France info vient d'obtenir son master en aménagement touristique des zones sinistrées. Pour son oral de motivation, J.Benedetto, journaliste au sein du média d'état, avait invité le président d’un lobby du tourisme industriel a étudier la faisabilité de la transformation de la bande de Gaza en destination balnéaire. En sous-titre, offrir une nouvelle destination aux investisseurs. Classiquement, l'intervenant a dû commencer par recenser (1) les atouts du site : des plages de sable blond qui attendent patiemment qu’on vienne les défigurer (2), une situation idéale à un peu plus de 4 heures de vol de Paris et à peine 1 heure de Jérusalem, une fois que l'aéroport Y. Arafat sera reconstruit (une question Mr Bouygues ?), le climat méditerranéen et la température de l’eau qui permettent d'espérer une fréquentation tout au long de l'année propice à l’optimisation des investissements. Des sites internet ne s’y trompent pas, qui recensent déjà les périodes les plus favorables pour séjour à Gaza. Pour la basse saison, plus difficile à vendre, il faudra décrire le romantisme des couchers de soleil (Saint-Valentin), miser sur des spectacles historiques (inviter De Villiers pour la réécriture) et faire vivre un Halloween inoubliable avec les cagoules et les kalachnikovs restées sur place.
Certes, il y aura du ménage dans les décombres mais, délivrée des contraintes qui briment les entreprises, la reconstruction devrait s’avérer être facile. Casinos, palaces pour demi-mondains, restaurants aux chefs quinze étoiles, boutiques au luxe tapageur, aménagement de l’oobligatoire port de plaisance pour yachts démesurés, rien ne doit manquer. Dans un souci de diversification de la clientèle et pour accroître la rentabilité, une zone sera réservée à proximité afin d’y parquer des touristes plus modestes mais qu’attirent la plage, les influenceurs et les séances de selfies avec célébrités. Monsieur Bouygues, une autre question ?
Reste le problème de la population demeurée sur place. Une main d'oeuvre abondante, démunie et moins exigeante (3) que les privilégiés occidentaux qui représente en réalité un atout à condition que les investisseurs accceptent de sacrifier quelques hectares de terrain pour un camp de toile et peut-être plus tard, un bidonville afin de loger les futurs employés et les garder sous la main. Il ne devrait pas manquer d’investisseurs. Israéliens et américains first (à tout saigneurs, la part du lion), émiratis, qataris, voire occidentaux à condition qu’ils aient bien traité Trump et Netayanyahou, et des palestiniens, puisque comme le rappelle un célébre poète "Business first".
Devinette : combien de protestations scandalisées faudra-t-il entendre et pendant combien de temps avant qu’un soir d’hiver pluvieux, de retour d’un travail harassant, scrollant d’un doigt déprimé sur ton écran, tu succombes aux sirènes d'un séjour "all inclusive" à Gaza ? Faut dire qu’un séjour à la mer, à ce prix-là, dans un hôtel deux ou trois étoiles avec piscine (faut penser aux enfants !), un demi luxe propre à faire rêver la classe moyenne, c’est imbattable. Un peu honteux tout de même, tu feras taire ta mauvaise conscience en mobilisant une argumentation digne d’un jésuite. Au hasard ... témoigner ton soutien à la population en apportant dollars et euros, renforcer l’amitié entre les peuples au moyen de la découverte d’une culture étrangère avec marchésd’artisanatlocal et danses traditionnelles, de chouettes rencontres (4) avec des indigènes souriants et chaleureux malgré l’adversité et l’indispensable quartier libre pour l'achat de souvenirs, pendant lequel il faudra respecter les coutumes de ce peuple fier-rebelle-attaché à ses traditions- courageux (rayer les mentions inutiles ). En option et avec supplément, les amateurs de sensations fortes s’inscriront à une balade guidée en toute sécurité, au milieu des décombres et dans les souterrains spécialement préservés et entretenus à cet effet (5). Les années suivantes, le parachutisme ascensionnel devrait permettre de découvrir les sites où ont eu lieu les crimes de guerre en les survolant. Un séjour cinq étoiles sur Trip advisor.
(1) "Je l’ai pas lu, je l’ai pas vu mais j’en ai entendu causer" ...
(2) trop jeune pour mesurer combien la côte d’azur a été défigurée par les promoteurs immobiliers et leurs aménagements touristiques.
(3) Manquerait plus qu'ils fassent les difficiles.
(4) c'est beau comme du guide du routard
(5) un must au sud Vietnam.