Syrie: un double attentat en plein centre de Damas fait 14 morts
11 juin 2013 à 15:23
Photo fournie par l'agence officielle syrienne Sana de l'attentat commis le 11 juin 2013 à Damas (Photo AFP)
Par AFP
Un double attentat a visé mardi un commissariat au coeur de Damas faisant au moins 14 morts au moment où les forces gouvernementales lançaient des attaques contre les rebelles à Alep, deuxième ville du pays, que les autorités veulent reconquérir.
Amoindris par les récentes défaites sur le terrain, les rebelles doivent désormais se tourner vers Washington, qui examine une éventuelle aide à l’opposition syrienne.
Après quelques semaines de répit à Damas, une double attaque a visé dans la matinée un poste de police sur la place Marjeh, faisant, selon un bilan provisoire de la chaîne officielle Al-Ikhbariya, 14 morts et 31 blessés.
La télévision a montré des images de magasins éventrés, et de débris de verre jonchant le sol taché de sang dans ce quartier commerçant de la capitale.
L’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH) a avancé un bilan de 15 morts, pour la plupart des policiers. «Un homme s’est fait exploser dans le poste de police, une deuxième explosion s’est produite à l’extérieur», selon cette ONG basée en Grande-Bretagne.
«Que Dieu se venge de tous ceux qui sont en train de ruiner le pays», a lancé un témoin à la chaîne syrienne, déplorant «la mort d’innocents».
Parallèlement, les troupes du régime ont lancé des attaques contre des positions rebelles dans le nord de la province d’Alep (nord) et s’apprêtent à lancer une offensive majeure pour reprendre la région.Selon l’OSDH, les forces gouvernementales ont bombardé des secteurs de l’aéroport militaire de Mennegh que les rebelles ont en partie conquis lundi, en prenant position dans la tour radar.«Les rebelles contrôlent toujours d’importantes parties» de la base militaire de Mennegh, a précisé l’OSDH.
Il est probable que la bataille d’Alep commence soit dans les heures, soit dans les jours qui viennent», avait déclaré dimanche à l’AFP un responsable des services syriens de sécurité.
Les rebelles avaient lancé la bataille d’Alep il y a près d’un an et depuis, des combats et des bombardements quotidiens secouent la ville, ex-capitale économique de Syrie.
«Avec le début des opérations de l’armée sur plus d’un axe (à Alep) et sa progression remarquable, le moral des hommes armés et de leurs chefs est au plus bas. Leur but désormais est de se rendre en Turquie», base arrière de la rébellion, affirmait mardi le quotidien Al-Watan, proche du régime.
L’objectif du régime est d’attaquer les régions rurales à l’ouest et au nord d’Alep pour couper l’approvisionnement des rebelles dans cette région», explique Mohamed al-Khatib, un militant d’Alep avec qui l’AFP a pu parler via internet.
Ces opérations surviennent près d’une semaine après la chute de l’ex-bastion rebelle de Qusayr (centre-ouest), ville stratégique reprise par l’armée avec l’appui de combattants du Hezbollah chiite libanais.
Par ailleurs, sept roquettes tirées depuis la Syrie ont atteint la ville libanaise de Hermel, un des bastions du Hezbollah, sans faire de victime, selon une source de la Sécurité.Cette attaque est la dernière d’une série de tirs qui ont touché l’est du Liban, frontalier de la Syrie, depuis l’implication officielle de combattants du Hezbollah dans le conflit syrien.
Le président américain Barack Obama a demandé à son «équipe de sécurité nationale» «d’examiner toutes les options possibles qui nous permettraient de remplir nos objectifs pour aider l’opposition syrienne», a expliqué à l’AFP la porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche.
M. Obama est sous pression depuis des mois pour armer la rébellion syrienne. Il s’en est jusqu’à présent tenu à une aide non létale de 250 millions de dollars.
A Vienne, le ministère autrichien de la Défense a annoncé que les premiers casques bleus autrichiens quitteraient le plateau du Golan mercredi, confirmant la décision controversée du pays de se retirer de cette zone.
L’Autriche avait annoncé le 6 juin son intention de se retirer du plateau du Golan, une zone contact entre la Syrie et Israël, en raison de l’extension du conflit syrien qui mettait selon elle en danger la sécurité de ses troupes.
Remarque
J'ai intentionnellement pris les informations de "Libération" pour vous rendre sensibles à ce constant arrière fond de propagande persistant et pour complèter, je vais rajouter, en prime les analyse de deux experts, spécialistes dont les réflexions me paraissent hautement significatives de l'intelligence de la situation actuelle par certaines têtes pensantes
SYRIE Qui veut la division du pays ?
