AFRIQUE - L’Afrique face à la guerre non cinétique menée par l’occident
Interviewé par Cassandra Madonne BÉGOUDÉ le 22 mai 2024 sur AFRIC MEDIA – MEDIA AFRICA INTERNATIONAL, dans l’émission Géo-Jeu Africain, Yves Ekoué AMAÏZO, Président et Directeur Général d’Afrocentricity Think Tank, livre une analyse panafricaine sur les enjeux et les incidences pour l’Afrique de la guerre non cinétique menée par l’occident sur le continent
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AFRIQUE - L’Afrique face à la guerre non cinétique menée par l’occident
L’Afrique face à la guerre non cinétique menée par l’occident
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SOMMAIRE
Comment l’occident met-il en place sa guerre non cinétique contre le continent africain ?
L’Occident peut-il mener la guerre cinétique et la guerre non cinétique simultanément ?
L’Occident utilise toute forme de ruse, système d’écoute, désinformation, l’Afrique est-elle fragile du fait de sa dépendance à l’Occident ?
Quelles sont les armes des pays africains face à un adversaire qui utilise les Mass Média et infiltre les politiques ?
Est-ce que vous considérez les incohérences entre les discours officiels et les actions menées sur le terrain comme une erreur de communication ?
Votre mot de fin ?
Cassandra Madonne BÉGOUDÉ : Comment l’occident met-il en place sa guerre non cinétique contre le continent africain ?
Yves Ekoué AMAÏZO : Je vous remercie pour l’invitation. Le sujet est complexe et oblige à une clarification. Un préalable est nécessaire et se résume à la question de savoir si l’Occident, le Nord Global, compte tenu des actes posés dans l’histoire avec le Peuple africain et l’espace africain, a intérêt à voir la souveraineté africaine émerger. Autrement dit, si ce Nord global qui s’oppose au non-alignement et à la souveraineté des pays non occidentaux, a intérêt à voir l’Afrique s’émanciper de l’Occident[i]. La nouveauté est que des pays comme la Chine, la Russie et bien d’autres ont compris que les attaques régulières contre la souveraineté des Etats non Occidentaux au Sud peuvent aussi les concerner. C’est cela qui explique aussi le soutien de la Chine et de la Russie à des pays africains.
C’est donc dans ce contexte qu’il faut expliquer et tenter de comprendre pourquoi les affrontements découlant de cette logique occidentale de contrôle de l’indépendance des pays non Occidentaux peuvent conduire à des guerres tacites ou implicites.
Une guerre cinétique est une guerre traditionnelle, où les forces physiques sont utilisées pour causer des dommages directs et physiques à l’ennemi.
Au contraire, la guerre non cinétique, qui est une approche dite « douce (soft) et non dure (hard) », a pour objet de causer la déstabilisation, la désinformation[ii], la perte de confiance, la fragilisation et la désunion afin de transformer la dissuasion ainsi créée en autocensure des dirigeants africains, sans pour autant que les principaux responsables ne soient clairement identifiés ou même nommés. Une désinformation peut servir à dissimuler les principaux responsables et véritables commanditaires de la guerre non cinétique. C’est la théorie du « pas vu, pas pris, pas coupable, pas responsable ».
La plus connue des approches dans la guerre non cinétique est la désinformation. Celle-ci se présente comme un « un ensemble de pratiques et techniques de communication qui visent à influencer, de façon négative ou non, l’opinion publique, une communauté, voire des Nations entières. La désinformation comprend également la diffusion volontaire des informations fausses ou biaisées dans le but de nuire[iii] ».
Tout ceci s’inscrit dans ce qui peut s’apparenter à un « espace ou champ immatériel » d’une guerre sans un mort du côté occidental[iv], mais de nombreuses victimes déstabilisées du côté africain. L’essentiel des pratiques requiert des technologies avancées dans le domaine cognitif et de la diffusion d’information en continu. Il s’agit d’influencer et donc de modifier la perception d’un fait et permettre des raisonnements ou faciliter des jugements qui ne viennent pas « déranger » l’Agenda de dirigeants occidentaux consistant à contrôler les principales structures décisionnelles en Afrique.
