L’eau potable distribuée par le Grand Lyon provient à 88% du Rhône et plus précisément d’un champ captant (Crépieux-Charmy) situé en aval de la centrale nucléaire du Bugey[1]. Or les diverses pollutions qu'elle engendre mettent en péril la potabilité de l’eau.
La pollution thermique rend l’eau impropre à la consommation.
C’est pourquoi la réglementation a fixé une température maximale de distribution d’eau à ne pas dépasser (25°C) pour éviter la prolifération des bactéries pathogènes[2]. Pourtant EDF est autorisée à réchauffer l’eau du Rhône jusqu’à 26°C, c’est-à-dire au-delà de la température maximale fixée par la réglementation sanitaire. Et l’autorité de sûreté nucléaire (ASN) accorde même des dérogations à EDF pour dépasser cette limite en périodes chaudes.
Un cocktail de pollutions chimiques et radioactives contamine durablement l’eau du Rhône.
Les seuils réglementaires de concentration en polluants ne sont généralement pas dépassés mais d’une part ils sont exprimés en valeurs moyennes, ce qui autorise des pics de pollutions, et d’autre part, il n’y a aucun seuil en dessous duquel une pollution chimique ou radioactive serait sans effet sur la santé. La combinaison des pollutions (effet cocktail) est en outre un facteur aggravant. L’explosion des cas de cancers, annoncée récemment par les autorités médicales et les médias, devrait nous alerter sur ces pollutions systématiques autorisées.
Une évaporation massive de l’eau du Rhône qui n’est plus disponible pour l’approvisionnement en eau potable.
Pour le refroidissement des quatre réacteurs de la centrale nucléaire du Bugey EDF est autorisée à pomper dans le Rhône un débit maximum de 106 m3/s, valeur très proche du débit minimum moyen journalier historique (121 m3/s le 02/01/1990).
Une partie de l’eau pompée n’est pas restituée au fleuve : elle est évaporée par quatre tours de refroidissement bien visibles à côté des réacteurs. Ainsi 18 millions de m3 d’eau ont été soustraits au Rhône en 2021. C’est plus du quart de la consommation d’eau potable de l’agglomération lyonnaise issue du fleuve la même année (66 millions de m3).
A l’heure où la population est appelée à économiser l’eau, il serait opportun de s’interroger sur la pertinence d’un mode de production d’électricité qui en consomme des quantités considérables et qui pollue notablement celle qu’elle rejette dans la principale source d’alimentation en eau de l’agglomération.
Une pollution thermique massive dont les effets sur la température de l’eau du Rhône vont bien au-delà de ce que pourraient provoquer les émissions de gaz à effet de serre.
EDF sait parfaitement que la production d’électricité nucléaire met en péril l’eau du Rhône, ressource vitale pour plus de 2,3 millions de personnes qui dépendent du fleuve pour leur alimentation en eau potable et pour un nombre encore plus considérable d’organismes vivants qui en dépendent et dont nous dépendons. Une étude réalisée par l’entreprise, dont les principaux résultats ont été publiés en 2016, démontre que les centrales nucléaires refroidies par les eaux du Rhône sont responsables à 86% du réchauffement du fleuve[3]. Le réchauffement climatique, attribué à l’augmentation de la concentration en gaz à effet de serre de l’atmosphère, n’a qu’un effet très limité dans l’affaire.
Malgré la création d’un collectif de 200 élus qui se sont prononcés publiquement contre le projet de nouveaux réacteurs nucléaires au Bugey, de nombreux élus du Département de l’Ain et des communes proches de la centrale nucléaire, abreuvés par la « manne nucléaire », ne se soucient guère des dégâts.
Ils soutiennent en effet le projet d’EDF de poursuivre l’exploitation de quatre réacteurs ayant dépassé 40 ans et d’en construire deux nouveaux de type EPR2. Or ceux-ci seraient deux fois plus puissants que les deux réacteurs actuels équipés de tours de refroidissement, celles qui évaporent l’eau prélevée dans le Rhône. Leur puissance cumulée serait équivalente à celle des quatre réacteurs actuellement en fonctionnement. Et la pollution thermique de l’air et de l’eau à peine plus faible que celle des réacteurs existants, en contradiction flagrante avec l’objectif de réduire le réchauffement climatique.
[1] https://www.grandlyon.com/metropole/eau-et-assainissement
[2] Arrêté du 11 janvier 2007 relatif aux limites et références de qualité des eaux brutes et des eaux destinées à la consommation humaine mentionnées aux articles R. 1321-2, R. 1321-3, R. 1321-7 et R. 1321-38 du code de la santé publique : https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000000465574/
[3] Etude thermique du Rhône - EDF – Synthèse – mai 2016 : https://rhone-mediterranee.eaufrance.fr/sites/sierm/files/content/migrate_documents/EtudeThermiqueRhone-Plaquette-Mai2016.pdf