Le pianiste Nikolai Lugansky donne un concert ce soir au Théâtre des Champs Elysées. La chance de passer la semaine en sa compagnie.
26 avril 1972. Léonid Brejnev domine au Kremlin, mais Boris Spassky règne sur le jeu d’échecs et Nikolai Lugansky naît à Moscou. « Mes parents n'étaient pas des musiciens professionnels mais, bien sûr, ils aimaient la musique: ils se sont rencontrés à Moscou pendant un concert, à l’opéra, se souvient l’artiste. Un jour- je devais avoir cinq ans- mon père m’a offert un piano-jouet d’un octave et demi. Quand il a commencé à interpréter sur ce minuscule objet quelque mélodie soviétique populaire, je lui ai signalé des fausses notes et cette remarque lui a fait prendre conscience que j’avais l’oreille absolue ». Mais les premiers grands souvenirs musicaux de Nikolai proviennent de deux disques achetés par sa mère : un Beethoven par Maria Grinberg, un Chopin par Bella Davidovitch. Ainsi se construit, parfois, le parcours d’un musicien d’excellence : une écoute attentive, un élan sensitif, encouragés par une société qui place la musique au premier rang.
« Mon père m’a révélé l’intérêt de la lecture des partitions et, aussitôt, je me suis passionné pour cet exercice, au point que je préférais décrypter la forêt des mesures et des notes que de lire des contes et romans, glisse avec modestie Nikolai Lugansky. Le solfège est une fenêtre ouverte sur l’œuvre, mais en même temps nous devons dire la vérité : bien des choses nous échappent ». Quand on lui demande s'il établit un parallèle entre cette aventure et l'analyse d'une partie d'échecs, un sport auquel il s'adonne volontiers, le soliste corrige: la musique s'apparente à la transcendance quand le jeu des combinaisons ne parvient qu'à divertir.
Interrogé sur la virtuosité, Nikolai Lugansky reconnaît, comme la plupart de ses confrères, qu'il n’est pas suffisant de savoir tout jouer, ou presque, les yeux fermés, pour atteindre le sommet:« je dois souvent patienter, relire la partition pour le plaisir d’entendre les sons se chevaucher dans mon esprit. La musique est l’art de l’inexplicable, des grands sentiments qui vous emportent au loin. S’il existe un idéal sonore auquel je tente d’accéder, je sais que le concert n’est pas un moment de planification ». Le barman apporte un café-noisette, au loin se devine l’hiver.
A suivre…
A noter :
Nikolai Lugansky en concert
lundi 11 février, au Théâtre des Champs Elysées à 20 Heures.
15 avenue Montaigne 75008 PARIS