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Billet de blog 24 janvier 2018

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HOMMAGE ET LETTRE D'ADIEU AU REGRETTÉ PROVISEUR VINCENT BANAKEN

Je salue ici la mémoire d'un brillant et valeureux éducateur du 20ème siècle camerounais. Monsieur VINCENT BANAKEN.

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Hommage et Lettre d’Adieu  au Regretté  Proviseur Vincent Banaken


Par le Professeur Franklin Nyamsi

Agrégé de philosophie, Académie de Rouen

Docteur de l’Université Charles de Gaulle Lille-3

Ancien élève du Proviseur Vincent Banaken au Lycée de Yabassi-Cameroun

Cher Père,

Cher Maître Vénéré,

Cher Doyen, Cher Ami,

Voici que Dieu, L’Eternel Maître du temps, a décidé de t’inscrire, sans crier gare à nos modestes désirs, dans la dimension où tu vivras désormais en nos cœurs : celle des Immortels, qui survivent dans la mémoire de ceux qu’ils ont aimés et qui les aiment, dans la mémoire de ceux qu’ils aiment et qui les aiment toujours. Te voici donc en marche vers le sein du Très-Haut. Te voici en marche vers l’Eglise spirituelle des humains qui ont aimé et que leurs survivants aiment ! Ceux dont le visage, ici-bas déjà, rayonnait merveilleusement de l’espérance de la Grâce Divine…

Du cœur de la très pluvieuse Normandie, me sont parvenus les pleurs douloureux du beau pays Banen qui te vit naître ; les pleurs lancinants du Littoral, du Centre, de tous les recoins du berceau de nos ancêtres, le Cameroun, où tu as semé des graines de valeur par ton amour de la science, ton amour des lettres, ton amour de la transmission du sens et du métier aux jeunes générations. Oui, Professeur, j’ai entendu sourdre dans mes entrailles, l’un de tes dictons latins préférés d’autrefois, quand je fis ta connaissance au Lycée Municipal de Yabassi :

« Alea jacta est. »

« Le sort est jeté ».

         Amoureux de Cicéron et de Plutarque, lecteur et traducteur des Grecs et des Romains lettrés, tu sus nous donner le goût sublime des choses de l’esprit. Sans forcer ton talent, ton élocution et ta diction modèles enseignaient par l’exemple !

De trois formidables manières, je t’ai connu, Cher Maître.

Je t’ai connu d’abord, Vincent Banaken, comme Professeur et Proviseur. Ponctuel, droit dans tes bottes, le regard rigoureux et le port altier, avec une stature quasi spartiate,  tu incarnais la discipline au moindre de tes gestes. Tu incarnais le sens de l’ordre, de la beauté et de l’harmonie de l’éducation classique que tu avais reçue et que tu transmettais avec un véritable sens sacerdotal. Tu fus un grand administrateur scolaire du Cameroun. Et ta voix gutturale, ô Vincent Banaken,  rocailleuse même, à la Louis Armstrong, résonnera encore longtemps comme un jazz blues lancinant dans nos plus précieux souvenirs…

         M. Le Proviseur, Oh, il nous arriva de vous trouver fort sévère envers nous, de vitupérer et de marmonner dans les couloirs, de bougonner contre telle ou telle de vos sanctions individuelles ou collectives ! Mais, un rapide examen de conscience nous convainquait toujours, très vite, que votre droiture d’âme n’était que l’expression de votre bonté de cœur. Vous nous appreniez le dur métier de vivre et vous avez su nous faire comprendre au Lycée, que le succès, loin de ne dépendre que du seul génie, était d’abord le fruit de la persévérance dans l’union, la discipline et  l’effort réfléchi. Et Votre joie personnelle à chacun de nos succès était presque jubilatoire. Et nous apprîmes alors à vous aimer…