Deux experts ont disséqué pour le quotidien beyrouthin L’Orient-Le Jourles enjeux et les conséquences de l’éclatement du régime de Damas et ses retombées sur les pays les plus fragiles du Proche-Orient.
La menace est là. Fictive ou réelle, elle est désormais sur toutes les lèvres. Plusieurs dirigeants arabes, turcs et du reste du monde ont mis en garde contre l’éclatement de la Syrie où une guerre civile fait rage depuis plus de deux ans. Au Liban, le leader druze Walid Joumblatt a récemment dénoncé la politique du président Bachar El-Assad qui vise à diviser le pays. Auparavant, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a accusé les Occidentaux de vouloir la partition de la Syrie.
Pour Fabrice Balanche, maître de conférences à l’université Lyon 2 et membre du groupe de recherches et d’études sur la Méditerranée et le Moyen-Orient à la Maison de l’Orient, "la Syrie est aujourd’hui, de fait, divisée en trois zones : le Nord-Est dominé par les milices kurdes, le Nord globalement tenu par l’opposition arabe, la région côtière et le Sud entre les mains du régime. Ces lignes de front ne bougent pratiquement pas depuis une année. Les forces de Bachar El-Assad reprennent quelques territoires comme Qusayr [dans le nord du pays], la rébellion s’empare d’un aéroport militaire supplémentaire dans le Nord, mais dans l'ensemble nous avons une opposition Syrie du Nord contre Syrie du Sud qui s’installe dans le temps." Bien que la partition ne soit pas l’objectif des deux principaux belligérants, elle peut résulter de la défaite de l'un des deux camps sans que l’autre ne puisse totalement le vaincre. "Prenons le cas de l’effondrement éventuel du régime de Bachar El-Assad. Le président de la Syrie, sa famille et les hauts responsables peuvent espérer trouver refuge à l’étranger (Iran, Russie ou Amérique latine), mais qu’adviendra-t-il des cadres moyens de son régime et des centaines de milliers d’exécutants, agents des services de renseignements, soldats, paramilitaires et même les simples fonctionnaires, alaouites ou non, qui participent ou sont accusés de participer à la répression par les oppositions ?" se demande ainsi M. Balanche.
Pour sa part, le politologue libanais et enseignant à l’Université américaine de Paris Ziad Majed propose plusieurs scénarios, en examinant les positions des belligérants, le déroulement des combats, de même que la carte des massacres commis par les chabbiha du régime."D’abord le scénario A qu’Assad essaye de défendre jusqu’au bout : une survie politique et une participation à une transition politique en tant qu’acteur incontournable dans une Syrie qui reste unifiée. Ceci consiste à défendre le contrôle de Damas sans lequel ce scénario n’est ni possible ni sensé. Or le contrôle de Damas nécessite l’occupation par le feu de ses quartiers Sud et de ses banlieues rebelles, et le contrôle de l’accès direct à la capitale à partir du littoral, bastion du régime. Cet accès passant obligatoirement par Homs explique la violence des combats dans cette ville et alentour (et la participation du Hezbollah aux combats depuis juillet 2012). Il explique également certains massacres visant à vider des villages de cette même région de leurs populations sunnites. Pour le reste, l’important pour le régime est de rendre la vie impossible dans les autres régions "libérées". Assad veut également pousser une partie de la population à regretter l’ancienne stabilité." Toujours selon M. Majed, le scénario B, si Damas devient indéfendable ou si elle tombe, consiste à se replier vers le littoral (élargi) en "annexant" Homs et une partie du rif de Hama [deux villes sunnites proches du littoral habité majoritairement par les alaouites]. Assad devra se montrer capable de défendre une enclave ayant une bonne infrastructure et ayant les moyens d’autosuffisance économique. "Ceci suppose néanmoins que les alaouites suivent Assad et le maintiennent comme leader de leur "territoire", ce qui n’est pas à mon avis évident. Une grande partie d’entre eux se battent à ses côtés aujourd’hui par esprit de "assabiyya" [communautarisme] et avec la conviction de garder le pouvoir. En revanche, le fait de se battre en retrait pour une enclave qui leur était acquise et de mettre leurs villes et villages directement sous le feu me semble difficile à tenir sur le long terme sans que des tensions internes et des demandes de comptes n’émergent", explique le politologue libanais .Du côté de l’opposition – soutenant la lutte armée –, "il me semble qu’il y a un seul scénario : combattre jusqu’à la chute du régime.