En fait, l’objectif recherché par une guerre non cinétique est justement que les principaux auteurs en premier ressort de cette guerre ne soient pas mentionnés. Au mieux, que ce soit des dirigeants africains qui soient mis en exergue et même nommés. Pire et plus insidieux, il arrive que l’on fasse croire à un défaut technique, une panne démontrant l’incapacité technique de ceux qui subissent cette guerre non cinétique afin que ceux-là même qui sont à l’origine du problème, débarquent en Afrique en sauveurs, ou en bons samaritains, voire en donateurs - créanciers avec un retour sur investissement non négociable.
Cela s’opère sous la forme d’une cyber-guerre, une guerre de l’information, une guerre digitale avec des attaques cyber virales qui peuvent évoluer en une guerre économique.
Pour les Africains conscients, il faut comprendre qu’une guerre non cinétique utilisée contre les intérêts africains s’apparente souvent au départ à une guerre « invisible » qui a pour objet principal d’annihiler la capacité d’autodétermination et la souveraineté des Africains. Ne pas le comprendre, c’est verser dans le doux rêve qu’est l’illusion et que nourrit la naïveté ou l’achat des consciences.
CMB : L’Occident peut-il mener la guerre cinétique et la guerre non cinétique simultanément ?
YEA : Bien sûr ! La guerre cinétique et la guerre non cinétique ne sont pas mutuellement exclusives. Les deux sont souvent utilisées conjointement dans le cadre d’une stratégie dite « hybride » dans les approches modernes de la guerre géostratégique.
Des attaques cinétiques, comme une attaque militaire ou terroriste, peuvent s’opérer simultanément avec des attaques non cinétiques qui prennent la forme de perturbations dans les communications de l’ennemi et se transforment rapidement en une cyber-guerre de la désinformation. La désinformation sert aussi à créer le doute, l’incertitude et de l’indifférence. Tout ceci cumulé a pour objet de « neutraliser » l’instinct inné de rétablissement de la vérité et de la justice, et en filigrane l’organisation nécessaire pour contrer ce genre d’attaques en Afrique.
Face à une menace persistante, la guerre non cinétique peut être utilisée pour dissuader un Etat africain de le conduire à faire passer les intérêts des populations africaines avant les intérêts d’un pays étranger. La dissuasion, la corruption et l’impunité servent de variables d’ajustement. Le droit international s’éclipse alors face aux « relations internationales » de défense des intérêts bien compris. Aussi, le deal entre un dirigeant africain pour accéder ou se maintenir au pouvoir peut passer par une guerre non cinétique qui se traduit par la coupure de l’internet, de l’électricité et de l’eau lors des annonces de résultats électoraux frauduleux, ou parfois tout au long d’une période afin de faire « plier » les populations réclamant leurs droits. Il s’agit là d’un véritable coup d’Etat institutionnel et non cinétique.
Enfin pour que la guerre non cinétique ait des chances de succès rapide, elle doit intervenir avec la participation active de représentants des intérêts étrangers en Afrique. Il s’agit souvent d’Africains qui sont de véritables traîtres à la Nation.
La guerre cinétique et non cinétique en Afrique ne peut réussir sans la participation active d’Africains qui ne mesurent pas les enjeux ou optent pour la « ventrologie[v]».
La guerre non cinétique s’opère souvent dans l’urgence ou est mise en œuvre avec une instantanéité qui ne permet pas l’organisation de « ripostes », ni d’anticipation pour une neutralisation rapide. Cela n’est pas possible sans une sous-traitance asymétrique en ressources humaines et en équipements et technologies avancés vers ceux qui servent de relais en Afrique.
Lorsqu’un dirigeant africain, un gouvernement, une population dans le cadre des migrations non sollicitées liées au terrorisme ou au climat, sont soumis à l’urgence, les décisions qui apparaissent instantanées pour les Africains comme la « fuite et le déplacement » vers d’autres espaces sont souvent et paradoxalement parfaitement anticipées et planifiées du côté de ceux qui stratégiquement mettent cette guerre non cinétique en œuvre. Les déplacés climatiques servent souvent à cacher les véritables responsables de la planification des déplacements massifs de populations en Afrique.
Enfin, l’évolution de la guerre cinétique et non cinétique suit celle des progrès technologiques, stratégiques et surtout la capacité des dirigeants africains à s’approprier ces technologies et à les utiliser contre les commanditaires de la guerre non cinétique.
Malheureusement, dans la pratique sur le continent africain, ces guerres non cinétiques sont souvent utilisées contre les populations africaines.
