
Agrandissement : Illustration 1

« Une voix venue de l’Oliveraie
L’écho est venu de l’oliveraie.
J’étais crucifié sur le feu
Et je disais aux corbeaux : Ne me dévorez pas.
Je pourrais rentrer à la maison,
Le ciel pourrait pleuvoir,
Et il pourrait…
Éteindre ce bois carnassier !
Un jour je descendrai de ma croix.
Mais alors, comment
Rentrer chez moi, nu et nu-pieds ? »
Mahmoud Darwich
« Ultime prière
Il me paraît que mes poèmes tristes
Et toutes ces élégies seront souvenir
Et que les hymnes de la joie
Et les arcs-en-ciel
Seront célébrés par d’autres
Et que ma bouche demeurera ensanglantée
Sur la poussière et la broussaille
Merci alors pour ceux qui portent
Les cercueils de leurs morts !
Et pardon à ceux qui voient
Devant moi l’étendard de l’étoile
Dans son obscure nuit !
Il me paraît, ô croix de ma patrie,
Qu’un jour tu seras brûlée
Tu seras souvenir, tatouage
Et quand de toi descendront mes cendres
L’œil du destin se réjouira et dira :
« Ensemble, ils moururent »
Ah, que ne pourrais-je embrasser
Les pierres mêmes
Et crier : Seule demeure ma patrie ! »
Mahmoud Darwich
« Je suis de là-bas,
J’ai des souvenirs.
Je suis né comme naissent les gens.
J’ai une mère et une maison pleine de fenêtres.
J’ai des frères, des amis et une prison avec une fenêtre frisquette.
J’ai une vague que les mouettes ont dérobée.
J ’ai mon paysage favori.
J’ai un chaume, une lune au bord extrême du mot,
de la nourriture pour les oiseaux et un olivier immortel.
Je suis venu sur terre avant que les épées ne touchent un corps et en fassent un festin.
Je suis de là-bas.
Je rends le ciel à sa mère quand il pleure pour elle et moi je pleure pour que le nuage
me reconnaisse à son retour.
Pour rompre les règles j’ai appris tous les mots appropriés à la justice de sang.
J’ai tout appris de la langue, je l’ai démêlée pour former un seul mot : patrie. »
Mahmoud Darwich