Hier exactement, le compositeur et chef d'orchestre Witold Lutoslawski aurait eu cent ans- "s'il n'était pas mort en 1994", ajouterait monsieur de La Palice, qui n'en rate pas une.
Il était un fils de l'Empire, ici nous voulons désigner ce territoire à géométrie variable que les tsars aimaient contrôler d'une poigne de fer, à coup de massacres et de police politique. Elève d'un élève de Rimsky-Korsakov ( ah, bien entendu, les mauvais esprits pourrait se gausser, dire que c'est l'histoire de l'homme qui a vu l'homme et l'on en passe, mais alors à quoi servirait la jolie notion de tradition?) Witold Lutoslawki connut un début de carrière des plus classiques avant d'être contraint par la guerre à gagner sa vie dans les cafés.
Le stalinisme ayant imposé sa chape de plomb sur la grande plaine du Nord, notre homme a traversé le jdanovisme avec malice et difficulté, comme beaucoup de ses congénères. Ayant eu la chance de naître dans un pays où l'on pouvait publiquement comparer un général à quelque maladie médiévale et recevoir le petit ami de sa fille sans craindre un coup de piolet dans la tête, le billettiste se gardera de trop se moquer des accomodements des uns et des autres.
Pour l'heure, c'est avec plaisir que nous nous souvenons de ce musicien rayonnant, de cet homme de haute culture, emblème d'une époque où le savoir encyclopédique apparaissait aux artistes comme une respiration naturelle.