CMB : L’Occident utilise toute forme de ruse, système d’écoute, désinformation, l’Afrique est-elle fragile du fait de sa dépendance à l’Occident ?
YEA : Bien sûr que l’Afrique – citoyens ou dirigeants – qui ne prend pas conscience de son organisation militaire, territoriale, monétaire et bancaire unitaire, expose sa fragilité. Cette Afrique là accroit autant sa dépendance vis-à-vis des pays du Nord Global comme vis-à-vis des pays du Sud Global, y compris au sein des BRICS. Aussi, l’Afrique doit créer son propre service de renseignement. Or, ces services de renseignement en Afrique travaillent encore trop contre les populations locales.
Les dirigeants africains qui n’arrivent pas à s’unir sur des dossiers, bref sur des dossiers de souveraineté, ont des relations complexes de servitude, souvent contradictoires, avec le Nord Global, ce qui renforce leurs faiblesses. On peut citer la dépendance monétaire, économique, politique, économique, financière, bancaire, politique et technologique que l’on retrouve régulièrement dans le jeu de « l’aide liée » laquelle sert d’abord les intérêts des donateurs, qui d’ailleurs évoluent rapidement pour devenir de véritables créanciers sans âme.
Dans un monde multipolaire, de nombreux dirigeants tentent de diversifier leurs relations avec des partenaires moins encombrants afin de limiter cette faiblesse et cette fragilité qui ne sont souvent qu’une mise sous tutelle du maillage décisionnel africain.
Moins facile à détecter mais permettant pourtant de déstabiliser en profondeur les individus comme des organisations et même des Etats, c’est la désinformation, ou le déni, ou l’absence d’information.
Des stratégies informationnelles sont mises en place sous forme de campagnes de désinformation visant à manipuler les systèmes d’information africains. Ces campagnes de désinformation ont quadruplé depuis 2022[vi], avec comme conséquences, la déstabilisation et la promotion de la contre-vérité des urnes et des comptes publics.
La réalité dans de nombreux pays africains est :
une interdiction formelle pour les Peuples africains, d’avoir la possibilité de choisir leurs dirigeants ; et plus globalement
une neutralisation des velléités de solidarité africaine, et donc du panafricanisme fondé sur l’éthique de la Maât, vérité, justice, solidarité. Il est question pour l’Occident de déstabiliser, de détruire les « unités » au sommet des structures décisionnelles de souveraineté, afin de mieux se réaccaparer les richesses africaines aux dépens des populations, ce en instaurant au préalable, un environnement de déstabilisation géospatiale et géo-économique et monétaire, et bien sûr géopolitique.
Comment cela s’opère ? Par le renseignement et le contrôle de l’espace et des ressources humaines de l’alignement. Il s’agit principalement :
d’une part, de quadriller le pays de « drones » et d’images satellitaires et de collecter des informations sur les mouvements de populations ; et
d’autre part, d’utiliser les technologies et systèmes d’écoute sophistiqués, en contrôlant à leur insu, la vie privée des Africains, faisant ainsi « sauter » la sécurité des données des entreprises, de l’administration et des organisations de la société civile…
L’introduction des technologies de communications mobiles et la connectivité digitale en Afrique permettent de faire sauter les limites de l’absence d’infrastructure d’interconnexion physique. Pour être clair, l’Etat en Afrique, et ceux qui détiennent le pouvoir peuvent, en toute impunité, sous couvert de la sécurité d’Etat, promouvoir des lois liberticides avec des systèmes d’écoutes utilisant par exemple les logiciels espions comme « Pegasus » ou d’autres. Certains dirigeants doivent leur maintien au pouvoir contre le gré des populations, principalement grâce à une guerre non cinétique menée contre les populations. Le Togo, comme d’autres pays, à quelques longueurs d’avance dans ce domaine.
CMB : Quelles sont les armes des pays africains face à un adversaire qui utilise les Mass Média et infiltre les politiques ?
YEA : Sans des dirigeants patriotes et en absence d’une réelle volonté politique, les armes des pays africains contre les médias d’ingérence risquent de se retourner contre les populations africaines.
Néanmoins, il est possible de contrer la guerre non cinétique opérée par les médias étrangers diffusant en Afrique en identifiant d’abord les individus qui sont chargés d’infiltrer les médias locaux, les réseaux sociaux, les partis politiques, et les associations vivant uniquement grâce aux subsides des financements étrangers ou de certains Etats africains qui servent de courroies de transmission. C’est ce que j’appelle le maillage décisionnel de l’Afrique qu’il convient d’identifier afin de prendre conscience de sa toxicité pour l’avènement de l’autodétermination des populations et la souveraineté de l’Etat.
