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Billet de blog 28 février 2018

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Mardi matin 26/02, la France a entendu le Premier Ministre établir un sombre constat de l’état actuel de la SNCF et de sa dette abyssale. De ce fait, il a doctement justifié une réforme au pas de course destinée à remédier à cette situation qui résulte de l’incapacité des différents gouvernements qui se sont succédés depuis 40 ans à prendre les bonnes décisions.

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Mais quel est le reproche fait à ces gouvernements ? D’avoir retardé l’échéance d’une reprise de la dette “abyssale” de la SNCF et d’avoir laissé en même temps continuer une lente mais constante dégradation des infrastructures ferroviaires.
C’est là que devient intéressant le remède préconisé par le rapport Spinetta : réformer.
Réformer, c’est pour ce rapport transformer l’établissement public industriel et commercial (EPIC) (en fait : trois EPIC) en société nationale à capitaux publics pour empêcher toute velléité de reconstituer à nouveau une dette insoutenable. De ce fait, il sera possible en même temps de mettre fin au statut si dispendieux des cheminots qui, dans l’inconscient d’un public prompt à s’en prendre à ceux qu’il prend pour des “nantis”, coûte cher au contribuable tout en favorisant fainérantise, petits profits injustifiés et syndicalisme jusqu’auboutiste.

Pour les béotiens que sont beaucoup d’entre les Français dits “moyens”, il n’est pas certain que le redressement économique apparaisse comme une conséquence directe d’un changement de statut. Il semblerait plus évident, en revanche, que le redressement économique de la SNCF aille de pair avec, d’une part, l’apurement de sa dette et, de l’autre, un changement de politique qui, jusqu’ici, à privilégié le tout TGV au détriment de la modernisation du réseau ferroviaire existant. Autrement dit, d’un changement de fléchage des investissements devenus inévitables vers des infrastructures qui profiteraient réellement au plus grand nombre des usagers d’un service qu’on prétend encore jusqu’ici “public”.

On peine à comprendre pourquoi on continue d’appliquer au service public en général (santé, transports… ) une logique comptable exigeant d’atteindre l’équilibre financier par l’économie. On serait bien surpris si, appliquant le même raisonnement, les mutuelles d’assurances décidaient demain de réduire drastiquement les garanties jusqu’ici offertes à leurs sociétaires, tout en maintenant au même niveau les primes qui permettent de financer ces garanties. Or, que font ces mutuelles ? Lorsque le remboursement des sinistres effectués risque de dépasser le montant des primes qui permettent de le financer, elles augmentent les primes, car le mutualisme, c’est la prise en charge commune des dommages subis par certains.

Que le ferroviaire devienne un marché comme un autre et s’ouvre à la concurrence, voilà la solution miracle qui va régler définitivement le problème de la SNCF. Exit le statut du cheminot, voilà la saine émulation entre compagnies privées qui vont miraculeusement concilier équilibre financier et obsession du service au public. On a vu ce que cela a donné avec le marché de la téléphonie et la grande qualité de service que sa libéralisation a entraîné. On a vu aussi en Angleterre ce que la libéralisation du ferroviaire voulue et instaurée par feue Margaret Thatcher a eu comme conséquences sur la sécurité… et le montant des subventions qui continuent à être versées par l’État britannique aux compagnies de chemin de fer anglaises privées : voir l’article paru dans la Tribune le 9 janvier 2017 https://www.latribune.fr/economie/union-europeenne/au-royaume-uni-la-privatisation-des-chemins-de-fer-deraille-628489.html

Comme toujours, en France, on appelle "réforme" le réajustement des droits acquis sur le niveau de ceux qui n'en disposent pas. Aujourd'hui, on va supprimer le statut des cheminots, comme on va demain supprimer les régimes de retraite dits "spéciaux", avant de remonter l'âge de départ en retraite de 62 à 65 ans, puis à 67 ans, comme en Allemagne.

Et après ? En effet, il n'est pas normal en Europe, qu'on octroie autant d'avantages dans certains pays comme la France (couverture santé, niveau élevé de retraites, etc) alors qu'en Hongrie, en Grèce, en Tchéquie, etc, les niveaux sociaux sont beaucoup plus bas, donc beaucoup plus compétitifs. Retraités Français, salariés Français, malades Français, vous n'avez qu'à bien vous tenir. Car vous êtes des nantis qui coûtez bien trop cher à l'économie hexagonale et empêchez par conséquent les entreprises de se montrer compétitives, donc de pouvoir embaucher et de créer ainsi la richesse nationale. Une richesse qui profite à tous, c'est bien connu.  

Autrefois, les mineurs avaient droit à un (petit) logement gratuit ou presque, à un approvisionnement gratuit en charbon de chauffage, voire même à une certaine quantité gratuite de pommes de terre. De même, les salariés d’EDF ont accès à des tarifs préférentiels d’électricité et les salariés de Peugeot à des véhicules à moindre prix. Mais que voilà de vilaines pratiques à la SNCF, qui, non contente d’offre un emploi à vie à ses cheminot, leur donne généreusment des billets gratuits ! Au nom de quoi, on se le demande !

En Alsace et Moselle, tous les salariés d’entreprises privées exerçant leurs activités dans les trois départements autrefois sous domination allemande, bénéficient encore aujourd’hui d’avantages liés à ce qu’on appelle le droit local : régime plus favorable de remboursements des soins, journées supplémentaires de congés payés, articles du droit du travail plus avantageux. Avantages indus, cela va de soi. Il y a cependant fort à parier que si le gouvernement se mêlait de vouloir y toucher, les mêmes qui, aujourd’hui se réjouissent de voir le statut de cheminot remis en cause, se lèverait avec la dernière indignation pour s’y opposer au nom des avantages acquis. Cohérence…

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