Chers amis,
je pensais commémorer l'abolition de l'esclavage en vous parlant d'un chic type, acteur américain engagé dans le combat pour les Drois Civiques, Pernell Roberts. Je décale de quelques jours à cause de quelqu'un de beaucoup moins sympathique : Christine Boutin.
Je crois qu'il faut dire à un certain moment, que trop, c'est trop; et nous intériorisons un peu trop, depuis six mois, le fait que certains ont droit à l'insulte, et que d'autres ont à l'encaisser. Je prends donc une petite initiative citoyenne qui a au moins pour vertu de sortir de l'acceptation.
Je vous soumets mon texte :
Lettre ouverte à Monsieur François Hollande, Président de la République, Madame Christiane Taubira, Garde des Sceaux, à Monsieur Manuel Valls, Ministre de l'Intérieur.
Monsieur le Président,
vous n'ignorez pas que Mme Christine Boutin, ancienne députée de la République et ancienne Ministre, a tenu sur twitter des propos scandaleux concernant la double mastectomie subie par une actrice américaine à des fins de prévention d'un cancer du sein, qu'elle a attribuée à une volonté supposée de ressembler à un homme. Un objectif, pour Mme Boutin : lutter contre une théorie du genre qui saperait les fondements de notre civilisation en niant la différence des sexes.
C'est le même objectif que poursuit le mouvement contre le mariage pour tous, qui nous fait connaître depuis six mois l'ostracisme pour tous, l'insulte pour tous.
Pendant ces six mois, j'ai personnellement été insultée trois fois : dans mon amitié pour des couples homosexuels et des familles homoparentales, dans mon statut de mère adoptive de deux enfants, dans ma situation de femme atteinte d'un cancer du sein, et qui aura peut être un jour à prendre la douloureuse décision brocardée par Mme Boutin. C'est trois fois de trop. Et pour un nombre considérable de nos concitoyens, c'est dix fois, cent fois, mille fois de trop; et ce, à cause de leur orientation sexuelle (je pense particulièrement aux plus jeunes d'entre eux), de leur situation familiale, et à présent de leur état de santé. C'est insupportable. On ne peut pas vivre dans l'insulte : elle mine le quotidien, dévore l'énergie, affaiblit face aux combats, met en danger les plus fragiles.
Le climat odieux que certains se croient autorisés à instaurer au nom de leurs convictions ne peut plus durer. J'appelle tous les hommes et femmes de bonne volonté à soutenir l'appel que je vous adresse, Monsieur le Président : il faut que vous mettiez toute votre autorité dans la balance pour que cessent des dérives inacceptables. A votre demande, Madame la Garde des Sceaux et Monsieur le Ministre de l'Intérieur doivent faire toutes les interventions et prendre toutes les mesures possibles pour que chacun, dans notre pays puisse vivre, comme il en a le droit, un quotidien paisible, dans la dignité.
Certaine que ma demande ne restera pas sans écho, je vous prie de croire, Monsieur le Président, à mes sentiments profondément respectueux et républicains.
Voilà. Je vous demande de signer ma pétition :
http://www.petitions24.net/6_mois_dinsultes__cela_suffit
et je vais faire la tournée des popotes pour demander à ceux d'entre vous dont j'apprécie la plume (et les convictions) d'aider à sa diffusion. Nous y gagnerons tous au moins de sortir de la résignation.
A bientôt.
P.S. du vendredi 17 mai au soir : le Conseil Constitutionnel vient de valider la loi Taubira, qui sera promulguée demain. Je me sens mieux : tout cet affreux monde va rentrer chez lui.
Je clôture ma pétition. Un détail m'attendrit : elle ne porte que deux signatures, la mienne, et celle de mon mari. Cette nuit, je crois que je vais bien dormir.