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Billet de blog 16 septembre 2008

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Le Mexique fête son indépendance dans le sang

« Viva Mexico ! » C’est le cri lancé chaque année, le soir du 15 septembre, par le chef de l’Etat mexicain à l’occasion de l’anniversaire de l’indépendance en 1810. Lundi, la cérémonie d’ordinaire festive a tourné au drame, concentrant les maux d’un pays, victime à la fois de l’instabilité politique et de violences sans précédent.

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« Viva Mexico ! » C’est le cri lancé chaque année, le soir du 15 septembre, par le chef de l’Etat mexicain à l’occasion de l’anniversaire de l’indépendance en 1810. Lundi, la cérémonie d’ordinaire festive a tourné au drame, concentrant les maux d’un pays, victime à la fois de l’instabilité politique et de violences sans précédent.

Vers minuit à Morelia (Ouest), l'explosion de deux bombes a fait sept morts et plus de 108 blessés au centre de cette ville de l'Etat de Michoacan, où se pressaient les habitants pour voir le feu d'artifices. « Un acte terroriste », a affirmé le gouverneur de l'Etat qui soupçonne le crime organisé d’en être l’auteur. Une vague de violences d’une ampleur inédite frappe le Mexique depuis qu’en décembre 2006 le Président Felipe Calderon a déclaré la guerre aux cartels de la drogue. Avec 40 000 militaires déployés sur le territoire, cette lutte frontale a fait plus de 3000 morts dans les huit premiers mois de 2008. Sans compter le boom des enlèvements contre rançon qui a conduit, le 30 août dernier, des centaines de milliers de Mexicains à manifester dans 70 villes du pays pour dénoncer la recrudescence des crimes.

Symptôme de ce climat d’insécurité, l’attentat de lundi a été précédé à Mexico d’une cérémonie sans incident mais pour le moins ambigüe. La foule réunie dans la soirée d’hier sur la place principale de la capitale a vu défiler à la tribune, non pas un, mais deux présidents, vêtus de la même écharpe tricolore (vert, blanc, rouge). Depuis son élection litigieuse en juillet 2006, le chef officiel de l’Etat, Felipe Calderon, du Parti de droite Action nationale (PAN), fait face à la fronde de la gauche qui dénonce une fraude électorale. Les militants de l’opposition avaient nommé dans la foulée leur « président légitime », Manuel Lopez Obrador, candidat malheureux du Parti de la Révolution Démocratique (PRD). Lundi soir, chacun a lancé son « cri de l’indépendance » à quelques heures d’intervalle sous les applaudissements ou les sifflets des sympathisants des deux camps.

Meurtrière à Morelia, confuse à Mexico, la célébration habituellement fédératrice, commémorant la lutte contre le colonisateur espagnol, révèle les divisions au sein d’un pays, fragilisé par la méfiance envers les institutions politiques et la puissance du crime organisé. Felipe Calderon, lui-même originaire de Morelia, a déclaré immédiatement vouloir «redoubler d'efforts pour éliminer la criminalité et la violence». André Breton qualifiait le Mexique de pays surréaliste par excellence. Une réflexion sans doute plus vraie et dramatique que jamais.

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