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Billet de blog 25 septembre 2011

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Rééquilibrer le partage de la valeur ajoutée

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Ré-équilibrer la répartition de la valeur ajoutée.

Devant la crise actuelle, que peut apporter l’analyse de la valeur ajoutée ? Quelles actions possibles pour ré-équilibrer la répartition de la richesse. Après des précisions sur cette notion, le rapport de Jean Philippe Cotis (au Président de la République en 2009) servira de base pour préconiser les mesures nécessaires.

Partant du principe que l’égalité est une valeur majeure de nos sociétés (contrairement à une large frange de la population américaine), voir comment la richesse (matérielle) se crée permet de savoir comment la maintenir à défaut de vouloir la faire progresser au bénéfice des salariés.

Selon la comptabilité nationale, la valeur ajoutée brute est un agrégat calculant la production de la richesse des entreprises, administrations, institutions et ménages. Voisin du PIB, elle est répartie entre les salariés et les non salariés. Cette seconde partie comprend le solde fiscal (impôts sur la production moins les subventions), le revenu mixte des entrepreneurs individuels et l’excédent brut d’exploitation. Ce dernier agrégat est lui-même décomposé en revenus attribués aux financiers et actionnaires (dividentes et intérêts), l’impôt sur les sociétés et l’autofinancement.

En examinant ces agrégats de 1990 à 2007 ou 2009, force est de constater une stabilité de certains ratios :

- De 57,4 % à 58,4 % pour la part de VA rémunérant les salariés

- Légère progression de l’EBE : de 30,0 en 1993 à 31,1 en 2009.

La répartition de cet EBE est marquée par la progression des revenus distribués aux propriétaires du capital (de 14,57% en 1990, à 25,61 % en 2007) au détriment de l’autofinancement (à 49,23 % en 1990, à 40,57 % en 2007).

Durant la période (de 1990 à 2007), l’autofinancement a progressé de 63 %, les revenus salariaux de 83,31 %, les revenus des capitaux de 111,22 %.

De ces rapports grossiers, une explication facile de la crise : les entreprises s’autofinancent moins et les dividentes progressent. Les règles fiscales sont mal adaptées pour contrecarrer cette tendance. Dans la période de 1990 à 2007, l’IS a certes augmenté (de 10,72 % de l’EBE à 14,51 %), mais il ne remplit pas sa fonction de modérateur pour favoriser la progression (ou même le maintien) de l’autofinancement ou l’épargne. La dégradation du revenu mixte brut (des entrepreneurs individuels), passant de 9,6 % à 6,9 %, accentue aussi cette crise.

Affinons l’analyse comme l’a fait le rapport de Cotis. En analysant exclusivement la valeur ajoutée des entreprises non financières, il constate entre autres

- Une croissance extrêmement faible des salaires depuis 20 ans qu’il explique en partie par une protection sociale plus importante (constat contestable car les cotisations sociales sont passées de 15,9 % à 15,4 % de 1990 à 2007)

- La montée de l’emploi précaire

- La progression des dividentes associée à une baisse de l’autofinancement des investissements.

Rajoutons donc des mesures fiscales pour contrer la montée de l’emploi précaire.

Il n’y a donc pas de préconisations pour ré-équilibrer directement la part de la valeur ajoutée rémunérant les salariés. En se limitant aux sociétés non financières, elle est de 67 % en 2007. Ayant peu variée depuis 1990 (66%), faut-il accepter ce partage ou afficher comme le fait Pierre Larrouturou (dans ‘Pour éviter le krach ultime’) le désir de l’augmenter de 10 points (pour retrouver le niveau point haut de 1982) ? Il faudrait au minimum le conserver le niveau actuel et éviter qu’il ne se dégrade comme en Allemagne. Les comparaisons internationales ne permettent aucune conclusion dans un sens ou dans l’autre (rapport de Jean Philippe Cotis). Avis aussi donc à ceux qui veulent le dégrader en réduisant la protection sociale.

Toutefois, si la part des dividentes est diminuée, quel est l’impact exactement ? Va-t-on le mettre dans l’autofinancement ou donner une partie aux salariés ? De quel montant s’agit-il ?

Dix points de l’excédent brut d’exploitation fait en 2007 54,45 milliards d’Euros. Même s’il est difficile de les récupérer immédiatement et en totalité, cela fait une somme conséquente pour financer les entreprises ou rémunérer les salariés, en gros relancer l’économie réelle.

Cette action est aussi préconisée par Xavier Timbaud (OFCE) en 2009. Il donne 4 scénarios dont il retient le dernier. C’est celui d’une compensation du coût salarial supplémentaire par une diminution des dividentes.

C’est le seul scénario vertueux. Qu’Il induise ou pas directement un transfert de richesse des riches vers les pauvres en maintenant ou pas l’EBE, soit une plus grande part du profit reste dans l’entreprise, soit les salariés ont plus les moyens de consommer, de toute façon, l’activité économique est favorisée. C’est donc un mécanisme fiscal à créer. De même, similairement il convient de favoriser le maintien du revenu mixte brut et inciter ainsi à la création d’entreprise.

L’analyse de Rémy Prudhomme (Debat&Co le 5 mars 2009) va dans le même sens. Plus précise, elle justifie une réduction des dividentes en comparant la croissance du ratio dividente sur capital avec celle du taux horaire. Dans la période 1993 à 2006, « le dividente sur capital a cru à un taux de 4,5 % par an bien plus que le taux horaire (1,8 %)... Cela n’a pas grand-chose à voir , contrairement à ce qui se dit souvent, avec l’évolution de la part des salaires dans le PIB ».

Ces analyses et études restent partielles et incomplètes car la richesse dépend du contexte international, et notamment de la monnaie. Selon le taux de change, la richesse fluctue. De même, le taux d’inflation fait varier la richesse patrimoniale. Mais ces variations s’imposent à tous, sans grande influence sur l’évolution de l’égalité. (Par certains côtés, l’inflation pénalise plus les possédants que les prolétaires).

Par contre, l’absence de chiffres sur les rentes des financiers ou les gains spéculatifs constitue une grave lacune à l’analyse de l’évolution des inégalités et la répartition des richesses. Si le profit des entreprises financières est pompé des entreprises non financières, il n’est pas possible de dire que l’évolution soit à corriger car la valeur ajoutée des entreprises financières se réduit (de 6% en 1991 à 4,7 % en 2009).

Rajoutons, qu’intuitivement, la mesure qui contrecarre les investissements financiers au profit des investissements dans l’économie réelle reste très pertinente et pourrait suffire à la société non financière à conserver une plus grande part du profit. Sans influer directement sur la répartition de la richesse, c’est de la définanciarisation qu’il s’agit encore.

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