Abattement, désolation... Comment ne pas dire toute la tendresse qu'inspirait ce musicien généreux? Souvenirs si nombreux, qui sans doute envahissent le cœur des mélomanes et laissent bien malheureux ceux auxquels on ne peut s'empêcher de penser...Quelle tristesse...De Didier Lockwood on peut retenir l'audace d'avoir repris le flambeau mélodique, alors que nul n'osait s'aventurer dans les pas de Grappelli, l'éclectisme - il suffit de se rappeler la diversité des grands artistes qui lui avaient rendu l'hommage qu'il méritait, pour ses trente ans de carrière, à l'Olympia- l'énergie, l'optimisme enfin. La musique était, sous les doigts de son inspiration, source de joie.
Le public ne s'y trompait pas, qui n'applaudissait pas seulement sa technique, mais son incroyable capacité à dispenser de la bonne humeur. On se rappelle la toute première rencontre, dans les coulisses de la salle Pleyel, au début de l'année 1993. Il était un jeune amoureux, discutait sans détour avec tel ou tel. Didier semblait vous adopter tout de go, parlait sans se hausser du col. Un beau soir d'été, fin de repas sur une petite île pour cruciverbiste, en 2009, il avait évoqué Gillespie; comme on lui demandait comment se comportait le bonhomme, il avait répondu dans un sourire espiègle: "c'était un type très simple, il n'avait pas fait le Conservatoire".
Didier Lockwood était le père de trois filles, il avait soutenu, stimulé de manière exigeante et précise l'envol de ses deux beaux-fils, David et Thomas. Tristesse...Ô tristesse partagée sans aucun doute...