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Billet de blog 5 décembre 2025

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La diplomatie du panda ou comment la Chine exerce son soft power

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

 Depuis le troisième siècle, le panda est un symbole de paix dans l’empire du Milieu. Au septième siècle, l'impératrice Wu Zetian offre deux de ces animaux à l’empereur du Japon en guise d’amitié. Et c’est en 1949, sous l’impulsion de Mao Zedong, que la pratique prend le nom de “diplomatie du panda” et devient de plus en plus récurrente.

Entre 1957 et 1982, neuf pays ont reçu en cadeau ce trésor national. Son succès le plus important étant la reprise des relations entre les Etats-Unis et la République populaire. En 1972, alors que Richard Nixon est en visite à Pékin, la Chine offre deux pandas au zoo de Washington. 25 ans de rupture diplomatique ont alors pris fin. L’efficacité de la diplomatie du panda se retrouve dans une observation simple : aucun pays ne refuserait le cadeau d’un trésor national. Le régime communiste n’a essuyé que très peu de refus, le dernier en date étant celui de Taïwan, avec qui les relations sont coupées depuis l’exil des nationalistes sur l’île. 

Un rapport de force insidieux et des intérêts purement pragmatiques 

Depuis 1984, la Chine a fait marche arrière sur sa politique de don, et s’adonne désormais aux prêts de ces animaux en danger. La République populaire propose désormais des baux de dix et surtout impose des conditions aux hôtes des ursidés. Le régime s’assure contractuellement que les pandas soient bien traités et envoie régulièrement des soigneurs chinois après des naissances, comme au zoo de Beauval en 2017. Par ailleurs, les pandas se nourrissent de 30kg de bambou par jour et celui-ci doit provenir exclusivement d’entreprises chinoises spécialisées. Il est clair que la Chine, par ces conditions et la possibilité de retirer les animaux des pays les accueillant, exerce une forme de chantage. La Chine considère que la moindre contestation des contraintes qu’elle impose est une remise en cause des liens diplomatiques. 

Pour accentuer la pression liée à ces animaux, le régime communiste tend à surinterpréter les évènements notables autours de ces ursidés. Par exemple, en 2005, Robert Zoellick, secrétaire d'État adjoint américain a été pris en photo en train d'embrasser un bébé panda durant sa visite au Sichuan. Les médias chinois ont alors récupéré l’information et considéré que ce geste prouvait les excellentes relations entre les deux puissances. A noter aussi que les premières dames des pays hôtes deviennent automatiquement les marraines de ces symboles nationaux. 

Vers une fin de la diplomatie du panda en France ? 

Les premiers pandas ayant foulé le sol français sont arrivés en 1973, sous le mandat de Georges Pompidou. Le mâle, Yen Yen, s’éteindra 27 ans plus tard au zoo de Vincennes. En 2012, un nouveau couple est prêté à la France. Ce prêt intervient pour apaiser les tensions entre les deux pays suite à la visite de Carla-Bruni, alors première dame, avec le Dalaï Lama. Plusieurs petits naissent au zoo de Beauval et en 2023, le premier s’envole pour la Chine. 

En visite en Chine, Emmanuel Macron a annoncé que d’autres pandas arriveraient “au plus tard en 2027”, pour remplacer le couple présent depuis 2012. Néanmoins, sa visite à Pékin pourrait être déterminante pour la diplomatie du panda en France. Dans un contexte de dégradation des relations entre les deux pays, le président français tente d’imposer un rapport de force. Alors que la Chine participe à la production de drone russe pour la guerre en Ukraine et que la France cherche à équilibrer ses relations économiques avec le colosse, les contentieux pourraient encore s'accumuler. La Chine pourrait donc décider de rapatrier ses pandas en guise de punitions.

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