Bref, il est question d’une nouvelle décolonisation des sous-traitants de la politique postcoloniale de l’Occident par des Africains traîtres, devenus des agents de propagande, d’endoctrinement, voire d’intoxication informationnelle.
Je pense qu’il faut nécessairement passer par sept (7) points pour les solutions qui sont d’ailleurs toutes interdépendantes :
L’éducation de masse valorisant l’éthique ;
La condamnation de l’impunité et de la loi du silence en restructurant la justice pour la rendre plus équitable pour le Peuple ;
la lutte effective contre la corruption[vii]et le clientélisme, notamment en vérifiant et contrôlant le financement des partis politiques, des entreprises, des organisations de la société civile qui œuvrent contre l’intérêt des Peuples africains (notamment l’argent illicite comme celui provenant de la drogue, de la prostitution, des migrations non sollicitées, des ventes d’organes des migrants, etc.). Mais, les « dons » ou « aides » provenant de tiers ou de parrainages douteux peuvent servir à cacher l’origine de l’argent ainsi que le réel créancier ou le réel bénéficiaire ;
La réglementation des médias officiels mais aussi des réseaux sociaux où la désinformation en ligne[viii] est devenue un sport national et international, notamment par la propagation d’informations non sourcées et donc falsifiées mais ciblant des publics qu’il s’agit de « formater » ;
L’organisation de la lutte contre les campagnes de désinformation contre les Noirs, les Africains, les minorités visibles ou non visibles, les cultures et les civilisations noires ;
Des campagnes de prise de conscience et de pro réactivité contre la désinformation sous forme de blagues en éduquant le public et les jeunes ou les groupes ciblés à les identifier et même à contre-attaquer par la diffusion d’informations fiables ou de blagues inverses. Cela ne peut se faire dans l’isolement, mais en partenariat, ce dans tous les secteurs de la vie. Il faudra assurer une diffusion et une amplification avec un processus de démultiplication de l’information proche de la « vérité » dans les langues locales et dans les zones rurales, notamment celles difficiles d’accès physiques ou numériques ; et enfin
Des stratégies nationales, régionales, continentales et internationales de lutte contre le terrorisme et les commanditaires des déstabilisations occasionnées par de véritables armées privées en identifiant les sources et le circuit de financement, la nationalité des armes utilisées, les soutiens politiques dans le monde en faisant appel à des partenaires du Sud Global. Ces stratégies ne peuvent être efficaces si certains dirigeants africains continuent, naïvement, à faire confiance aux commanditaires de ces déstabilisations en Afrique.
CMB : Est-ce que vous considérez les incohérences entre les discours officiels et les actions menées sur le terrain comme une erreur de communication ?
YEA :Au plan officiel, les défauts de cohérence entre le discours et les actions, d’une part, et entre les différents niveaux de communication (politique, diplomatique, militaire, etc.), d’autre part, constituent autant de failles susceptibles d’être exploitées par des adversaires. Le concept de communication stratégique (STRATCOM) vise ainsi à supprimer ces incohérences entre les discours officiels et les réalisations concrètes sur le terrain, opérées souvent par la force ou le chantage clientéliste, ou tout au moins les effets qu’ils produisent sur les perceptions du public cible africain.
Enfin, au niveau stratégique, la manœuvre est nécessairement unique et globale avec des objectifs clairs d’influencer les populations africaines pour modifier leur comportement psychologique et « neutraliser » toute forme de prise de conscience et soif de « vengeance », compte tenu des génocides et des bestialités opérées par de nombreux dirigeants occidentaux contre le Peuple noir.
Le général Beaufre définit la stratégie comme « l’art de la dialectique des volontés employant la force pour résoudre leur conflit ». Il s’agit concrètement d’une forme avancée de « dissuasion ». La dimension matérielle de la guerre cinétique repose sur la force et son abus et la dimension immatérielle plus sur la dialectique des volontés ou plutôt de convaincre ou d’influencer pour obtenir une « absence de volonté » et une « indifférence ». Cette stratégie d’ordre psychologique doit produire chez l’adversaire un sentiment d’absence de contestation de l’Occident usurpateur des richesses africaines, notamment en s’assurant de convaincre l’Africain, individuellement ou collectivement, que s’engager ou poursuivre la lutte contre l’Occident est inutile ou voué à l’échec.
