La barbarie en fauteuil

Cher Stéphane tu pensais avoir tout vu, tout vécu, si tu savais ce qui se passe aujourd’hui… Tu n’es plus là, mais tu m’as appris à penser par moi-même et à ne jamais renoncer à ce que je crois au plus profond de moi, à la Liberté pour tous, à l’Egalité entre tous et à la Fraternité, comme tu y croyais aussi. A la Justice aussi, parce que sans elle, rien ne tiendra. La preuve, ce qui se passe aujourd’hui, en Palestine, à cause d’Israël, de l’Amérique et de tous leurs complices.

« Non, cette menace [la barbarie fasciste] n'a pas totalement disparu. Aussi, appelons-nous toujours à « une véritable insurrection pacifiste » contre les moyens de communication de masse qui ne proposent comme horizon pour notre jeunesse que la consommation de masse, le mépris des plus faibles et de la culture, l'amnésie généralisée et la compétition à outrance de tous contre tous. »
A ceux et à celles qui feront le XXIe siècle, nous disons avec notre affection :
« 

Créer, c'est résister. Résister, c'est créer

. »
Stéphane Hessel - 1917-2013 - Indignez-vous !, 2010

J’ai lu ce matin sur Mediapart, le témoignage d’un prisonnier iranien Reza Khandan, militant des droits humains qui était enfermé dans la même prison que Cécile Kohler. La prison qui a été bombardée par Israël. Et j’ai pensé en lisant que décidément, les hommes peuvent tout endurer. Tant qu’ils sont vivants, ils peuvent résister. Et tant qu’ils résistent ils peuvent témoigner. C’est important.

Sous ce témoignage venu de l’enfer, comme on revient de la mort, des lecteurs critiquent le témoignage parce que ce prisonnier ne dit pas que tout cela est de la faute d’Israël puisque c’est Israël qui a bombardé… Et c’est la foire d’empoigne pour savoir qui a raison, qui crie le plus fort…

Nous en sommes là, pauvre monde. Des dirigeants puissants jouent à qui perd gagne, d’autres puissants les regardent sans rien faire et des citoyens bien informés, et bien au chaud derrière leurs écrans, font la leçon à un prisonnier d’opinion qui a traversé l’enfer et qui a réussi à en témoigner.

Tu vois Stéphane où nous en sommes ?

« Barbare

C'est le mot qui me soutient
et frappe sur ma carcasse de cuivre jaune
où la lune dévore dans la soupente de la rouille
les os barbares
des lâches bêtes rôdeuses du mensonge
Barbare
du langage sommaire
et nos faces belles comme le vrai pouvoir opératoire
de la négation
Barbare
des morts qui circulent dans les veines de la terre
et viennent se briser parfois la tête contre les murs de nos
oreilles
et les cris de révolte jamais entendus
qui tournent à mesure et à timbres de musique
Barbare
l'article unique
barbare le tapaya
barbare l'amphisbène blanche
barbare moi le serpent cracheur
qui de mes putréfiantes chairs me réveille
soudain gekko volant
soudain gekko frangé
et me colle si bien aux lieux mêmes de la force
qu'il vous faudra pour m'oublier
jeter aux chiens la chair velue de vos poitrines. »

Aimé Césaire

Moi c’est sûr, ce matin j’aurais dû faire comme hier, et regarder les fleurs…