Cher Doyen,

         Je t’ai connu ensuite, Vincent Banaken, comme père de famille, veillant sur nous comme sur tes propres enfants,  longtemps après les heures de classe, à travers les quartiers de notre nkamoise ville de Yabassi. Gare à nous, si nous traînions tard à jouer au ballon dans la rue, aux heures où s’imposent les révisions, les douches et les prières du soir ! Gare à nous si nous nous mêlions aux bandes vénales des bars et aux grivoiseries du tout-venant, flânant dans les lieux sordides de la nuit ! Tu sortais de ta voiture, en tous temps et lieux de la ville, et tu nous remettais l’un après l’autre à l’ordre de l’Essentiel, ô Maître vénéré !  C’est ainsi que tu nous appris qu’on n’apprend pas seulement à l’école, mais en devenant de mieux en mieux le maître de soi-même. Que de générations tu auras formées ! Docteurs, Ingénieurs, Architectes, Entrepreneurs, Experts en tous domaines, Professeurs, Cadres de tous métiers, filles et fils de ce pays, de toutes extractions ethniques, religieuses, territoriales, furent pétris dans tes mains d’Educateur hors-pair et d’administrateur exemplaire ! Que leur gratitude infinie, en cette solennelle et sépulcrale circonstance, accompagne ta barque destinale !

Cher Ami,

Oui, je dis à présent Cher Ami Vincent Banaken, car c’est ce que je devins pour toi, quand tu retrouvas près de vingt ans plus tard mes traces par l’entremise de ta merveilleuse fille, l’excellente lettrée Hildegarde Banaken, aujourd’hui épouse Nkodo. Que tu étais fier de moi, découvrant que par monts et vaux, j’avais accompli l’ambition à laquelle tu m’assignas quand j’étais Rédacteur en Chef du Journal du Lycée ! Un jour de terminale, en 1989, après avoir lu un de mes éditoriaux sur les murs de presse du Lycée,  tu m’as appelé, tout en joie,  et tu m’as dit à Yabassi : « Toi, tu seras, tu dois être un brillant professeur et un grand écrivain dans ce pays et dans ce monde. Ta vocation sera de penser, d’enseigner, d’écrire et de servir tes semblables. Va, mon fils !», avais-tu dit ! Quelle force ton Verbe de vérité avait ! Tu étais peut-être loin de le soupçonner. Tu disais sous l’inspiration de ta foi ferme. Tu disais ce qui devait être ! Quand je t’ai retrouvé, nous ne nous sommes plus jamais quittés. Les débuts et fin d’années étaient nos moments de retrouvailles. Et toujours, ta fierté et ton affection faisaient effusion avec ma reconnaissance et ma gratitude éternelles. Et tu emportes ce jour, bien des secrets de nos conversations que je ne confierai qu’à ma conscience !

         C’est ainsi que tu as été pour moi. Mais je ne doute pas un seul instant que c’est avec autant d’exemplarité et d’amour que tu as été le père de tes enfants biologiques, l’époux de ta défunte et formidable femme que tu rejoins, l’ami de tous ceux qui cultivent les vertus de l’honneur, du travail, de la discipline et de la fraternité humaine !

         C’est ainsi que tu as été pour tous tes fils et filles spirituels qui aujourd’hui te pleurent d’amour.

         C’est ainsi que tu as été pour et dans notre Cameroun bien-aimé qui a eu et aura toujours l’honneur d’avoir abrité une âme de valeur comme la tienne. Tu as été un Grand Camerounais !

Pour nous, qui comme toi croyons que la Vie est un don de Dieu, la mort est une nouvelle naissance. L’Adieu est un retour à Dieu. Nous gémissons donc dans l’espérance.

Fraternelles et chaleureuses condoléances à tes enfants, petits-enfants, frères et sœurs de chair et d’esprit !

Qu’unis dans l’amour et l’espérance, nous te disions ensemble :

A-Dieu Cher Père !

A-Dieu Cher Maître Vénéré,

A-Dieu Cher Doyen et Ami !

De ton âme, qu’il soit dit dans les mondes célestes, jusqu’à ton arrivée à bon port, Cher Vincent Banaken :

« Fluctuat nec mergitur ! »

« Il est ballotté par les flots, mais ne sombre pas ! »

Dieu soit loué ! Qu’il demeure vivant, notre Maître ! A Jamais.

Rouen, Haute-Normandie, le 24 janvier 2018.

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