Je me souviens de 1962, cette année de mes 18 ans encore plein d'illusions, de rêves et projets d'avenir.
En ce temps là, j'habitais à Saint-Nazaire proche de la sous-préfecture sur le boulevard de mer.
De la fenêtre de ma chambre je pouvais apercevoir une mer gelée ou des gros blocs de glace s'entrechoquaient au rythme des vagues pour atterrir sur une plage recouverte d’une grosse épaisseur de neige, ou quelques mouettes et cygnes semblaient chercher un peu de nourriture laissée par quelques badauds compatissants.
Cette année là, les bases américaines de l'OTAN existaient encore sur le sol français. Les militaires américains échangeaient quelques vinyles et des Winston. C’était la période yé-yé… Elvis Presley, Gene Vincent, Eddie Cochrane. L'économie de la ville y était très fleurissante.
Déjà (contre l'avis de mon père) pour me faire un petit peu d'argent, je faisais quelques extras en salle dans un petit restaurant sympa "Le Sarthois" ou la patronne (une mamie adorable) m’avait pris en affection. J'apprenais tout simplement la "vie" au contacte des adultes comme tout adolescent insouciant de mon âge.
C’était pour moi une période très heureuse de ma vie malgré cet hiver glacial que j'affrontais courageusement en pull-over dans les rues, croisant quelques filles de bar court-vêtues, mais aussi outrageusement fardées, de même les MP à la carrure athlétique, si impressionnants avec leur matraque qui jetaient sans ménagement, les GI éméchés dans les voitures ʺmilitary policeʺ.
Que de chemins parcourus et d'expériences passionnantes vécues depuis cet hiver 1962 !
Je ne ressens cependant aucune nostalgie pour cette époque lointaine enfouie au plus profond de ma mémoire, ni le besoin de retour en arrière.
Actuellement, je suis sans nul doute un retraité privilégié qui après avoir tout laissé derrière lui sans remords, profite pleinement de la vie sous le soleil du Brésil, au son du zouk, forro, pagode, MPB, samba et autres rythmes...
Bien loin de la grisaille européenne.