Tout reporter lorsqu'il opère en territoire ennemi est conscient des risques qu'il prend, espérant néanmoins ne pas finir oublié de tous, dans un cul de basse fosse, accusé de colporter des fausses nouvelles. Si cela m'arrivait, mes seuls espoirs tiendraient dans la création d'un comité de soutien.
Après son passage sous les ors de la rue de Grenelle, ce n'est pas une image, madame Oudea-Castera, ambitionna d'occuper un poste plus élevé dans la hiérarchie ministérielle, la simple reconnaissance des capacités déployées à cette occasion. Les élections législatives surprises imposant un changement de premier ministre, elle ne voyait pas pas d'obstacle à ce qu'une ancienne ministre de l'éducation ne soit pas nommée première ministre, le chemin avait bien été récemment parcouru en sens inverse. Alors … Une raison plus prosaïque peut également expliquer cette ambition soudaine, le trajet entre l’école Saint Nicolas et l'hôtel de Matignon est direct avec la ligne 12 alors qu'il faut au moins un changement pour rallier le ministère des sports, avenue de France.
Les jeux olympiques lui fournissaient l'occasion d'obtenir une notoriété internationale. Il fallait d'abord qu’elle organise un événement capable de la propulse au premier plan sans toutefois que le président ait l'impression qu'elle veuille l’éclipser. Délicat … en ouvrant un tiroir oublié dans un bureau du ministère, elle remarqua une enveloppe sans doute oubliée qui portait l'inscription «à emporter le jour du départ ». A l'intérieur, 1,4 milliard d'euros en coupures de cent mille euros. Deux éléments firent alors naître l'idée qu'elle cherchait. Le premier s'imposa alors qu'elle révisait « Les très riches heures du président Macron », elle nota que ce dernier avait fait déposer une gerbe pour commémorer le massacre de Charonne par la préfecture de police. Quelques jours plus tard, alors que quelqu’un prononçait le mot « cène » pendant une réunion de préparation de la cérémonie d'ouverture, elle fit aussitôt le lien avec le massacre de manifestants algériens jetés à la Seine (*). Elle n'avait qu'à reprendre la méthode du Chef, une commémoration, un discours en l'adaptant, vu ses difficultés à l'oral. Elle devait utiliser son seul point fort, ses qualités sportives pour en imposer aux médias. Le deuxième, élément provenait de la reculade du président qui après avoir relevé le pari de la baignade ne cessait de trouver des prétextes pour se défiler. Un jour l'eau était trop froide, le lendemain elle était trop chaude ou encore l'excuse d'un emploi du temps trop chargé à cause de la flopée de ministres qui s'étaient mis à démissionner. Nul doute qu'il accueillerait avec reconnaissance qu'elle le remplace pour cette épreuve.
Cependant, fine mouche, elle sentait qu'il lui fallait mieux qu'une simple trempette, un symbole qui marquerait les imaginations. Lui revint alors de ses années maoïstes, l'image du président Mao traversant à la nage le Yang Tse Kiang, un message subliminal pour illustrer le grand bond en avant que connaîtrait la France si elle etait nommée à Matignon. Adepte du syncrétisme en politique, elle se remémora que le messie, pas Emmanuel, l'autre, avait impressionnait les esprits, aujourd'hui encore, pour avoir marché sur l'eau. C'est celà qu'elle devait faire. Le 1,4 milliard d'euros trouvé dans l'enveloppe servirait à désinfecter l'eau mais par prudence, au cas où elle tomberait à l'eau pendant la traversée, elle commanda un burkini (***) à la Samaritaine voisine, d'autant que Pinaut ne manquerait pas de lui faire un prix. Manque de chance, ce jour-là, le sol humide provoqua une glissade devant les objectifs ricanants de reporters. Le miracle était tombé à l'eau. Elle se contenta d'à afficher son sourire le plus niais et de barboter. Un naufrage supplémentaire qui s'ajoutait aux précédents, plus question qu'elle occupe le poste de première ministre. Le président Macron devait accepter l'evidence, la seule nomination envisageable était la sienne. Un duo de choc, Macron au 55 rue du faubourg saint Honoré et Emmanuel au 57 rue de Varenne. Symbole heureux, si les deux adresses qui ne sont séparées que par deux kilomètres, l'une se trouve sur la rive droite, l'autre sur la rive gauche, un retour aux sources du "en même temps" qui avait fait son élection.
(*) sa confusion avec le massacre du 17 octobre 1961 qui fit « au bas mot une centaine de morts » selon l'estimation de l'historien Fabrice Riceputi peut s'expliquer par une disposition naturelle à l' étourderie et aux lacunes en orthographe qui la caracterisent.
(**) du verbe procrastiner
(***) l'illustration d’une remarquable utilisation des symboles