) condamne avec la dernière vigueur l’agression des journalistes sur un lieu de reportage et dénonce la passivité des forces de l’ordre, quoique présentes sur les lieux, mais qui n’ont daigné voler au secours des professionnels des médias agressés, blessés.

Le Patronat de la Presse Togolaise s’inquiète du retour des miliciens qui sont coutumiers d’actes d’agression violente et gratuite contre les journalistes.

Le Patronat de la Presse Togolaise appelle les uns et les autres à protéger l’intégrité physique et morale de tous les journalistes dans l’exercice de leur profession.

Le Patronat de la Presse Togolaise invite les autorités togolaises à user de tous pouvoirs pour clore définitivement ce chapitre de milice sur la Terre de nos Aïeux.

Le Patronat de la Presse Togolaise souhaite un prompt rétablissement à tous les blessés

Fait à Lomé, le 30 Septembre 2024

Pour le PPT

Le Président

Honoré Kokouda ADONTUI

***

COMMUNIQUÉ DU MINISTÈRE SÉNÉGALAIS DE L’INTÉGRATION AFRICAINE ET DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES  

Illustration 5
Communiqué officiel du 29 septembre 2024, du Ministère de L'Intégration Africaine et des Affaires Etrangères du Sénégal © Ministère de L'Intégration Africaine et des Affaires Etrangères du Sénégal

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