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Docteur en Philosophie, Ecrivain, Intellectuel engagé pour l'Etat de droit en l'Afrique et la réforme équitable des relations internationales

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Billet de blog 26 décembre 2021

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L'Afrique et l'Europe de l'Est sont-elles au coeur de la négociation eurasiatique?

Manifestement, la sortie des 17 pays européens sur le Mali et le lâchage de lest apparent de l'Occident sur l'Ukraine en Europe de l'Est ne semblent pas être deux événements concomitants par pur hasard. Nous interrogeons le deal géopolitique eurasiatique, à haute voix.

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L'Afrique et l'Europe de l'Est sont-elles au coeur de la négociation eurasiatique? (Note d'analyse géopolitique pour large diffusion)

La récente montée en première ligne de la coalition occidentale revendiquant la bande sahélo-sahélienne comme étant "la zone d'influence occidentale" a amené les experts des services de communication de la résistance africaine à poser la question suivante: les Occidentaux espèrent-ils dealer l'abandon de l'Europe de l'Est à la Russie contre l'abandon de l'Afrique à l'Occident?

Cette question s'impose au regard de deux indices. Le premier est historique, c'est le partage de l'Afrique à Berlin, de 1884 à 1885 par les mêmes puissances de la coalition occidentale qui ont se sont appropriées par un acte de violence barbare les terres et les personnes d'Afrique pendant plus de 100 ans. L'habitude est une seconde nature. Le second indice est perceptible dans le discours des puissances occidentales. En effet, après des mois et des années de montée en pression, celles-ci semblent, les USA en tête, accepter enfin de donner des garanties de sécurité à la Russie, en renonçant à intégrer notamment l'Ukraine dans l'OTAN, ligne rouge tracée par la Russie qui s'oppose à l'élargissement de l'OTAN vers l'Est, c'est à dire vers les anciennes républiques de l'URSS. Est-ce un hasard si au même moment, les puissances occidentales se liguent à 17 autour de la France pour exiger de la Russie qu'elle se retire du Sahel, comme en contrepartie de leur lâchage de lest à l'Ouest de la Russie?

Il semble cependant que cette traditionnelle contrepartie géopolitique exigée par l'Occident aux autres grandes puissances ne tiendra plus. L'Afrique ne servira plus de monnaie d'échange dans les deals eurasiatiques, pour au moins trois raisons. Premièrement, la croissance démographique africaine et les aspirations des jeunes populations du continent sont des forces irrépressibles contre les arrangements néocolonialistes. Les jeunes africains aspirent à la liberté politique, à la prospérité économique et à l'enracinement dans leur propre civilisation, afin de mériter de la pleine dignité anthropologique. Les régimes politiques qui se mettront en travers des aspirations populaires africaines seront balayés.

Deuxièmement, la Russie et la Chine, qui ont bien compris la doctrine hégémoniste occidentale, savent que laisser les faramineuses richesses de l'Afrique sous le seul appétit de l'Occident, c'est perdre d'avance le grand duel eurasiatique, comme l'a magistralement démontré Zbigniew Brzezinski dans son ouvrage majeur, "The Grand Chessboard".

Enfin, les puissances non-occidentales, au rang desquelles les futurs Etats-Unis d'Afrique Noire, ne veulent plus d'un monde dominé par une seule puissance, mais d'un monde équilibré par le multilatéralisme des puissances. La Russie, la Chine, L'Inde, la Turquie, le Brésil, l'Afrique du Sud ou le Nigéria, veulent voir l'Afrique au Conseil Permanent de Sécurité de l'ONU, car leur propre indépendance géopolitique dépend de ce multilatéralisme inclusif et consensuel, fondement d'une véritable diplomatie mondiale équitable au 21ème siècle.

En conclusion, il sera difficile, voire impossible en ce 21ème siècle, devant l'éveil africain et le multilatéralisme des puissances du monde, de faire de l'Afrique comme on le fit au 19ème siècle, la monnaie d'échange involontaire et instrumentale des grands deals eurasiatiques.

Bamako-Bangui, le 26 décembre 2021.

Note d'analyse stratégique des SRA le 26 décembre 2021

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