Les mal-logés. La crise du logement inquiète les politiques, ils ont oublié la phrase du Président de 2017 : "d’ici à la fin de l’année, je ne veux plus personne dans les rues". Après la crise de la Covid-19 et l'inflation en cours, les mal-logés sont plus nombreux et plus fragilisés en 2022, d'après le 28e rapport sur le mal-logement de la fondation Abbé Pierre. Aujourd'hui, plus de 4,1 millions de personnes sont mal logées ou souffrent d’une absence de logement en France. De même, le nombre de ménages en attente d’un logement social a atteint 2,42 millions fin 2022, un niveau qui n’a jamais été aussi élevé, selon un communiqué de l’Union sociale pour l’habitat (USH) qui représente les bailleurs sociaux publics et privés.
Dans le secteur immobilier d'importants événements sont intervenus en 2022 : l'augmentation des taux de la Banque centrale européenne, la sortie de la pandémie, la crise de liquidité, l'incertitude sur l'avenir, la flambée des prix de l'énergie et des matières premières, l'alourdissement des coûts ou revenus locatifs, le décollage de la taxe foncière, le durcissement des conditions d’accès au prêt, la réforme du cautionnement, l'encadrement des loyers, le lancement de la plateforme France Rénov’ avec l'augmentation du stock de passoires thermique.
La hausse des taux : une grande inquiétude pour les logements sociaux. Pour lutter contre l'inflation la Banque centrale européenne relève ses taux directeurs. À chaque durcissement de la politique monétaire, le crédit immobilier devient plus cher et le taux de rémunération du livret A est augmenté. 60% des montants collectés par le livret A sont confiés, avec d'autres produits réglementés, à la caisse des dépôts et consignations (CDC). Cette caisse est tenue par la loi d'octroyer des prêts en priorité et pour des durées très longues au logement social. En 2022, avec une demande de plus d'un million de logements, uniquement moins de 100 000 logements ont été autorisés sur un objectif de 250 000 sur 2 ans.
La Cour des comptes met en garde la Caisse des Dépôts sur l'usage de l'argent du Livret A. Alors que le total de collecte du livret A et du livret de développement durable et solidaire a atteint 538,6 milliards à fin avril 2023, au lieu de mettre en chantier plus de logements sociaux, le gouvernement et les collectivités sont au centre des critiques : pas assez de permis de construire, manque de terrains, des normes qui varient rapidement et des mesures techniques. Avec des milliards d'euros en surplus, la Caisse des dépôts et consignations (CDC) va-t-elle financer le nucléaire, l'armée ou des logements neufs non sociaux ? Son directeur a déclaré que "l’épargne populaire du Livret A, du Livret de développement durable et solidaire, du Livret d’épargne populaire… peut davantage encore financer la transformation de notre appareil de production énergétique". Il faut relever que l'amendement visant à financer l'industrie de la défense par le Livret A et le Livret de développement durable a été jugé anticonstitutionnel au titre de l'article 45 de la constitution. Mais si la CDC ne peut pas investir dans l'industrie de l'armement, sa filiale CDC Habitat rachètera 17.000 logements aux promoteurs pour soutenir une production de logements qui ne trouvent pas d'acquéreurs.
Les droits aux propriétés. Le droit de propriété est un droit de l'homme, comme le proclame la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789. Il est régi par l'article 544 du Code civil. On distingue deux droits de propriété : la pleine propriété et le démembrement de propriété qui repose sur la séparation entre l’usufruit et la nue-propriété. Il y a un troisième droit de propriété qui consiste à dissocier le bâti du foncier. C'est la loi Lagleize, votée en 2019, elle permettait d'être propriétaire des murs, mais pas du terrain. Cette loi n'a pas été encore promulguée, la date de son éventuelle entrée en vigueur n’est pas encore précisée. Pourtant son objectif était de réguler le prix de l'immobilier et de développer une nouvelle offre de logement accessible aux ménages les plus modestes.
Un quatrième droit au logement. La première action de l'État est de remplacer la LOI n° 2007-290 du 05 mars 2007 instituant le droit au logement opposable par une loi constitutionnelle : les personnes n’ayant reçu aucune proposition de logement social après un délai d'attente anormalement long ou qui sont sans logement, menacées d’expulsion, occupant un logement impropre à l’habitation peuvent saisir le préfet pour obtenir immédiatement un logement décent.
Pour construire 1 million de logements sociaux, nécessaires pour réponde à la demande, les bailleurs ne disposent pas de fonds suffisants pour construire ou rénover avec les prêts et les taux accordés aujourd'hui par la caisse des dépôts et de consignation. Alors quelle est la solution ?
Le nombre de ménages et leurs besoins en logements sociaux augmentent en fonction du niveau de vie, de la croissance de la population, de l'évolution des structures familiales et de la taille des ménages. La demande est inégalement répartie sur les territoires en fonctions de la création d'emplois et donc du développement industriel. Il y a deux enjeux majeurs : accroitre une offre abordable et très accessible pour les zones tendues, requalifier les anciens biens existants pour les zones en déprise.
L’État dispose encore d'environ 20 millions de m2 de terrains non occupés. L’État doit céder les terrains nécessaires aux petites villes pour 1€ symbolique dans les zones tendues. Les villes mettent ces terrains à la disposition des bailleurs sociaux pour la construction. Les bailleurs empruntent à la CDC et construisent des nouveaux logements. Ainsi pour la même somme empruntée, les bailleurs peuvent construire plus de logements car il n’y a pas de terrain à acquérir (entre 30% et 50% du prix de la construction). Ces nouveaux logements seront mis en location avec des loyers très modérés.
Pour les régions rurales abandonnées, l'État doit favoriser l'accès aux collectivités locales pour obtenir des crédits à taux fixes à longs termes. La Banque des territoires qui fait partie de la CDC doit intégrer un financement adéquat à ses collectivités locales pour leur permettre d'acquérir, de rénover les maisons anciennes abandonnées et de les proposer en location avec des loyers modérés.