Après avoir fait fortune dans la “tech” et l’industrie, Pierre-Edouard Stérin lance le projet Périclès en 2023. Révélé par L’Humanité en 2024, ce programme s’inspire du Projet 2025, de la Heritage Foundation, et veut porter des valeurs libertariennes et chrétiennes. Dans ce projet, on retrouve la volonté de toucher à 100% la population via les médias et les réseaux sociaux d’ici 2027.
Un échec dans les médias traditionnels, retour vers le numérique !
Inspiré par la sphère Bolloré, Stérin semble vouloir adopter son modèle. Avec l’acquisition de Valeurs Actuelles, l’entrepreneur signe sa seule victoire dans le monde de la presse traditionnelle. En 2024, il avait tenté de racheter Marianne au magnat Daniel Kretinsky. Cependant, suite à une enquête du Monde qui montrait ses liens avec le RN, l’hebdomadaire refuse la cession. « La rédaction reste déterminée à obtenir l’engagement ferme que le journal ne sera pas racheté par Pierre-Edouard Stérin ». Après un mois de grève, les deux milliardaires “ont décidé d’un commun accord de suspendre la cession de Marianne”, avait annoncé Daniel Kretinsky à l’AFP.
Après cet échec qui l’a entaché, Stérin tente sa chance du côté des réseaux sociaux. En 2023, il entre au capital du Crayon, un média qui entend donner la parole à tout le monde. Deux ans plus tard, Pierre-Édouard Stérin « a cédé l’entièreté de sa participation qui s’élevait à 3,9 % » suite à l’invitation de figures très controversées comme le suprémaciste Julien Rochedy. En 2025, il se tourne vers le compte Cerfia, actif essentiellement sur X (ex-Twitter). D’après La Lettre, le nouveau responsable du média, Benjamin Fayet, aurait donné de nouvelles consignes : vanter les conversions au catholicisme, valoriser les bonnes audiences de Cyril Hanouna, ne pas relayer d’informations de L’Humanité. Stérin figure aussi au capital de Néo, média numérique qui s’adresse principalement aux jeunes et dont l’équipe se compose de nombreuses personnalités de droite dont Sami Biasoni, essayiste opposé au wokisme.
“Nous ne voulons pas que notre école soit un terrain de lutte idéologique”
Stérin, via le fonds John Henry Newman, tente aussi de s'attaquer à l’information à la source. Ainsi, il était l’un des mécènes de l’Université Catholique de l’Ouest à Angers, qui propose une formation de journalisme. Jusqu’en septembre, il finançait à hauteur de 250 000 euros l’établissement. C’est après que Disclose, La Topette et Reflets ont révélé les liens financiers secrets entre l’établissement et le milliardaire que les liens ont été coupés. Une grande mobilisation des étudiants en journalisme et en science politique étant à l’origine de pression sur la direction, après plusieurs choix d’enseignants très critiqués et proches de Stérin comme Pierre-Hugues Barré, condamné pour incitation à la haine et nommé directeur du master en droit public de l’Uco.
Par ailleurs, le milliardaire finance, via le Fonds du Bien Commun, l’Institut libre du journalisme, pépinière des médias d’extrême droite et branche de l’Institut de formation politique créé par Alexandre Pesey qui entretiendrait des liens étroits avec Stérin et le projet Périclès. Selon Le Monde, 45% des étudiants passés par l’institut entre 2018 et 2024 ont été recrutés par des groupes affiliés à l’extrême droite, comme Vivendi. L’Ecole supérieure de journalisme de Paris figure elle aussi dans la sphère Stérin. Bien que sur le papier, il ne soit pas impliqué dans le rachat et la nouvelle politique de la plus vieille école de journalisme du monde, son ombre y plane. En effet, son allié de longue date Alban du Rostu avait été pressenti pour devenir “directeur de la stratégie et du développement”. C’est finalement Alexandre Pesey qui occupe cette position. Pierre-Edouard Stérin essaie donc de placer plusieurs de ses relations proches à des postes stratégiques dans la formation même de ceux qui fabriquent l’information.