Si la stratégie est bien immatérielle pour la guerre non cinétique, les objectifs ne peuvent pas être atteints sans passer par la case de la guerre matérielle car en filigrane, il s’agit clairement de neutraliser les capacités réelles et concrètes de résistance de l’Africain permettant aussi de déconstruire et détruire l’adversaire. En effet, un Africain qui est convaincu ou se convainc de ne pas pouvoir gagner face à une injustice d’Etat et soutenu par des pouvoirs en Occident, est sûr de perdre avant d’avoir commencé la lutte de libération. Donc le facteur psychologique est extrêmement vital et imprévisible s’il n’est pas anticipé, voire encadré par une formation et une éducation de masse. Encore faut-il en avoir la volonté !
CMB : Votre mot de fin ?
YEA : Des manœuvres en apparence décorrélées de la guerre cinétique et de la guerre non cinétique sont en réalité par nature interconnectées et interdépendantes. Ne pas en prendre conscience, c’est s’exposer à subir par surprise, les attaques non cinétiques contre son identité d’Africain, de citoyen souverain.
Les volets matériels et immatériels offrent une convergence des résultats anticipés avec des effets générés à partir de l’ensemble des champs de confrontation qui n’ont pour autre objectif que la défense des intérêts occidentaux, notamment du Nord Global. Sans un rééquilibrage en termes de technologies, d’équipements de contre-pouvoir, une stratégie de contre - communication proactive et un savoir-faire en matière de sécurité -défense et de dissuasion – militaire, territoriale, monétaire, bancaire et économique-, l’Afrique des citoyens doit s’attendre à subir une recolonisation par l’intermédiaire de dirigeants africains non éthiques.
Mais des partenariats intelligents avec des partenaires du Sud global rencontrant les mêmes difficultés avec le Nord Global pourraient conduire à une forme d’équilibre glissant vers une paix cinétique et non cinétique.
Il s’agit donc de s’organiser collectivement pour créer une force de dissuasion africaine et stopper les velléités des Occidentaux de contrôler les consciences et l’imaginaire des Africaines et des Africains. Les médias afro centriques ont un rôle déterminant à jouer.
En attendant la volonté des 55 pays africains, les trois pays de l’Alliance des Etats du Sahel, Burkina-Faso, Mali et Niger semblent avoir compris que c’est la voie privilégiée pour reconquérir et assurer leur souveraineté. La reconstruction d’espaces non contrôlés par l’Occident pourrait servir de modèle pour un panafricanisme plus pragmatique. Je pense qu’au-delà de la lutte pour la souveraineté et l’idéal panafricain, il faut savoir que ce sont les décisionnels qui poussent vers les « guerres » …
En définitive, les peuples ne recherchent que la paix et le vivre ensemble. C’est pour cette raison qu’il faut garder en perspective l’urgence d’associer les bonnes volontés au sein des peuples partout dans le monde. L’interdépendance africaine [ix] et mondiale des bonnes volontés devrait nous conduire à ne pas nous lancer en Afrique dans des stratégies de « guerres » cinétiques ou non cinétiques au détriment des peuples qui n’aspirent qu’à vivre ensemble en bonne intelligence et en respectant l’autre.
Sur ce plan, l’Occident, le Nord Global, a failli historiquement. L’Afrique des citoyens conscients y compris sa Diaspora doit offrir des alternatives fondées sur une nouvelle éthique du vivre ensemble, tout en organisant et protégeant sa souveraineté. Mais il faut savoir qu’au-delà de la souveraineté et du panafricanisme, il faut organiser et s’organiser pour un « vivre ensemble », ce processus tendant à favoriser l’inclusion, la sécurité et l’appartenance à une société solidaire. YEA.
[v] Amaïzo, Y. E. (Coll.) (2002). L’Afrique est-elle incapable de s’unir ? Lever l’intangibilité des frontières et opter pour un passeport commun. Avec une préface du Professeur Joseph Ki-Zerbo. Editions L’Harmattan : Paris.
[ix] Amaïzo, Y. E. (1980). De la dépendance à l’interdépendance. Mondialisation et marginalisation : une chance pour l’Afrique ? Editions l’Harmattan : Paris.
L’Afrique face à la guerre non cinétique menée par l’occident